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Responsable de la chronique : Jacques Marcotte, o.p.
Éditorial

Pour un vent de Pentecôte

Imprimer Par Jacques Marcotte & Anne Saulnier

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Nos sociétés évoluent vite, tellement vite que nous avons peine à suivre le rythme des changements. Il n’y a qu’à suivre les débats qui ont cours présentement autour de la libéralisation de la marijuana, du projet d’une loi fédérale sur l’aide médicale à mourir, de l’enregistrement obligatoire des armes à feu, du projet d’oléoduc Énergie-Est. Ces débats, bien que nouveaux, s’inscrivent dans un mouvement qui s’affirme depuis longtemps en accéléré. De fait, un passage incroyable s’est créé entre ce que nous étions comme société, il y a seulement quelques décades, et ce que nous sommes en train de devenir. Les normes et les valeurs qui s’imposaient, il n’y a pas si longtemps, ont littéralement éclaté au profit d’une liberté qui en inquiète plusieurs. Jusqu’où irons-nous dans cette émancipation qui s’en va tout azimut ?

Dans cette course effrénée vers l’avenir, il importe de nous demander ce que nous voulons bâtir ou atteindre comme société. Ce que nous pouvons observer actuellement c’est un appel général à nous ouvrir au monde, à sortir de nos horizons fermés, à briser nos cadres trop étroits, à mettre de l’avant des valeurs profondes de fraternité, d’accueil, d’ouverture, qui sont aussi bien des valeurs de l’Évangile.

Ce climat et ce besoin ressenti d’ouverture et de libération ne veulent pas dire la promotion d’un monde sans règle ni balise. Aller dans ce sens, ce serait bien évidemment nous diriger vers le chaos et favoriser un désordre intenable, inévitablement contreproductif.

Il nous est apparu que la parole du Christ telle que rapportée dans le 4e Évangile nous inspire la juste perspective dans laquelle nous pouvons nous placer en tant que chrétiens. Quand Jésus dit : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6), il se révèle Parole vivante et non pas loi figée. Celui qui est notre loi, le Christ, se rend présent en nous par son Esprit. À cause de cette présence, un principe d’adaptation et d’intégration est inhérent à notre condition de croyants, de croyantes, de communauté chrétienne, tous appelés à inventer un chemin neuf de justice, de paix, d’amour mutuel. Nous ne sommes pas des esclaves, mais des hommes et des femmes libres. L’Esprit fait de nous des gens libres par le dedans et non plus des gens déterminés seulement par l’extérieur, contrôlés nécessairement par des traditions figées.

Comme Israël en Égypte, Dieu nous invite à sortir et à traverser la mer et le désert vers une terre promise. Il accompagne de jour comme de nuit son peuple et nous invite à bâtir entre nous et avec lui de justes et saines relations. Humilité, confiance et audace nous sont nécessaires. Le défi à relever est immense; il s’agit d’une nouvelle création à produire. Le monde est ouvert et la promesse infinie, à la mesure de Dieu lui-même.

En vertu de cette liberté offerte, nous n’aurons plus peur d’évoluer; nous aurons peur seulement de nous durcir par des lois qui avaient peut-être pour but, dans le passé, de nous protéger, mais qui éventuellement deviennent caduques. En tant que société, nous avons diverses étapes à franchir, de façon libre et responsable, et pour cela, nous avons un guide sûr, le Christ, qui est lui-même chemin d’humanisation. Si nous ne sommes pas assez matures pour nous adapter et prendre le tournant, nous risquons de revenir en arrière et d’adopter des attitudes extrémistes, les mêmes que nous dénonçons ailleurs.

Faisons bien attention de ne pas tomber dans une réaction de vertige et de peur qui nous ferait échapper à tout changement. Rappelons-nous les paroles du Seigneur aux disciples : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé : vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. » (Jn 14, 1) Et encore ces mots de l’Apocalypse : « Voici que je fais toutes choses nouvelles ». (Ap 21, 5) L’Esprit de Pentecôte souffle encore, ne l’oublions pas et surtout, ne l’empêchons pas de souffler.

En collaboration
Anne Saulnier et Jacques Marcotte, OP
Québec

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