Tenue de mise
Jésus se remit à parler en paraboles : « Le Royaume des cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils. Il envoya ses serviteurs pour appeler à la noce les invités, mais ceux-ci ne voulaient pas venir. Il envoya encore d’autres serviteurs dire aux invités : ‘Voilà : mon repas est prêt, mes boeufs et mes bêtes grasses sont égorgés ; tout est prêt : venez au repas de noce. Mais ils n’en tinrent aucun compte et s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce ; les autres empoignèrent les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Le roi se mit en colère, il envoya ses troupes, fit périr les meurtriers et brûla leur ville. Alors il dit à ses serviteurs : ‘Le repas de noce est prêt, mais les invités n’en étaient pas dignes. Allez donc aux croisées des chemins : tous ceux que vous rencontrerez, invitez-les au repas de noce. Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu’ils rencontrèrent, les mauvais comme les bons, et la salle de noce fut remplie de convives. Le roi entra pour voir les convives. Il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce, et lui dit : ‘Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce ? L’autre garda le silence. Alors le roi dit aux serviteurs : ‘Jetez-le, pieds et poings liés, dehors dans les ténèbres ; là il y aura des pleurs et des grincements de dents.’ Certes, la multitude des hommes est appelée, mais les élus sont peu nombreux. »
Commentaire :
Une fois encore, il importe de lire ce texte dans son contexte de communauté chrétienne primitive. Cette parabole fait partie d’un groupe de trois avec lesquelles Jésus fait le procès des dirigeants juifs coupables de refuser son message de salut : les deux fils (21, 28-32) les vignerons homicides (21, 33-46) et finalement les invités qui refusent (22,1-14).
L’Eucharistie à laquelle nous prenons part est comme un banquet de noces. La première lecture extraite du prophète Isaie nous met déjà en piste: « Yahvé prépare pour tous les peuples, sur cette montagne, un festin de viandes grasses et de bons vins… Voyez c’est notre Dieu. En lui nous espérions pour qu’il nous sauve …» (Is 25, 6-9) La question, toujours la même, demeure : avons-nous vraiment accueilli l’invitation du Seigneur ? Nous sommes, il est vrai, dans la salle des noces, participants de la célébration ; mais notre cœur est-il vraiment là, délibérément engagés dans l’œuvre du salut, et jusqu’ou`avons-nous accepté la miséricorde de Dieu ? « Beaucoup d’appelés, mais peu d’élus ! » La réflexion devrait nous laisser songeur.
Dans cette parabole, deux fois l’invitation est demeurée infructueuse. La première reçoit un refus : les invités ne veulent pas venir. La seconde évoque des raisons de commerce, d’affaires, etc, et comporte en plus des sévices exercés contre les envoyés. Une troisième invitation rejoint tous les passants à la croisée des chemins, les mauvais et les bons. Ceux qui ont refusé, c’étaient les gens pieux comme les Pharisiens, les théologiens comme les scribes, les chefs religieux comme les prêtres, tous ont refusé alors que l’invitation leur était d.’abord destinée. Mais les petits, les marginaux se sont montrés plus empressés et se retrouvent autour de la table, à la place des invités. C’est alors que Jésus déclare à ceux qui critiquent sa conduite illégale : « Sachez donc que ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. » (Mt.9, 12) Tout en justifiant une fois encore le comportement de Jésus pour les pauvres et les pécheurs, la parabole condamne le rejet et la mauvaise foi de ses adversaires, retenus par l’attachement aux richesses et le souci des affaires mondaines.
Comme ajout à la parabole, suit l’épisode de l‘invité mal vêtu : il ne porte pas la robe nuptiale. Tout pécheur et marginal que l’on soit, nul n’est dispensé autour de la table d’une certaine obligation de pureté et de sainteté. Répondant gracieusement à l’invitation « at large », chacun doit s’imposer un certain effort et revêtir l’homme nouveau du vêtement de la justice et de la fidélité au Christ. La réaction du roi face à l’intrus fait contraste avec sa générosité dans l’invitation : l’invité est rejeté, exclus du festin et livré au désespoir. On n’entre pas dans le Royaume de Dieu à si bon compte. Les juifs étaient tentés de croire qu’en raison de leur élection comme peuple de Dieu, tout leur était garanti. Certains des nos jours seraient tentés de dire : « Dieu, c’est mon chum, on va bien s’arranger ! » Si l’appel au salut est universel, il n’exempte pas d’une réponse totale et permanente. Dans l’esprit du Seigneur, l’invitation au festin n’est pas sans condition, être invité ne signifie pas être admis à y participer. Nul ne jouit de droits et privilèges particuliers, mais tous sont tenus à certains devoirs.
La vie nouvelle pour le chrétien consiste à revêtir le Christ par le baptême (Ga. 3,27) Chacun au cours de sa vie doit présenter un accueil inconditionnel à l’amour divin par une vie féconde au service du Royaume. Telle est la tenue de mise pour entrer au festin du Royaume.