Spiritualité 2000 met à votre disposition 22 années d’archives, soit près de cinq mille articles. Un grand merci à tous nos artisans qui ont su rendre possible cette aventure ayant rejoint des millions d’internautes.

Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

2e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Jour de Dieu

La quinzième année du gouvernement de Tibère César, alors que Ponce Pilate était gouverneur de la Judée, Hérode, tétrarque de Galilée, Philippe, son frère, tétrarque des régions d’Iturée et de Trachonitide, et Lysanias, tétrarque d’Abilène, alors qu’Hanne et Caïphe étaient grands prêtres, Dieu a parlé dans le désert pour Jean, le fils de Zacharie. Il est venu dans tout le pays du Jourdain. Il annonçait un baptême de repentir pour l’effacement des fautes. Ainsi qu’il est écrit dans le livre du prophète Isaïe : « Une voix crie dans le désert : préparez le chemin du Seigneur, redressez ses sentiers, chaque ravin sera comblé, chaque montagne et chaque colline seront rasées. Ce qui est tordu deviendra droit, ce qui est escarpé sera aplani ; et chacun verra la délivrance de Dieu. »

Commentaire :

Dans la préface de la fête de saint Jean-Baptiste nous lisons : « Seul de tous les prophètes, Jean-Baptiste a pu montrer celui qu’il annonçait, le Rédempteur du monde, Jésus Christ, notre Seigneur ». Même si ce passage sous la plume de l’historien Luc tente de situer le précurseur dans l’histoire, c’est davantage Jésus qu’il situe au cœur de nos mémoires humaines. Nous sommes aux environs du 19 août 28 et Tibère César est empereur romain et maître du monde. Ponce Pilate, préfet de Rome, a gouverné la Judée de 26 à 36. Hérode, domina les tétrarchies de Galilée et de Pérée de l’an 4 à 39, lui que l’historien Flavius Joseph voit comme l’adversaire de Jean-Baptiste ( Lc. 3 : 19-20). Au Nord-est du lac de Tibériade, un autre fils d’Hérode le Grand, Philippe est gouverneur. Pour en finir avec l’état civil, Luc fait mention ici d’un tétrarche obscur, Lysanias qui, comme Philippe, gouverne sur les terres païennes. Et pour terminer cette rétrospective historique, l’historien mentionne « les grands prêtres Anne et Caïphe ». Ce rappel de Anne, grand prêtre de l’an 6 à l’an 15 de notre ère, auquel Caïphe succéda en l’an 18, laisse à penser que l’ex grand-prêtre jouissait toujours d’une autorité exceptionnelle sur le peuple.

C’est dans ce décor historique que, inspiré par une formule de l’Ancien Testament (Jér. 1 : 1) , Luc nous dit que « la parole de Dieu fut sur Jean, fils de Zacharie, dans le désert ». L’événement mérite d’être souligné parce qu’aucune voix prophétique ne s’était fait entendre depuis près de cinq siècles ( Ps. 74 : 9 ; 1 M. 4 : 46 ; 9 : 27). Luc, en bon historien, va nous présenter ce nouveau prophète dans son lieu de travail, sa méthode et le sens de sa prédication. (3-6) Dans son évangile, Jean Baptiste ne haranguait pas dans le désert comme le précisait Matthieu (3 : 16) et Marc (1 : 4-5) mais dans la région du Jourdain ; le précurseur prêchait un baptême de conversion en vue de la rémission des péchés. Ce faisant, il continuait la tradition prophétique de l’Ancien Testament et l’appel au peuple à revenir au Seigneur. Le baptême signifiait cette volonté de conversion, l’immersion, selon le rite traditionnel judaïque, indice de purification. Mais ce rituel de Jean ne remettait pas les péchés, le pardon sera l’œuvre de Jésus (Lc. 24 : 47). Et pour bien identifier le nouveau prophète, Luc évoque ici la prophétie d’Isaïe : « Une voix crie : Préparez dans le désert une route pour Yahvé. Tracez droit dans la steppe un chemin pour notre Dieu…» ( Is. 40). Les images utilisées dans ce passage sont sans doute les plus significatives de la condition du pécheur et de l’œuvre de la grâce : les ravins seront comblés, les montagnes et collines abaissées, les détours des routes redressés et les obstacles aplanis. Puis Luc termine par une exaltation à laquelle nul ne peut rester indifférent : « Toute chair verra le salut de Dieu » (6) : Le salut est offert à tous sans exception. C’est là l’un des thèmes chers à l’évangéliste (Lc. 1 : 69, 71, 77 ; 19 : 9). Le vieillard Syméon annoncera ce salut ( Lc. 2 : 20) et le Livre des Actes conclura avec cette même promesse (28 : 28).

La lecture de ce passage de Luc peut nous étonner : pourquoi tant de références historiques concernant la mission du Précurseur alors qu’il ne donne aucune précision historique quand il est question de Jésus. Rendons-nous à l’évidence que l’évangéliste traite simultanément de Jésus et du Baptiste. Les références 1 : 5-25 et 26-38 ainsi que 3 : 1-2 valent et pour l’un et pour l’autre. La mention des chefs d’état est en concordance avec l’avènement du roi Jésus. Luc pense davantage à Jésus qu’à Jean-Baptiste. Les débuts de Jésus ont suivi de peu ceux de Jean. La mission de Jean constitue la dernière annonce du salut, celle de Jésus réalise la venue de Dieu et le salut de toute chair. Situer ainsi Jean Baptiste dans le temps, c’est également situer Jésus dans notre temps, notre histoire. C’est non moins nous habituer à lire chaque page de cette histoire, de ce temps comme une préparation à la venue de Dieu.

Noël célèbre un moment historique, mais c’est chaque jour que le temps de Dieu prend forme dans notre histoire et nous oriente vers sa venue ultime dans la gloire tout en nous y préparant. Nous vivons chaque jour ce Jour de Dieu. Et le vivre intensément, n’est-ce pas s’y préparer ?

Parole et vie

Les autres thèmes