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Témoins du Christ

La prière d’un témoin moderne

Imprimer Par Louis Évely

Louis EVELY (1910-1985) est un prêtre belge, écrivain qui a eu une grande influence sur la spiritualité, bien au-delà de sa mort en 1985. Ses nombreux ouvrages sont toujours d’actualité de sorte que plusieurs groupes de disciples se sont formés en Belgique, en France et ailleurs.

Que peut-on demander à Dieu ? Rien, ai-je répondu, car tout ce qu’il possède, il nous l’a donné. Mais que possède-t-Il ? Quel est son Royaume ? Que communique-t-il à ceux qui s’ouvrent à Lui ? Rien de ce que les hommes imaginent, car Dieu est pauvre, Dieu est faible, Dieu est souffrant puisqu’Il n’est qu’Amour. Dieu ne donne que de donner. Dieu ne donne que d’aimer. Dieu ne donne que de devenir pauvre comme Lui.

Regardez votre Dieu crucifié ! Allez-vous essayer de Lui extorquer de l’argent, un succès, une guérison, des faveurs (« une place à sa droite ou à sa gauche ») ? Prenez-vous la croix pour un paratonnerre ? Elle attire plutôt la foudre ! Dieu nous dit : « Tu dois être fort de ma force, et joyeux de ma joie, car je n’ai rient d’autre à te donner ». Le Christ n’est pas mort pour que nous ne souffrions pas ; Il n’a pas souffert pour que nous ne souffrions pas ; Il est mort et a souffert pour que notre mort et notre souffrance deviennent semblables aux siennes. Au crucifié, vous pouvez demander une chose : d’aimer et de croire comme Lui.

L’impuissance de Dieu éclate au Calvaire. Mais l’homme païen se reconvainc sans cesse que Dieu feint la faiblesse mais garde en réalité l’omnipotence. C’est tellement plus rassurant ! Non, Dieu n’est pas rassurant. Sa force est la force d’aimer ; sa joie est la joie de donner. Nul être n’est plus faible que Dieu du point de vue de l’homme païen ; et c’est douloureux d’admettre qu’il n’y a pas plus grande force que d’oser être faible comme cela ! L’idole à abattre est celle de la Toute-Puissance. Dieu n’est pas tout-puissant : il ne peut faire qu’un cercle soit carré ni que l’homme ne soit pas libre. En professant l’omnipotence de Dieu, vous niez la création, vous niez la liberté, vous faites de la Passion une pieuse comédie et surtout vous réintroduisez Jupiter sous le couvert de Jésus-Christ. Et, s’Il peut l’empêcher, Dieu est responsable de tout le mal du monde.

Dieu n’est pas tout-puissant comme nous le pensons, c’est-à-dire comme nous sommes tentés de le devenir. Il est toute-puissance d’amour, et non toute-puissance de force. Que de gens adorent un monstre ! Ils projettent en Dieu leur désir : « Ah, si j’étais tout-puissant ! » – « Eh bien, que feriez-vous ? Osez-vous le dire ? Et c’est cela que vous imaginez de Dieu ? »

Le vrai Dieu est une toute-puissance paternelle, une toute-puissance d’engendrement, une telle puissance d’amour qu’Il est incapable de susciter en chacun de nous un fils, une fille qui Lui ressemble. Or la paternité est l’expérience d’une dépendance totale, l’expérience du pouvoir inconditionnel qu’a sur vous un être infiniment fragile, infiniment dépendant, et à cause de cela tout-puissant sur votre cœur.

Dieu aurait pu être tout-puissant s’Il n’avait pas été amour ou s’Il n’avait eu personne à aimer. Il ne l’est plus depuis qu’il a créé l’homme et lui a confié le monde. Dieu, en faisant l’homme libre, a voulu se limiter. « Je suis libre, dit Gabriel Marcel, pour autant que Dieu mette une limite à sa puissance de production ». Ce n’est pas nous qui limitons Dieu, c’est Dieu qui a créé un être capable d Lui résister, capable d’introduire dans le monde ce que ne veut pas. Dieu a créé des créatures : un acte libre est imprévisible ; il n’est pas pré-contenu dans ses antécédents, il apporte du neuf. « Dans la ligne du mal, c’est la créature qui est cause première », c’est-à-dire créatrice (Maritain).

Vous savez bien que dans la Rédemption, Dieu a voulu avoir besoin des hommes. Cela ne contredit pas sa puissance, mais la fait éclater. De même, Il eut pu créer un monde de robots. N’est-il pas plus beau qu’Il ait préféré un monde d’hommes libres avec lesquels Il ne traiterait que dans la liberté de l’amour ?

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