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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

11e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Daniel Cadrin

Quand le pardon fait aimer

Un pharisien avait invité Jésus à manger avec lui. Jésus entra chez lui et prit place à table. Survint une femme de la ville, une pécheresse. Elle avait appris que Jésus mangeait chez le pharisien, et elle apportait un vase précieux plein de parfum. Tout en pleurs, elle se tenait derrière lui, à ses pieds, et ses larmes mouillaient les pieds de Jésus. Elle les essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers et y versait le parfum.
En voyant cela, le pharisien qui avait invité Jésus se dit en lui-même : « Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse. » Jésus prit la parole : « Simon, j’ai quelque chose à te dire. – Parle, Maître. » Jésus reprit : « Un créancier avait deux débiteurs ; le premier lui devait cinq cents pièces d’argent, l’autre cinquante. Comme ni l’un ni l’autre ne pouvait rembourser, il remit à tous deux leur dette. Lequel des deux l’aimera davantage ? » Simon répondit : « C’est celui à qui il a remis davantage, il me semble. — Tu as raison », lui dit Jésus.
Il se tourna vers la femme, en disant à Simon : « Tu vois cette femme ? Je suis entré chez toi, et tu ne m’as pas versé d’eau sur les pieds ; elle, elle les a mouillés de ses larmes et essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas embrassé ; elle, depuis son entrée, elle n’a pas cessé d’embrasser mes pieds. Tu ne m’as pas versé de parfum sur la tête ; elle, elle m’a versé un parfum précieux sur les pieds. Je te le dis : si ses péchés, ses nombreux péchés, sont pardonnés, c’est à cause de son grand amour. Mais celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour. »
Puis il s’adressa à la femme : « Tes péchés sont pardonnés. » Les invités se dirent : « Qui est cet homme, qui va jusqu’à pardonner les péchés ? » Jésus dit alors à la femme : « Ta foi t’a sauvée. Va en paix ! »
Ensuite Jésus passait à travers villes et villages, proclamant la Bonne Nouvelle du règne de Dieu. Les Douze l’accompagnaient, ainsi que des femmes qu’il avait délivrées d’esprits mauvais et guéries de leurs maladies : Marie, appelée Madeleine (qui avait été libérée de sept démons), Jeanne, femme de Kouza, l’intendant d’Hérode, Suzanne, et beaucoup d’autres, qui les aidaient de leurs ressources.

COMMENTAIRE

Nous reprenons les dimanches du temps ordinaire, après tant de festivités. Et nous nous retrouvons avec Jésus dans une maison, pour un repas, en un lieu et un temps de rencontres, de partage convivial. Jésus va manger chez un pharisien qui l’a invité. Cela permet de réajuster notre image des relations de Jésus avec les pharisiens, influencée par Matthieu. Luc en fait un portrait plus nuancé : certains étaient bien disposés envers Jésus.

Voici que le repas est troublé par l’arrivée d’une femme qui pose envers Jésus les gestes de l’hospitalité, avec ferveur. Jésus se laisse accueillir. Le pharisien en est choqué car cette femme est connue publiquement comme une pécheresse. Comment un homme religieux peut-il se laisser toucher par une impure?

Quel est le péché de cette femme, qui n’a pas de nom? Ce n’est pas indiqué. Jésus voit cette femme autrement que son hôte. Il ne dit pas d’abord à celui-ci que son regard n’est pas juste. Par une parabole, il l’invite à sortir de son cadre habituel de pensée, à regarder cette femme d’une manière plus profonde. La parabole sur la remise des dettes parle du pardon gracieux de Dieu et de ses fruits. La question de Jésus pose l’enjeu : qui aime le plus? La réponse du pharisien indique qu’il a bien saisi. Jésus fait ensuite les liens entre l’événement, les gestes de la femme, et la petite parabole, bien frappée. Le pardon transforme les personnes, il les rend capables d’aimer davantage.

Cette femme montre beaucoup d’amour envers Jésus. C’est qu’elle a reçu un grand pardon. Ses gestes témoignent de cette transformation qu’elle a vécue par le pardon. On interprète parfois ce récit dans le sens contraire : si elle est pardonnée, c’est parce que, auparavant, elle a beaucoup aimé. Mais ce n’est pas ce que dit la parabole, ni le commentaire de Jésus. Son hospitalité fervente est le fruit du pardon et non sa cause.

Cette femme a confiance en Jésus, elle ose s’en approcher pour exprimer sa reconnaissance. Comme bien d’autres femmes dans les Évangiles, ce que Luc souligne. Après la maison, nous reprenons la route de la mission avec Jésus et ses disciples, pour proclamer le Règne de Dieu. Un groupe de femmes accompagnent Jésus. Il était très rare à l’époque qu’un Maître soit ainsi entouré. Jésus n’est pas prisonnier des conformismes de son milieu.

Plusieurs de ces femmes, fidèlement, se retrouveront au pied de la croix et au tombeau. Elles accompagneront Jésus jusqu’au bout. Elles étaient probablement connues des premiers chrétiens, des lecteurs de Luc. La fameuse Marie de Magdala est mentionnée : rien ne dit qu’elle est la femme présente au repas. On voit aussi que Jésus ne vit pas de l’air du temps : il est financièrement soutenu par ce groupe. L’une d’elles, Jeanne, vient de la haute société.

Jésus se fait présent à un pharisien et à une pécheresse et les invite à une vie nouvelle, chacun à sa manière. Homme des rencontres, il fait rayonner la miséricorde de Dieu par delà les frontières. Son cercle n’est pas fermé mais ouvert largement. Il est la visite de Dieu parmi son peuple, une visite qui réjouit et relance dans l’espérance : Va en paix.

Où suis-je dans ce récit? Quel appel me fait-il entendre? Sûrement, à redécouvrir le pardon, à l’accueillir avec sa puissance libératrice, réconciliante, et à porter des fruits dans la ligne d’un renouvellement de mes capacités d’aimer. Et à marcher avec Jésus sur des chemins surprenants, avec d’autres disciples dont les visages sont plus variés qu’on pourrait croire.

Cette visite du Dieu vivant peut prendre des formes ordinaires ou plus inattendues : une parole qui m’encourage, un geste qui me relève, un courriel qui me touche, une image qui m’éveille, une célébration qui me pacifie, une rencontre qui m’engage, ….. Un signe de cette visite est clair : j’ai le goût d’accueillir et d’aimer davantage.

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