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Le psalmiste,

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Le psalmiste

Psaume 132 : Garde mémoire

Imprimer Par Michel Gourgues

1 Garde mémoire à David,
Seigneur, de tout son labeur,
2 du serment qu’il fit au Seigneur,
de son vœu au Puissant de Jacob:

3 « Point n’entrerai sous la tente, ma maison,
point ne monterai sur le lit de mon repos,
4 Point ne donnerai de sommeil à mes yeux
et point de répit à mes paupières
5 que je ne trouve un lieu à mon Seigneur,
un séjour au Puissant de Jacob. »

6 Voici! On parle d’elle en Ephrata,
nous l’avons découverte aux Champs-du-Bois!
7 Entrons au lieu où Il séjourne,
Prosternons-nous devant son marchepied!

8 Lève-toi, Seigneur, vers ton repos,
toi et l’arche de ta force!
9 Tes prêtres se vêtent de justice,
tes fidèles jubilent de joie!
10 À cause de David ton serviteur
n’écarte pas la face de ton christ.

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11 Le Seigneur l’a juré à David,
vérité dont jamais il ne s’écarte :
« C’est le fruit de tes entrailles que je mettrai sur le trône fait pour toi.
12 Si tes fils gardent mon alliance,
mon témoignage que je leur ai enseigné,
leurs fils eux-mêmes à tout jamais
Siégeront sur le trône fait pour toi. »

13 Car le Seigneur a fait choix de Sion,
il a voulu ce siège pour lui:
14 « C’est ici mon repos à tout jamais,
là, je siégerai, je l’ai voulu.
15 Ses justes, je les bénirai de bénédiction,
ses pauvres, je les rassasierai de pain;
16 ses prêtres, je les vêtirai de salut
et ses fidèles jubileront de joie.

17 J’affermirai la race de David,
j’apprêterai une lampe pour mon christ;
18 je vêtirai ses ennemis de honte
et sur lui fleurira son diadème. »
(traduction de la Bible de Jérusalem)

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« Garde mémoire, Seigneur ». C’est ainsi que commence ce psaume. Et ce qu’il demande à Dieu, c’est ce qu’il fait lui-même. Ce psaume se souvient en deux étapes d’un double engagement. D’abord, dans un premier volet (v. 1-10) de l’engagement de David envers Dieu. Puis, dans un second volet (v. 11-18), de l’engagement de Dieu envers David. Il est difficile d’être plus clair, puisque d’un volet à l’autre, les premiers mots se répondent. Cela devient plus clair encore si l’on colle de près au texte hébreu : « David a juré à Yahvé», proclame le v. 2; « Yahvé a juré à David », reprend en écho le v. 11.

David a juré au Seigneur (v. 1-10)

Ce qui est dit de l’engagement de David se comprend à la lumière des événements racontés aux chapitres 5, 6 et 7 du deuxième livre de Samuel.

Devenu roi de Juda et d’Israël, David fait la conquête de Jérusalem et décide de s’y établir (2 S 5,6-10). Après s’y être fait construire une maison (2 S 5,11), il se préoccupe de trouver un lieu où il pourra abriter l’arche de l’alliance : « Vois donc, dit-il au prophète Natân, j’habite dans une maison de cèdre et l’arche de Dieu habite sous la tente » (2 S 7,2). Symbole de la présence de Dieu au milieu de son peuple, l’arche, jusqu’alors, avait accompagné celui-ci dans ses mouvements et dans ses pérégrinations.

Maintenant que nous voilà stabilisés, estime David, il est temps de procurer à Dieu, au sein même de la nouvelle capitale, un lieu où lui-même pourra « se reposer ». En ce lieu privilégié de sa présence, le peuple pourra exprimer sa relation à lui. Jusqu’alors « en camp volant sous une tente et un abri », (2 S 7,6), Dieu se donnera désormais à rencontrer en un lieu fixe. Le psaume se fait insistant : « un lieu à mon Seigneur », « un séjour au Puissant de Jacob » (v. 5), « le lieu où il séjourne » (v. 7), « ton repos » (v. 8).

Le Seigneur a juré à David (v. 11-18)

À vrai dire, ce n’est pas seulement d’un mais de deux engagements de Dieu qu’il est question dans le second volet.

Au cœur de ce dernier, les v. 13-16 rappellent que le choix de Sion proposé par David a bel et bien été agréé par Dieu : « C’est ici mon repos à tout jamais, là, je siégerai, je l’ai voulu » (v. 14). C’est de ce lieu où désormais l’invoquera son peuple que Dieu se montrera présent à lui et assurera ses bénédictions à tous, justes et pauvres, prêtres et fidèles (v. 15-16).

Mais le psaume ne s’en tient pas là. Cet engagement de Dieu se trouve comme enrobé dans un autre sur lequel il fait porter l’accent. Celui-là s’exprime d’abord aux v. 11-12 puis, en finale, aux v. 17-18. Il s’agit d’un engagement à l’égard de David lui-même et de sa descendance. On ne trouve pas ici le jeu de mots rapporté au deuxième livre de Samuel : « Ce n’est pas toi qui me bâtira une maison (au sens d’un édifice); c’est moi qui te bâtirai une maison (au sens d’une dynastie) » (2 S 7,11-12). Mais c’est bien la même idée, répétée trois fois en mots différents : « C’est le fruit de tes entrailles que je mettrai sur le trône fait pour toi » (v. 11); « tes fils siégeront pour toujours sur ton trône » (v. 12); « j’affermirai la race de David » (v. 17).

Seul ou avec d’autres?

Jusqu’à maintenant, les choses paraissent assez claires. Mais il y a quelque chose dans la première partie du psaume dont nous n’avons encore rien dit. En réalité, cela recouvre la plus grande part du premier volet, où nous nous sommes concentrés sur le noyau central, c’est-à-dire l’engagement de David envers Dieu (v. 2-5). De qui est-il question dans les versets environnants? Qui est-ce qui, au v. 1, prie Dieu en lui demandant de se souvenir de cet engagement de David? Qui est-ce qui, au v. 6 et 7, s’exprime en disant « nous »? Et qui encore, aux v. 8-10, s’adresse à Dieu en évoquant, semble-t-il, une sorte de procession liturgique?

À certains indices, on croirait qu’il s’agit d’un individu et que cet individu est un roi, descendant de David. Ne termine-t-il pas en disant : « À cause de David ton serviteur, n’écarte pas la face de ton christ » (v. 10)? « Ton christ », c’est-à-dire celui qui a reçu l’onction unique réservée aux rois. D’autant plus que sa prière aux v. 8-10 correspond à celle que, selon le deuxième livre des Chroniques, prononça le roi Salomon lors de l’inauguration du nouveau Temple. C’est alors en effet qu’on y transféra l’arche d’alliance, pour l’introduire au lieu désormais réservé pour elle dans le Saint des Saints (2 Ch 5,7). « Yahvé Dieu, lève-toi, proclame le fils de David, toi et l’arche de ta force» (2 Ch 6,41 = Ps 132,8).

Mais, à d’autres traits, on croit reconnaître, non pas une personne seule, mais tout un peuple en prière, célébrant joyeusement la présence de son Dieu au milieu de lui à Jérusalem : « tes prêtres se vêtent de justice, tes fidèles jubilent de joie» (v. 9). Après avoir fait mémoire (v. 6) des démarches accomplies jadis par les gens de David lors du premier transfert de l’arche à Jérusalem (1 Ch 15,11-12.28), cette cohorte jubilante s’apprête à entrer au Temple où se trouve désormais l’arche et la présence divine qu’elle symbolise : « Entrons au lieu où il séjourne, prosternons-nous devant son marchepied! » (v. 7)

« Souviens-toi de ton Christ »

L’application, pour des oreilles chrétiennes, coule de source. Aussi bien, Pierre, à la Pentecôte, proclame-t-il l’accomplissement du psaume : en ressuscitant Jésus, Dieu s’est souvenu de son Christ. En l’exaltant à sa droite, en le faisant Seigneur à jamais, il a réalisé ce qu’il avait juré à David de faire asseoir pour toujours un de ses descendants sur son trône (Ac 2,30). Celui qui, pour un temps, a planté sa tente parmi les humains et partagé leurs cheminements, sa présence s’est désormais stabilisée auprès de Dieu. Exalté à sa droite, il a reçu l’Esprit de la promesse et il l’a répandu (Ac 2,33). Présent à travers lui désormais, c’est dans le cœur humain qu’il trouve « le lieu de son repos ».

Le psalmiste

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