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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

17e Dimanche du temps ordinaire. Année A.

Imprimer Par François-Dominique Charles

Seigneur, donne-moi un cœur qui écoute !

Jésus disait à la foule ces paraboles : « Le Royaume des cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ.
Ou encore : Le Royaume des cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines.
Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète la perle.
Le Royaume des cieux est encore comparable à un filet qu’on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons.
Quand il est plein, on le tire sur le rivage, on s’assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon, et on rejette ce qui ne vaut rien.
Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges viendront séparer les méchants des justes
et les jetteront dans la fournaise : là il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Avez-vous compris tout cela ? – Oui », lui répondent-ils.
Jésus ajouta : « C’est ainsi que tout scribe devenu disciple du Royaume des cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien. »

COMMENTAIRE

Si l’on prêchait, comme semble le faire Jésus, que la vie chrétienne est une sorte de course au trésor qui peut rapporter gros, peut-être que les yeux des enfants, comme ceux des adultes, s’éclaireraient… Mais voilà ! Jésus ne dit pas que le Royaume est un trésor à trouver ! La vie chrétienne n’est pas un jeu de piste dont il faudrait trouver les messages codés dans les évangiles ! Jésus parle ici en parabole : il fait une comparaison quand il dit que « le Royaume des cieux est comparable à un trésor caché dans un champ » et que « celui qui le découvre vend tout ce qu’il possède pour acheter ce champ ».

Le Royaume dont parle Jésus n’a donc pas de prix : personne ne peut se l’approprier avec de l’argent ! Les gens très riches semblent même handicapés dans cette course au trésor : qu’on se souvienne de la malédiction de Jésus (Lc 6,24). Le prix à payer pour obtenir ce trésor consiste à tout donner ! La veuve du temple est exemplaire alors qu’elle n’a donné que deux piécettes ; mais Jésus constate qu’elle a donné « tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre » (Mc 12,44). Au jeune homme qui cherche le chemin de la vie éternelle, Jésus répond : « Va, vends tout ce que tu possèdes, tu auras un trésor dans les cieux, puis viens, suis-moi » (Mt 20,21).

Il s’agit, comme dans les épreuves olympiques, de donner tout ce qu’on est pour atteindre le podium. Cependant ici, il n’est pas question de remporter des médailles d’or ou d’argent ! Le fameux trésor à trouver n’est pas de l’or ou des biens matériels. C’est la présence, l’intimité de Dieu. Et ce trésor est à trouver, non pas au loin « dans les cieux » mais dans le champ, en nous-mêmes, là où la Parole a été semée par le Semeur. « Le Royaume, dit Jésus, est en vous. » Pour le découvrir, il n’y a pas d’autre moyen que d’emprunter le chemin de Jésus qui consiste à donner non seulement ce que l’on a mais surtout ce que l’on est, donner sa vie, se donner soi-même : « Qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la trouvera » (Mt 16,25).

Le Royaume est celui de l’amour, car « Dieu est amour » (1Jn 4,8). Et, comme il est si bien dit dans le Cantique des cantiques, « qui offrirait toutes les richesses de sa maison pour acheter l’amour ne recueillerait que mépris » (Ct 8,7). L’amour ne s’achète pas, l’amour n’a pas de prix : on ne fait la découverte de l’amour que dans une véritable relation aux autres et dans le don gratuit de soi. En donnant sa vie pour nous, Jésus nous apprend à « donner notre vie pour nos frères » (1Jn 3,16) : c’est cela le trésor à découvrir. Quand nous sommes animés par ce dynamisme de l’amour, nos yeux s’ouvrent : la présence des êtres aimés devient un cadeau merveilleux et le monde entier devient ce lieu où la Présence divine se laisse pressentir dans des interstices d’ombre et de lumière. C’est, me semble-t-il, le message de deux merveilleux films qui ont été primés au dernier festival de Cannes : The tree of life de Terrence Malick (palme d’or) et Le gamin au vélo de Jean-Pierre et Luc Dardenne (grand prix du jury). Tous deux, de manière certes bien différente, font percevoir que c’est l’amour seul qui peut changer les êtres en profondeur ainsi que leur regard sur le monde. Antoine de Saint Exupéry a bien raison de faire dire au petit prince que « l’essentiel est invisible pour les yeux ».

Ceux qui aiment Dieu, écrit Paul, sont appelés à devenir des icônes de son Fils et à constituer une multitude de frères de Jésus : ils deviendront des justes et partageront la gloire de Jésus. Le Royaume de Dieu rassemble ceux qui aiment Dieu et qui partagent la gloire de Jésus. C’est bien là ce trésor à trouver ; voilà pourquoi saint Paul dit aux Philippiens : « À cause de Jésus, mon Seigneur, j’ai accepté de tout perdre, afin de gagner le Christ et d’être trouvé en lui… le connaître, lui, avec la puissance de sa résurrection… lui devenir conforme dans sa mort afin de parvenir à ressusciter d’entre les morts » (Ph 3,8-10). C’est là le déconcertant chemin de la sagesse chrétienne.

Le grand Salomon, dans toute sa sagesse, a préféré demander à Dieu « un cœur qui écoute » (cette belle expression est rendue dans le texte de la liturgie par « un cœur attentif ») plutôt que des richesses… Et Dieu lui a donné un cœur sage et intelligent, c’est-à-dire un cœur capable d’écouter sa Parole pour être au service de son peuple. La vraie richesse consiste à avoir la capacité d’écouter Dieu dans sa vie ; elle consiste à reconnaître sa présence secrète mais toujours favorable dans tous les événements que nous traversons, même s’ils sont douloureux. Quelle belle prière que cette demande de Salomon ! Nous pouvons la faire nôtre et même la développer à notre guise : Seigneur, donne-moi un cœur capable d’écouter ta Parole ; donne-moi des yeux capables de voir ton invisible Présence (cf. Hb 11,27) ; donne-moi ton Esprit-Saint pour que je sois capable d’aimer et de vivre dans une offrande de moi-même à toi et à ceux qui m’entourent (cf. Rm 12,1)…

Demandons à Dieu, de nous donner ce cœur capable d’écouter ! Alors, nous découvrirons dans notre champ le trésor caché de sa Présence : c’est la vraie richesse que personne ne pourra nous ravir (cf. Rm 8,39). A qui voulons-nous ressembler ? À ces hommes des paraboles qui découvrent un trésor ou une perle précieuse et qui, plein de joie, donnent tout ce qu’ils possèdent pour acquérir ce trésor plus précieux que tout ou à ce jeune-homme qui, ayant rencontré sur sa route le vrai trésor – Jésus –, repart tout triste parce qu’il avait de grands biens (Mt 19,21-22) ?

Frère François-Dominique CHARLES, o.p.

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