L’été est en train d’atterrir au Québec. Nous traversons une vague de chaleur qui laisse présager de sérieuses canicules. Nous entrons donc dans la belle saison. La nature dévoilera ses charmes et ses secrets. Nous prendrons des vacances.
Peut-être irons-nous aux noces. Car l’été, c’est aussi la saison des mariages. On se marie de moins en moins. Mais l’été demeure la période par excellence pour «convoler en justes noces». Par conséquent, l’été est devenu la saison des anniversaires de mariage. Il y aura des vingt-cinquièmes et des cinquantièmes durant les prochains mois. Et qui dit anniversaire pense bilan, mise au point, renouement… Bref, que sont nos amours devenues? Aujourd’hui, à cette étape-ci de votre parcours, comment se présente votre fidélité, la fidélité que vous vivez avec votre compagnon ou votre compagne de vie? Qu’est-ce qui se passe dans l’expérience concrète de votre fidélité?
La fidélité peut être vécue comme une obligation. Deux époux peuvent se sentir obligés l’un par rapport à l’autre. Un des deux conjoints peut avoir l’impression d’avoir perdu sa liberté. Le mariage peut être perçu comme une institution où on «se met la corde au cou», où on «enterre sa vie de garçon». Avec une autre personne, on ne fait pas toujours ce qu’on veut. Les habitudes sont bousculées. Il faut tenir compte de son conjoint, tenir compte des enfants, quand il s’agit de prendre des décisions. Évidemment, pas question d’avoir des relations avec d’autres personnes que son conjoint. «Plus, c’est refuser de traiter un tiers avec les mêmes égards et les mêmes attentions que son conjoint.» (DURAND, Guy, «L’indissolubilité du mariage en regard de la réflexion morale», dans Société canadienne de théologie, Le divorce, coll. «Héritage et projet», no 6, Montréal, Fides, 1973, p. 108)
Si vous vivez la fidélité comme une obligation, vos amours ne sont pas très dynamiques. Vous en conviendrez avec moi. Mais tout n’est pas mauvais quand on est fidèle par obligation. Il n’existe pas de fidélité sans un minimum de contraintes. Il n’y a rien de déshonorant dans le fait qu’on tienne ses promesses. Au contraire, c’est un point d’honneur.
Sans que vous sentiez d’obligation stricte, vous pouvez aussi vivre la fidélité comme une habitude. Les deux époux se sont adaptés l’un à l’autre. Chacun accepte les goûts et les caprices de l’autre. Chacun connaît l’autre; connaît ses opinions; devine ses pensées; prévoit ses réactions. Bref, pas de surprise! «L’on demeure ensemble par inertie, par passivité, par peur de l’inédit, par peur de l’insolite. On évite l’adultère par manque d’esprit de conquête et de créativité, ou bien par crainte instinctive de voir crouler tout “ce monde” connu, tout cet équilibre somme toute satisfaisant.» (DURAND, Guy, op. cit., p. 109) Qui ne vit pas, un jour ou l’autre, une fidélité par habitude? Qui, un jour ou l’autre, ne met pas le pilote automatique et laisse filer sa voiture à vitesse constante, sans se préoccuper du rendement de sa bagnole?
Évidemment, une telle fidélité n’a rien d’emballant. Mais il est normal que, de temps à autre, on se surprenne à laisser aller les choses. On ne peut pas toujours carburer à plein gaz, la pédale au fond. Pour reprendre son souffle, chacun a besoin de relâcher la vapeur.
Heureusement, il existe des périodes plus fécondes où la fidélité est vécue comme la plénitude de l’amour. La fidélité se fait alors créatrice. Le couple est alors source de vitalité. Les deux partenaires sont attachés l’un à l’autre parce qu’ils se font vivre mutuellement. Leur amour est dynamique, leur fidélité aussi. «Être fidèle, c’est garder un regard neuf et émerveillé sur l’autre.» (DURAND, Guy, op. cit., p. 109)
Si vous êtes en couple depuis un certain nombre d’années, vous avez probablement connu la fidélité par obligation, la fidélité par habitude et, je l’espère aussi, la fidélité comme la plénitude votre amour. Nécessairement, chacun peut vivre les trois niveaux de fidélité dans une vie de couple à différentes périodes de la vie. L’idéal, c’est bien sûr d’arriver le plus possible à vivre une fidélité dynamique et créatrice. C’est l’eau vive de nos amours. Elle est «une force qui triomphe du temps». (GUARDINI, Romano, Morale au-delà des interdits, Paris, Cerf, 1970, p. 80)