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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

1er Dimanche de Carême. Année B.

Imprimer Par François-Dominique Charles

Vivons avec Jésus l’épreuve du désert

Jésus venait d’être baptisé. Aussitôt l’Esprit le pousse au désert.
Et dans le désert il resta quarante jours, tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient.
Après l’arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait :
« Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. »

Commentaire

Le désert est un lieu où on ne peut survivre tout seul. Celui qui va seul au désert, y meurt de soif, de faim, de chaud, de désespoir. Pour y survivre, il faut se mettre ensemble et obéir à un bon guide qui connaît parfaitement le désert et peut toujours conduire là où se trouve l’eau du puits et l’ombre de l’oasis. Le Christ entre dans ce désert où nous errons. Il entre dans le désert de nos égoïsmes, de nos intolérances, de nos conflits, de nos péchés. Il y entre pour se mettre à notre recherche, pour y rechercher tous ceux qui s’y perdent. L’Esprit le pousse au désert pour nous y retrouver afin de nous en faire sortir avec lui.

En effet, le désert n’est pas un lieu où l’on s’installe. Il est un territoire que l’on traverse pour aller ailleurs, là où on peut s’installer et vivre. Le désert est un lieu d’exode. Au désert, tout le monde devient vulnérable car toutes les sécurités s’écroulent. Si au désert les Hébreux ont murmuré contre Moïse et contre Dieu, c’est parce que le désert met à nu le cœur de l’homme ; ce qui s’y cache paraît en plein soleil. L’épreuve du désert fait apparaître le mal, le péché, tout ce qui se cache en nous et nous domine.

Mais le désert, contrairement souvent à ce que nous connaissons, est aussi un lieu où règne le silence. Il n’y a aucun bruit de voiture, aucune sonnerie de téléphone mobile et, en dehors des oasis, il n’y a même pas de chant d’oiseau. On n’y entend seulement le vent quand il souffle, ce vent de l’Esprit qui conduisit Jésus. Le désert est ainsi un lieu silencieux où il est possible d’entendre ce que les bruits étouffent : les « sollicitations intérieures ». C’est donc un lieu privilégié pour écouter la Parole silencieuse de Dieu qui s’adresse à nous dans le secret de nos cœurs. Ainsi, le prophète Élie traverse le désert pendant 40 jours et 40 nuits pour reconnaître la présence du Seigneur dans le silence d’une brise légère (1R 19,12). Voilà donc pourquoi le désert est le lieu des fiançailles entre Dieu et les hommes. Pour sceller l’alliance avec son peuple, Dieu l’a conduit au désert pour le préparer à accueillir sa Parole : il voulait l’amener à ouvrir les oreilles de son cœur et, comme il le dit lui-même au prophète Osée, « parler à son cœur » (cf. Os 2,16).

S’allier, c’est se mettre ensemble dans un but précis. Le plus souvent, on s’allie contre quelqu’un, pour mieux le détruire ou le contraindre à céder. Nous nous allions pour être plus fort, pour augmenter nos chances de vaincre, pour mieux légitimer notre combat comme on l’a vu au moment de la guerre d’Irak. Dans l’alliance avec Dieu, c’est Dieu qui se propose comme un allié dans notre combat contre le mal, contre le péché, contre les forces de mort qui sont en nous.

Au commencement du Carême, allons donc au désert avec Jésus. Ne « désertons » pas le désert ! Laissons-nous conduire par le souffle de l’Esprit de Dieu dans les lieux déserts de nos cœurs. Reconnaissons y notre violence, notre obstination, notre égoïsme. En un mot, reconnaissons notre péché. Mais reconnaissons aussi et surtout la voix de notre Allié, la voix de ce Dieu qui nous appelle à vivre en alliance avec lui. Ne restons pas aveuglés par nos prétentions plus ou moins claires de pouvoirs et de domination sur les autres : elles nous isolent dans un désert de solitude et de mort car, non seulement elles nous empêchent de nous ouvrir pour entendre la Parole divine qui est une source d’eaux vives au milieu du désert, mais elles nous isolent des autres. C’est cette Parole divine entendue dans le secret de nos existences qui nous pacifie en nous invitant à vivre en alliance avec Dieu et avec les autres. C’est cette Parole d’alliance proposée par l’Ami du désert qui nous permet de remporter la victoire contre un péché qui nous pousse à la lutte contre les autres en s’imaginant pouvoir « survivre » en solitaire.

Le Christ « est mort pour les coupables afin de vous introduire devant Dieu, écrit Pierre. Il est allé proclamer sa nouvelle à ceux qui étaient prisonniers de la mort, à ceux qui s’étaient révoltés… » Dieu a fait alliance avec Noé, puis avec Abraham avant de conclure l’alliance avec Moïse. Le Christ est venu sceller une alliance nouvelle et définitive. C’est lui notre seul véritable Allié dans notre combat contre le mal sous toutes ses formes. C’est lui notre Allié le plus sûr ! Il est l’arc de l’alliance dans le ciel de nos violences.

C’est seulement après avoir traversé le désert que Jésus commence à proclamer : « Le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la bonne nouvelle ! » Alors, nous aussi, entrons avec Jésus dans le désert du Carême en ayant le désir de nous convertir et de croire en lui. Alors nous en sortirons renouvelés intérieurement et nous pourrons proclamer la bonne nouvelle de la victoire de notre grand Allié sur le mal.

Frère François-Dominique CHARLES, o.p.

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