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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

27e Dimanche du temps ordinaire. Année B.

Imprimer Par François-Dominique Charles

Homme et femme il les créa !

Un jour, des pharisiens abordèrent Jésus et, pour le mettre à l’épreuve, ils lui demandaient : « Est-il permis à un mari de renvoyer sa femme ? »
Jésus dit : « Que vous a prescrit Moïse ? »
Ils lui répondirent : « Moïse a permis de renvoyer sa femme à condition d’établir un acte de répudiation. »
Jésus répliqua : « C’est en raison de votre endurcissement qu’il a formulé cette loi.
Mais, au commencement de la création, il les fit homme et femme.
A cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère,
il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais ils ne font qu’un.
Donc, ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas ! »
De retour à la maison, les disciples l’interrogeaient de nouveau sur cette question.
Il leur répond : « Celui qui renvoie sa femme pour en épouser une autre est coupable d’adultère envers elle.
Si une femme a renvoyé son mari et en épouse un autre, elle est coupable d’adultère. »
On présentait à Jésus des enfants pour les lui faire toucher ; mais les disciples les écartèrent vivement.
Voyant cela, Jésus se fâcha et leur dit : « Laissez les enfants venir à moi. Ne les empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent.
Amen, je vous le dis : celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas. »
Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains.

COMMENTAIRES

Il y a dans le livre de la Genèse deux récits de la création de l’humanité. Dans le premier, il est écrit que Dieu créa l’homme à son image et ressemblance, homme et femme il les créa. Dans ce récit, l’auteur dit que Dieu créa « Adam », l’homme au sens générique, c’est-à-dire toute l’humanité. Au commencement donc, Dieu créa l’humanité à son image et ressemblance, littéralement « mâle et femelle ». Dès l’origine, Dieu a donc créé l’humanité avec la différence sexuelle, afin que l’homme et la femme puissent exprimer à travers leur complémentarité la dimension relationnelle qui est en Dieu. Dans l’évangile, Jésus renvoie ses auditeurs à ce récit du premier chapitre de la Genèse quand il dit : « Mais au commencement de la création, il les créa homme et femme. »

Il y a un deuxième récit de la création de l’homme, au chapitre deuxième de la Genèse, et la liturgie de ce dimanche en offre un extrait dans la première lecture. Dans ce récit dont la rédaction est antérieure au précédent, on lit ceci (les mots hébreux étant entre parenthèses) : « Le Seigneur modela l’homme (adam) de la poussière du sol (adamah). Il souffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme (adam) devint un être vivant. Dieu fit tomber une torpeur sur l’homme (adam) et il s’endormit. Le Seigneur prit une de ses côtes et referma la chair. Le Seigneur fit une femme (ishah) et l’amena à l’homme (adam). Et l’homme (adam) dit : ‘c’est l’os de mes os et la chair de ma chair’. Et il l’appela « femme » (ishah) car elle fut tirée de l’homme (ish). C’est pourquoi l’homme (ish) quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme (ishah) et ils seront une seule chair. »

Ce deuxième récit souligne bien le fait que l’humanité a été tirée de la terre : l’Adam a été pétri de la poussière du sol (adamah). Et, pour que l’homme soit vivant, il faut qu’il reçoive le souffle vital de Dieu. Ce qui est fortement affirmé ici, c’est que l’homme n’a pas été créé pour vivre seul. Non seulement il est « adam » issu de la terre (adamah), mais il est aussi « ish », on pourrait dire homme au sens de mari : il est appelé à vivre avec une « ishah », une femme au sens d’épouse. L’usage des mots « ish » et « ishah » évoque la réalité conjugale. Dès le commencement, Dieu a donc créé l’humanité en donnant la femme à l’homme et l’homme à la femme pour qu’ils vivent unis l’un à l’autre, ne faisant qu’une seule chair ! Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus renvoie aussi à ce deuxième récit de la création de l’homme en citant sa conclusion : « L’homme quittera son père et sa mère et les deux ne feront qu’une seule chair. »

En citant les deux récits de la Genèse, l’intention de Jésus semble claire. Ces deux récits affirment qu’au commencement, Dieu a créé l’homme et la femme pour qu’ils vivent unis l’un à l’autre et expriment, à travers cette union conjugale, quelque chose du mystère de Dieu lui-même, ayant été créés inséparablement à son « image et ressemblance » ! Si Jésus rappelle cela, c’est parce que les Pharisiens lui ont posé un problème bien sensible à l’époque et qui le reste aujourd’hui. Les connaisseurs de la Bible que sont les Pharisiens lui demandent s’il est permis à un mari de renvoyer sa femme. Après avoir évoqué la loi donnée par Moïse et qui permet à l’homme de répudier sa femme (cf. Dt 24,1), il se réfère aux deux récits de la Genèse. Ces récits renvoient aux origines. La Loi a été donnée bien plus tard au Sinaï. Si la loi a permis, c’est à cause de l’endurcissement du cœur humain, explique Jésus. Au commencement, Dieu avait un autre projet ! « Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni. » Aux disciples, qui sont autant surpris que les Pharisiens devant cette réponse, Jésus précise que l’homme, qui renvoie sa femme pour en épouser une autre, est « coupable d’adultère » et de même une femme, qui a renvoyé son mari et en épouse un autre, est aussi « coupable d’adultère » !

Aujourd’hui, cet enseignement de Jésus dérange. D’autant plus que c’est l’enseignement qui est à la source de la doctrine de l’indissolubilité du mariage dans notre Église catholique où l’union entre l’homme et la femme est un engagement sacramentel considéré comme irréversible. C’est ensemble, unis, que mari et sa femme sont image et ressemblance de Dieu. Cette union est de l’ordre de la création. Durant l’histoire sainte, bien avant Jésus, la polygamie avait été une pratique courante. Qu’on se souvienne des patriarches comme Abraham, Jacob, Joseph ou du roi David. Au temps de Jésus cette pratique n’était plus admise dans le judaïsme. Mais se posait toujours la question du divorce ! Jésus, dans l’évangile de Marc est formel : le divorce n’est pas conforme au plan de Dieu !

Dans nos sociétés où les divorces sont nombreux, il n’est pas facile de recevoir un tel enseignement de Jésus. L’Église catholique s’y réfère pour fonder sa position concernant le divorce et le remariage des divorcés. Il convient toujours de demander l’aide de Dieu, surtout quand les situations conjugales sont très douloureuses et insolubles. La prière d’ouverture de la messe de ce dimanche nous apprend à prier en gardant une grande confiance en Dieu, miséricordieux et sauveur : « Dans ton amour inépuisable, Dieu éternel et tout-puissant, tu combles ceux qui t’implorent bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs. Répands sur nous ta miséricorde en délivrant notre conscience de ce qui l’inquiète et en donnant plus que nous n’osons demander. »

Frère François-Dominique CHARLES, o.p.

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