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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

Saint-Sacrement. Année A.

Imprimer Par Daniel Cadrin

Pain de vie, pour la vie

Après avoir nourri la foule avec cinq pains et deux poissons, Jésus disait : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. » Les Juifs discutaient entre eux : « Comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi. Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »

Commentaire :

En la fête du Saint-Sacrement et à la veille du Congrès eucharistique de Québec, en juin, l’évangile de Jean nous propose une réflexion à haute densité théologique. Ces paroles viennent à la fin d’un long discours de Jésus autour du pain vivant et de la manne du désert, de la vie éternelle et de la résurrection, sans compter le lien au Père. Le tout faisant suite aux récits des pains multipliés. L’enjeu fondamental en ce discours est celui de croire en Jésus Christ, pain de vie pour la vie éternelle. Et juste après la fin du discours, et cela est plein de sens, plusieurs disciples de Jésus vont décider de le quitter. Ils ne peuvent plus le suivre, ils sont choqués. Finalement, ils ne peuvent croire en lui.

La finale de Jean, en ce dimanche qui souligne la fête du Corps du Christ, reprend tous ces thèmes en étant plus centrée sur le sens sacramentel du lien entre Jésus et l’eucharistie. Quelle dimension de l’eucharistie cette réflexion fait-elle ressortir? Peut-être peut-elle, encore aujourd’hui, être source d’étonnement et de choc (.v.52). Nous sommes habitués d’entendre ces textes anciens, avec leurs images fortes (manger ma chair, mon sang est vraie boisson, ressusciter au dernier jour…). Nous sommes souvent blindés et routiniers face à ces paroles. Ou cela nous semble trop mystérieux pour y porter une véritable attention.

Il y a là pourtant des mots très simples et fondamentaux, qui parlent de Jésus et de notre lien à lui : pain, don, vie; manger, boire; demeurer, vivre…. C’est de cela dont nos existences sont faites. Des réalités premières mais profondes, où se disent nos faims et soifs, notre quête d’une vie vraie, sans fin. Cette réflexion est encadrée par un refrain, au début et à la fin : qui mange ce pain vivra éternellement.

Tout d’abord, il s’agit ici d’une participation active à l’eucharistie et non d’un regard à distance. Il s’agit de manger et boire. Cela engage le corps et ne se vit pas seul. Au temps de cet évangile, cela supposait une expérience de relations à d’autres personnes croyantes, dans une communauté fraternelle. Nous sommes loin ici d’une approche de l’eucharistie comme dévotion individuelle ou purement intérieure. Nous sommes en plein sacrement.

Cette participation est un acte qui exprime un croire en ce Jésus ressuscité. Ce n’est pas évident. Les réactions des auditeurs, qui prennent les paroles de Jésus littéralement, de manière fondamentaliste, disent bien qu’ils ne saisissent pas. Leur regard n’est pas celui de la foi mais un voir immédiat, sans dimension spirituelle. Le sens sacramentel n’est possible que dans l’expérience croyante, où le centre est le mystère pascal de Jésus. C’est parce qu’il est passé de la mort à la vie qu’il peut continuer ce don de la vie qu’il a réalisé sur la croix de gloire. Autrement, sans cette foi en Jésus le Vivant, le pain vivant et offert, celui du Verbe fait chair, ne signifie rien.

Manger et boire font entrer aussi dans une communion large, celle au Christ ressuscité qui conduit jusqu’au Père, d’où vient Jésus. Une circulation de vie qui revient fréquemment dans cet évangile. Car Jésus est venu pour donner la vie en abondance, cette vie dont la source et l’avenir est une réalité aimante, absolument, au présent.

Cette réflexion en Jean ne nous offre pas de conseils pratiques sur l’organisation de nos eucharisties, le style de nos liturgies. Elle nous redit l’essentiel en nous parlant de don, de vie, de foi en Jésus le Fils, incarné et ressuscité. Elle nous rappelle ou nous invite à découvrir qu’il s’agit d’un sacrement, du signe d’une présence, à accueillir de façon active, avec d’autres. De quoi nous laisser étonner, surprendre, encore aujourd’hui.

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