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Responsable de la chronique : Jacques Marcotte, o.p.
Éditorial

Bras-de-fer en Espagne

Imprimer Par Anne Saulnier & Jacques Marcotte

 

C’est avec beaucoup d’intérêt que nous avons suivi les événements qui ont lieu en Catalogne. Il faut dire que la situation politique de cette région de l’Espagne qui revendique son indépendance est venue toucher une corde sensible de notre fibre québécoise. N’avons-nous pas tenu deux référendums sur la possible souveraineté du Québec au sein du Canada, l’un en 1980 et l’autre en 1995 ?

Il va sans dire que la question nationale est souvent complexe et délicate. Elle a suscité bien des débats et des tensions au Québec, mais jamais il n’y a eu rupture de dialogue ou parti pris de violence comme cela s’est passé en Catalogne. C’est donc avec stupéfaction et horreur que nous avons vu les images défiler à la télévision, nous montrant les interventions musclées du gouvernement de Madrid pour empêcher les Catalans d’aller aux urnes.

Bien sûr, la situation de la Catalogne n’est pas celle du Québec. Que ce soit sur le plan politique, économique, sociologique, linguistique, elle est totalement différente. Pourtant, comme peuple, nous avons quelques affinités avec cette région de l’Espagne. Comme les Catalans, les Québécois sont fiers de leur identité, de leur culture et de leur langue, de leur religion et de tout ce qui les différencie des autres provinces canadiennes. Longtemps réprimé comme peuple, les Québécois ont appris à redresser l’échine et à faire valoir leur unicité et leur spécificité dans un Canada de plus en en plus pluraliste.

Le matin du 27 octobre, nous apprenions que la Catalogne proclamait son indépendance. Presqu’en même temps, le gouvernement de Madrid, qui ne reconnaît pas la légitimité du référendum tenu par le président catalan Puigdemont, décidait de mettre en vigueur l’article 155 de la constitution espagnole, une mesure exceptionnelle pour rétablir « l’ordre » dans ce coin du pays. L’article 155 prévoit rien de moins que la mise en tutelle de la Catalogne, ainsi que la destitution de son parlement pour le remplacer par des représentants nommés par Madrid en attendant que des élections régionales soient tenues dans un délai maximum de 6 mois.

D’un côté, le président de l’Espagne, Mariano Rajoy, de l’autre, le président catalan, Carles Puigdemont. Deux hommes convaincus de leur opinion, de leur devoir, de la conduite à suivre. Au moment où nous écrivons ces lignes, Barcelone retient son souffle, et le monde aussi devant la possibilité d’une montée des tensions entre les différents partis, même si le président Puigdemont invite la population au calme. Des rassemblements ont lieu et il y a toujours cette possibilité que les manifestations tournent en émeutes et amènent le chaos dans le pays.

Difficile de dire ce qui va maintenant se passer. Car, même si le gouvernement espagnol réussit par la force à rétablir l’ordre en Catalogne, il n’aura rien réglé. La fibre patriotique résiste à la force qui l’attaque. Bien plus, la contrainte et la répression ne peuvent qu’accroître le besoin de la Catalogne d’être reconnue dans l’expression de son autonomie, n’en déplaise à ceux qui croient le contraire. La solution à long terme est à chercher dans un véritable dialogue entre les partis.

Comment régler enfin un problème qui perdure depuis des siècles ? Comment arriver au consensus qui satisfasse les deux partis ? C’est aux Espagnols de trouver le ou les réponses. Mais il est certain qu’une solution durable devra passer par un changement d’attitude de la part du gouvernement central espagnol. Le temps est peut-être venu pour ce gouvernement de modifier sa constitution, de façon à ce qu’il soit possible de satisfaire le désir de liberté des Catalans et de leur donner droit à plus d’autonomie. Chose certaine, l’avenir proche est plutôt sombre pour la Catalogne. La ligne dure qu’a choisie Madrid ne va pas arranger les choses. Il faudra du temps, beaucoup de temps pour rétablir les ponts. Et nous sommes convaincus que même si les faits laissent voir que le gouvernement espagnol a gagné, c’est lui qui est le grand perdant dans cette affaire, puisque la contrainte et la répression ne peuvent jamais réduire au silence ceux qui crient aussi fort pour se faire entendre.

En collaboration,
Anne Saulnier et Jacques Marcotte, op
Québec.

 

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