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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Jacques Marcotte, o.p.
Parole et vie

Homélie pour le 28e Dimanche (A)

Imprimer Par Jacques Marcotte, o.p.

Notre prêt-à-porter pour la fête!

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 22, 14

En ce temps-là,
    Jésus se mit de nouveau à parler
aux grands prêtres et aux pharisiens,
et il leur dit en paraboles :
    « Le royaume des Cieux est comparable
à un roi qui célébra les noces de son fils.
    Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités,
mais ceux-ci ne voulaient pas venir.
    Il envoya encore d’autres serviteurs dire aux invités :
‘Voilà : j’ai préparé mon banquet,
mes bœufs et mes bêtes grasses sont égorgés ;
tout est prêt : venez à la noce.’
    Mais ils n’en tinrent aucun compte et s’en allèrent,
l’un à son champ, l’autre à son commerce ;
    les autres empoignèrent les serviteurs,
les maltraitèrent et les tuèrent.
    Le roi se mit en colère,
il envoya ses troupes,
fit périr les meurtriers
et incendia leur ville.
    Alors il dit à ses serviteurs :
‘Le repas de noce est prêt,
mais les invités n’en étaient pas dignes.
    Allez donc aux croisées des chemins :
tous ceux que vous trouverez,
invitez-les à la noce.’
    Les serviteurs allèrent sur les chemins,
rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent,
les mauvais comme les bons,
et la salle de noce fut remplie de convives.
    Le roi entra pour examiner les convives,
et là il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce.
    Il lui dit :
‘Mon ami, comment es-tu entré ici,
sans avoir le vêtement de noce ?’
L’autre garda le silence.
    Alors le roi dit aux serviteurs :
‘Jetez-le, pieds et poings liés,
dans les ténèbres du dehors ;
là, il y aura des pleurs et des grincements de dents.’

    Car beaucoup sont appelés,
mais peu sont élus. »

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COMMENTAIRE

« Le royaume des cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils. »  C’est tout un événement qui nous est annoncé. Le genre d’événement que personne ne veut manquer ? Le fils du roi, c’est le point de mire de tous les sujets du royaume, dont nous sommes. Comme tous les parents du monde, le roi veut ce qu’il y a de plus beau pour son fils, y compris le plus beau mariage. Il veut que tout le monde en fasse une fête extraordinaire. Il prévoit tout, prépare tout. 

D’où l’étonnement suscité par la réaction des invités de la première ligne : « Ceux-ci ne voulaient pas venir ». On comprend la déception du roi devant le manque d’enthousiasme qui se manifeste et le refus même qui s’affirme. Il insiste pourtant, il n’ose pas imaginer, il ne croit pas que le refus soit possible. « Tout est prêt, venez au repas de noce ». C’est gratuit! C’est une grande fête! Faites-moi l’honneur et la joie d’y être!

Mais voilà que les choses se clarifient à l’évidence et que s’affiche nettement un disgracieux manque d’intérêt, et même un désaccord, une véritable opposition qui va mal finir. Les invités ont l’idée ailleurs. Ils boudent. Certains se montrent même malfaisants à l’endroit des messagers du roi.

La parabole, on le pense bien, vise le peuple juif qui n’a pas su accueillir les prophètes ni Jésus lui-même, en s’enfermant dans une obéissance stricte à la loi, ne comprenant pas qu’il était convié à la fête d’une alliance nouvelle, d’un régime de gratuité et de liberté auquel Dieu pourtant le préparait depuis longtemps. 

Le message de la parabole s’adresse aussi, on peut le penser, aux premières communautés chrétiennes, et à nous aussi en même temps, nous qui avons foi au Christ et qui sommes baptisés et confirmés dams cette foi, mais qui avons souvent l’idée ailleurs et ne saisissons pas bien l’enjeu de cette alliance nouvelle qui nous est proposée : Dieu avec nous dans le Christ et dans son Église ? Acceptons-nous vraiment d’avoir part à cet heureux avènement ? À cette fête d’amour et de communion ?

Le développement de la parabole étonne par ses rebondissements. Le refus des premiers invités est choquant, mais il permet un  débordement inattendu, une libéralité surprenante. Loin de se décourager, le Roi se tourne vers d’autres pour remplir la salle des noces. La fête devient accessible à tous. Des gens ordinaires, des pauvres, des traînards même. Il me plait de nous imaginer tous ayant part nous aussi à ce rassemblement où les meilleurs se mêlent aux moins bons. 

Mais suffit-il d’être là ?  Il y a cet homme à la fin qui assombrit le tableau jusque là idyllique. Sa présence est dissonante au milieu des convives. Tout de suite on le remarque : « Mon ami, comment es-tu entré ici, sans avoir le vêtement de noce? » L’homme ne sait quoi répondre! Le geste d’exclusion posé à son endroit nous dérange. Pourquoi cet homme n’a-t-il pas son habit? Et puis pourquoi cet habit est-il si important?  Alors que tout le monde semblait bienvenu, voici qu’il y a maintenant des conditions d’accès ? Quelles sont-elles ? Enfin, pourquoi lui ? Serait-ce moi ?

Nous pointons ici le cas de celui ou de celle qui, bien qu’en étant là, se révèle être au dehors. N’avoir pas le vêtement de noce : qu’est-ce à dire?  Si ce n’est que quelque part en soi-même, il y aurait une résistance ou une absence qui empêcherait d’entrer dans la fête. Si l’homme de la parabole n’a rien à dire quand on l’interroge, c’est qu’il est déjà ailleurs. Quelque part en lui-même il est bloqué, fermé, incapable de communier à l’ambiance générale. Il n’est pas entré dans la logique du don de Dieu, qui appelle la reconnaissance, la joie intérieure, le resplendissement d’un cœur tourné vers celui qui l’aime et lui fait grâce. L’habit de noce, pour lui comme pour nous, ne serait-ce pas la conversion véritable, la joie d’être là pour la bonne raison, la foi d’un cœur simple et pauvre, revêtu du Christ Sauveur, éveillé et libre, à son image.

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