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Méditation chrétienne,

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Méditation chrétienne

Lettres

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Antoine naquit à Qeman, en Égypte. Patriarche du monachisme chrétien, il se retira comme ermite dans les déserts de la Thébaïde. Il fonda, pour les nombreux chrétiens qui le rejoignaient, les deux premiers monastères voués à la vie cénobitique. Les sept lettres écrites en copte qui lui sont attribuées se rattachent à celles de saint Paul par le contenu comme par le style. Il mourut au mont Golzim, près de la mer Rouge.

Lettre II

1. Frères très chers et honorés, Antoine vous salue dans le Seigneur.

Nous le savons, Dieu n’a pas rendu visite à ses créatures qu’une seule fois. Depuis les origines du monde, ceux qui ont trouvé dans la Loi de l’Alliance le chemin de leur Créateur ont tous été accompagnés de sa bonté, de sa grâce et de son Esprit. Quant aux êtres spirituels dont cette Loi causa la mort, celle de leur âme comme celle des sens de leur cœur, ils sont devenus incapables d’exercer leur intelligence selon l’état de la création originelle et, entièrement privés de raison, ils ont été asservis à la créature au lieu de servir le Créateur.

Mais, en sa grande bonté, Dieu nous a rendu visite par la Loi de l’Alliance. Notre nature, en effet, demeurait immortelle. Et ceux qui ont reçu la grâce et que la Loi de l’Alliance a fortifiés, ceux que l’enseignement de l’Esprit Saint a éclairés et qui ont été gratifiés de l’esprit de filiation, ceux-là ont pu adorer leur Créateur comme il se doit. C’est d’eux que l’apôtre Paul a dit : S’ils n’ont pas pleinement bénéficié de la promesse qui leur fut faite, c’est à cause de nous (Heb. 11, 13.39).

2. Dans son amour inlassable, le Créateur de toutes choses désirait cependant nous rendre visite dans nos maladies et notre dissipation : il suscita Moïse le législateur, qui nous donna la Loi écrite et jeta , les fondements de la Maison de vérité, l’Église catholique. C’est elle qui a fait l’union de tous, selon le dessein divin de nous ramener à notre condition première.

Moïse en entreprit la construction, mais ne l’acheva pas; il la laissa et s’en fut. Vint l’assemblée des Prophètes suscités par l’Esprit de Dieu. Eux aussi poursuivirent la construction sur les fondements de Moïse sans pouvoir l’achever. Ils la laissèrent ainsi et s’en furent. Chacun, revêtu de l’Esprit, constata que la plaie était incurable et que nulle créature ne pouvait la guérir, si ce n’est le Fils Unique, empreinte fidèle du Père, image de celui qui créa à cette image les êtres doués d’intelligence. Lui, le Sauveur, est un médecin avisé ; eux le savaient. Ils se réunirent donc et présentèrent à Dieu, pour les membres de cette famille dont nous faisons partie, une prière unanime : N’y a-t-il pas de baume en Galaad ? N’y a-t-il pas de médecin ? Pourquoi l’un d’entre eux ne monte-t-il pas guérir la fille de mon peuple ? (Jer. 8, 22). Nous lui avons, quant à nous, donné nos soins; elle n’a pas guéri. Laissons-la et partons d’ici (Jer. 51,9).

Alors Dieu, débordant d’amour, vint a nous en disant par la voix de ses saints : Fils de l’homme, prépare-toi tout ce qu’il faut pour une captivité (Ez. 12, 3). Et lui, l’Image de Dieu (2 Co. 4, 4), n’eut pas la pensée de ravir le rang qui l’égalerait à Dieu; au contraire il s’humilia et, revêtant 1’image du serviteur, il se fit obéissant jusqu’à la mort et la mort de la croix. Aussi Dieu lui a—t-il donné le Nom qui est au-dessus de tout nom, de sorte qu’à ce Nom de Jésus-Christ tout genou fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue désormais confesse que Jésus-Christ est le Seigneur pour la gloire de Dieu le Père (Phil. 2, 6-11). A présent, frères très chers, elle s’est réalisée parmi vous cette parole : Pour nous sauver, la tendresse du Père n’a pas épargné le Fils Unique, mais l’a livré pour notre salut à cause de nos péchés (Rom. 8, 32). Nos iniquités furent ses humiliations, et ses plaies, notre guérison (Is. 53, 5). Son Verbe tout-puissant nous a rassemblés de tous les pays, d’un bout à l’autre de la terre et de l’univers, ressuscitant nos âmes, pardonnant nos péchés, nous enseignant que nous sommes membres les uns des autres.

3. Je vous en supplie, mes frères, par le Nom de notre Seigneur Jésus-Christ, pénétrez-vous bien de cette merveilleuse Économie du salut : II s’est fait semblable à nous en tout, hormis le péché (Heb. 4, 15). Tout être doué d’intelligence spirituelle – celui-là pour qui est venu le Seigneur – doit prendre conscience de sa nature propre, c’est-à-dire qu’il lui faut se connaître lui-même et opérer le discernement du mal et du bien, s’il veut trouver la libération lors de l’Avènement du Seigneur. Ceux-là portent déjà le nom de serviteurs de Dieu, qui ont obtenu leur libération par cette Économie du salut. Mais le terme suprême n’est pas là. Ce n’est que la justice de l’heure présente, ce n’est que le chemin vers l’adoption filiale.

4. Jésus, notre Sauveur, sachant bien qu’ils avaient reçu l’Esprit de filiation et qu’ils le connaissaient grâce à l’enseignement de l’Esprit Saint, leur disait : Je ne vous appellerai plus serviteurs, mais frères et amis, car tout ce que m’a enseigné le Père, je vous en fait part et vous l’ai enseigné (Jn. 15, 15). Leur esprit s’enhardit – ils se connaissaient désormais avec leur nature spirituelle – et ils s’écrièrent : Jusqu’ici nous te connaissions dans ton corps, mais maintenant ce n’est plus ainsi (2 Co. 5, 16). Ils reçurent l’Esprit qui fit d’eux des fils adoptifs et proclamèrent : L’Esprit que nous avons reçu, ce n’est plus un esprit qui rend esclave et ramène à la terre, mais un Esprit qui fait de nous des fils adoptifs et par lequel nous crions : Abba, Père ! (Rom. 8, 15). Seigneur, nous le savons à présent, tu nous as donné d’être fils et héritiers de Dieu, cohéritiers du Christ (Rom. 8, 17).

Mais sachez bien ceci, frères très chers : Celui qui aura négligé son progrès spirituel et n’aura pas consacré toutes ses forces à cet ouvrage, celui-là doit bien savoir que l’Avènement du Seigneur sera pour lui le jour de sa condamnation. Le Seigneur est pour les uns une odeur qui de la mort conduit à la mort, pour les autres une odeur qui de la vie conduit à la vie (2 Co. 2, 16). S’il est là, c’est pour la ruine et la résurrection d’un grand nombre en Israël, et pour être un signe de contradiction (Lc. 2, 34).

Je vous en supplie, bien-aimés, par le Nom de Jésus-Christ, ne négligez pas l’œuvre de votre salut. Que chacun d’entre vous déchire non pas son vêtement, mais son cœur (Joël, 2, 13). Que ce ne soit pas en vain que nous portions ce vêtement extérieur, nous préparant ainsi une condamnation. En vérité, le temps est proche où paraîtront au grand jour les œuvres de chacun.

Il faudrait revenir sur bien d’autres points de détail, mais il est écrit : Donne un peu au sage, et il en deviendra plus sage encore (Prov. 9, 9). Je vous salue tous dans le Seigneur, du plus petit au plus grand (Ac. 8, 10). Et que le Dieu de paix soit, frères très chers, votre gardien à tous. Amen.

Saint Antoine le Grand (251-356)

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