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Le psalmiste,

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Le psalmiste

Le psaume 129. L’espérance surgie des profondeurs

Imprimer Par Christian Eeckhout

1-
Cantique des montées.
Des profondeurs je crie vers toi, Yahvé
2-
Seigneur, écoute mon appel.
Que ton oreille se fasse attentive à l’appel de ma prière!
3-
Si tu retiens les fautes, Yahvé,
Seigneur, qui subsistera?
4-
Mais le pardon est près de toi,
pour que demeure ta crainte.
5-
J’espère, Yahvé, j’espère de toute mon âme
et j’attends sa parole;
6-
mon âme attend le Seigneur
plus que les veilleurs l’aurore;
plus que les veilleurs l’aurore,
7-
qu’Israël attende Yahvé!

Car près de Yahvé est la grâce,
près de lui, l’abondance du rachat;
8-
c’est lui qui rachètera Israël de toutes ses fautes.
© La Bible de Jérusalem, Les Éditions du Cerf, Paris

Présentation du psaume

(verset 1a) Qu’il soit poème des montées vers Jérusalem ou prière pénitentielle du pèlerin en route, ce psaume est admirablement construit.

Les quatre premiers versets sont formulés en « je » et « tu ». Un dialogue très intime et personnel se laisse découvrir.

(versets 1b-2) Tout d’abord une supplication de salut, très concise. Dès les premiers mots, le cri d’angoisse vient des profondeurs de la pâte humaine, comme si le fait d’en être arrivé là, au point le plus bas de la terre, à la conscience de son état de pécheur, de mortel, donnait envie d’une remontée, permettait de croire qu’une issue est envisageable au malheur qui frappe l’homme. Et si elle existe, c’est par Dieu seul, qui n’est pas dur d’oreille.

(versets 3-4) La prière est exprimée d’emblée : si le gouffre est trop profond, personne ne pourra s’en sortir. Personne ne tiendra si les fautes restent comptées. Le malheur du péché mène à une impasse … à moins que le pardon escompté soit délivré et nous libère en vérité. Que le péché n’est pas la fin de l’histoire, voilà bien la certitude du psalmiste envers son Seigneur ! La « crainte » n’est pas la peur mais l’attitude juste, humble et lucide de qui ne veut pas décevoir Celui qui l’aime.

(verset 5) Vient ensuite un monologue : la « gorge » ou confiance de l’âme – ce ressort spirituel propre à l’être capable de rapport à la transcendance – se fait entendre par une affirmation d’espérance forte ! C’est le centre du psaume. J’ai compté sur la parole de Yahvé.

(versets 6-7a) Ayant accompli sa démarche personnelle, la gorge du psalmiste peut aussi interpeller sa communauté, c’est-à-dire « Israël », afin d’élargir la rédemption à tout le peuple, dont il est solidaire. Une foi en attente, patience courageuse pendant la nuit amène l’exhortation au pluriel. Le psalmiste sensibilise et invite à une libération de tous.

(versets 7b-8) L’aboutissement de la prière est noté sous forme de réconfort, par un argument de don, un motif de grâce assurée pour le peuple croyant en la fidélité et la puissance de Yahvé. Il a lui, le droit de rachat avant tout « autre » car Il s’est fait l’un de nous, il est né pour notre salut. « Heureuse faute qui nous valut un tel rédempteur » proclame le chantre dans l’« Exultet » de la liturgie de la veillée pascale !

Il est bien de se confier à Dieu, d’oser L’interpeller même, car sa tendresse est certaine. Par Jésus crucifié, l’abondance de la miséricorde, du rachat obtenu par sa mort, est offerte assurément. Du tréfonds où il était, le larron en a fait l’expérience. Le psalmiste, se sachant pécheur, avait préparé le chemin, crié son appel à l’aide, implorant avec forte espérance. Connaissant notre petitesse devant Dieu, l’abandon confiant du psalmiste est sa planche de salut.

Qu’en est-il pour nous ?

Pour nous également, dans les épreuves ou dans les souffrances, et surtout dans le cas de péché, voici une prière qui exprime et soutient celui ou celle qui ne veut pas se laisser abattre devant le mal ou la mort, devant les « ratés » de notre vie. Comme le psalmiste nous sommes conscients de nos torts, mais encore plus conscient de la miséricorde de Dieu.

L’image des veilleurs, assurés de la venue de l’aurore, quand bien même l’attente paraît longue ou la nuit froide, est « très parlante à quiconque doit passer une nuit de garde, à la guerre ou auprès d’un malade: (…) une image qui en dit plus sur l’espérance que tous les mots abstraits de notre vocabulaire religieux1 ». Jésus, au temps de son agonie, au bas du mont des Oliviers, pressé d’accomplir la volonté de son Père, n’a-t-il pas appelé à « veiller » la nuit (Mt 26,40.41 ; Mc 14,34.38), et même à veiller en tous temps (Lc 22,36) ?

N’a-t-il pas eu un cri passionné vers Dieu (Mt 27,46 ; Mc 15,34) reprenant dans sa prière le Ps 22,2 comme une plainte suivie d’une assurance du triomphe final ?

Quant au larron, son appel haletant à ne pas rester sur une fin de vie de condamné, n’a-t-il pas été entendu par Jésus miséricordieux, exauçant l’attente du pénitent et ouvrant à la plénitude de vie avec Lui au Royaume de Dieu. (Lc 23,42-43) ? Quelle libération, par pur amour ! Quelle joie de la naissance !

Ici les sécurités humaines n’aident en rien, ni la désespérance devant les misères. L’homme ne gagne qu’en comptant sur Dieu, qui donne la véritable paix.

Le Psaume 129 dans la liturgie

Le Ps 129(130) est utilisé dans la prière chrétienne à diverses reprises, toutes en rapport avec l’espérance. Lors de la Parole de Dieu à l’Eucharistie, le 5e dimanche de Carême de l’année A et le 10e dimanche du temps ordinaire de l’année B. Oui, ce psaume fait état de la déclaration évangélique de la gratuité du pardon offert à celui qui exprime avec humilité et confiance à la fois son repentir et son espérance, comme un « Kyrie eleison » impatient, un « Hosannah », un S.O.S.

Lors des funérailles, ce psaume d’espérance d’un pénitent est souvent choisi, non pas pour se lamenter, mais au contraire pour exprimer en église la confiance en Dieu rédempteur de l’homme.

Ce psaume est encore proposé comme une supplique chaque mercredi soir à l’office des Complies ; et le samedi soir dans la liturgie des heures de la deuxième semaine du mois. Celui qui cherche à vivre en présence de Dieu, se remettant à Lui avec entière confiance et le ferme espoir de vivre demain, d’espérer le lever du Dimanche, jour de fête de la résurrection du Christ Jésus, verra le grand jour de la naissance à Sa contemplation face à face.

À la vue de Jésus entre la vierge Marie et saint Joseph, les bergers et les mages de tout temps pourront chanter la grâce et l’abondance du rachat, car les vêpres de Noël offrent à prier ce psaume dans la joie ! « Un sauveur vous est né » (Lc 2,11) « Jésus, lui qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1,21). N’est-ce pas l’accomplissement du verset final de notre Ps 129 (130) ?

fr. Christian Eeckhout, o.p.

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