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Raoul Follereau. « Le Vagabond de la charité »

Imprimer Par Ambroise-Marie Carré

Homélie de ses funérailles en l’église Sainte-Jeanne-de-Chantal, à Paris, le 9/12/1977

Celui qui fut d’abord poète, un auteur dramatique, fut surnommé l’apôtre de la charité, « le Vagabond de la charité ». Au moment où certains chrétiens trouvent quelque peu affadi ce mot de charité, il l’a réhabilité. Il lui a rendu aux yeux du monde toute sa signification. Il l’a montrée, cette charité, à travers le service des hommes, jusqu’au cœur de Dieu.

Certes, le nom de Raoul Follereau est à jamais associé au combat contre la lèpre. Et le souvenir de ses campagnes en faveur d’Adzopé demeure dans beaucoup de mémoires comme une aventure, comme une épopée. Mais sa rencontre spirituelle avec le Père de Foucauld devait élargir à l’infini son horizon. Raoul Follereau s’est engagé au service des déshérités, des exclus, de tous ceux que la société opprime ou rejette. A l’occasion de la XXIIe Journée mondiale des lépreux, il écrivait, et laissez-moi le citer un peu longuement :

« Poursuivons cette bataille, cette « bataille pas comme les autres ». Lorsque j’ai commencé presque seul, les gens « informés » (informés de quoi, Seigneur) s détournaient, en disant : « C’est ainsi depuis que le monde est monde. Il n’y changera rien. C’est impossible.Impossible ? La seule chose impossible, c’est que nous les gens terriblement heureux, nous puissions continuer de manger, de dormir et de rire, alors que le monde, autour de nous, hurle, saigne et se désespère. Et c’est pourquoi elle devra, notre bataille, s’étendre dans l’avenir à toutes les lèpres. A ces lèpres cent fois plus meurtrières que sont la faim, le taudis, la misère. A ces lèpres mille fois plus contagieuses que sont l’inconscience cataleptique, l’égoïsme aux yeux de taupe, la lâcheté qui ne s’embusque que pour mieux s’enfuir… E la défiance qui défigure l’humanité. Et la haine qui la déshonore ».

Mon on peut s’attaquer à la lèpre et à toutes les lèpres sans en pâtir douloureusement, et parfois tragiquement. Celui qui poussait ce cri sublime : « Seigneur, faites-nous mal avec la souffrance des autres », comme il a eu mal tout au long de son itinéraire ! Je pense à ce texte où saint Paul évoque tout ce qu’il lui fallut endurer pour annoncer Jésus-Christ, et j’ai envie de l’appliquer à l’ami très cher qui vient de regagner la maison du Père. En faisant trente-deux fois le tour du monde, il a connu les périls, les inconforts, les menaces, les déceptions, et s’il y avait tant de joie sur son visage, comme sur celui de sa femme qui l’accompagna toujours, c’est parce que la joie est le privilège de ceux qui savent que le dernier mot appartiendra toujours à l’Amour.

Ne nous méprenons pas sur le sens de ce requiem que nous prononçons pendant cette messe. Bien sûr, il a droit au repos, lui qui a tant bataillé. Mais, d’abord, nous ne voyons guère Raoul Follereau se reposant, et ensuite le terme repos signifie autre chose dans le langage biblique : il signifie la plénitude de Dieu, la plénitude de l’amour de Dieu dans sa suprême activité. Pendant cette eucharistie, nous intercédons auprès de la miséricorde infinie, car il faut beaucoup prier pour ceux qui nous quittent, et en même temps nous avons la certitude que Raoul Follereau va plus que jamais continuer son œuvre. Il ne nous a pas abandonnés. Ne craignez pas…

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