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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

11e Dimanche du temps ordinaire. Année B.

Imprimer Par François-Dominique Charles

Jésus parlait en paraboles pour être compris de tous

Parlant à la foule en paraboles, Jésus disait : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette le grain dans son champ :
nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment.
D’elle-même, la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, enfin du blé plein l’épi.
Et dès que le grain le permet, on y met la faucille, car c’est le temps de la moisson. »
Il disait encore : « A quoi pouvons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole allons-nous le représenter ?
Il est comme une graine de moutarde : quand on la sème en terre, elle est la plus petite de toutes les semences du monde.
Mais quand on l’a semée, elle grandit et dépasse toutes les plantes potagères ; et elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. »
Par de nombreuses paraboles semblables, Jésus leur annonçait la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de la comprendre.
Il ne leur disait rien sans employer de paraboles, mais en particulier, il expliquait tout à ses disciples.

COMMENTAIRE

Jésus parlait en paraboles. Pourquoi ces histoires au langage codé ? Pourquoi ne dit-il pas les choses clairement ? Il parle en paraboles comme d’autres à son époque afin que ses auditeurs ne restent pas passifs en écoutant ses enseignements ; chacun doit fournir un effort de compréhension et d’interprétation pour comprendre. C’est une pédagogie de Jésus pour être entendu de tous : utiliser des petites histoires concrètes qui font référence à la vie quotidienne et dont la mise en scène est extrêmement simple pour faire accéder à des vérités profondes. Pour comprendre le message de Jésus, ouvrons donc nos oreilles et soyons attentifs aux plus petits détails de ses paraboles.

Un homme jette de la semence en terre. C’est une scène qui devient de plus étrangère aux gens que nous sommes, sauf ceux qui ont la chance d’avoir encore un petit jardin. Il nous est cependant assez facile d’imaginer cette scène toute simple : le semeur sème de la semence, et quoi qu’il fasse, la semence germera toute seule et grandira par elle-même. Après un temps de mûrissement et de croissance invisible dans la terre, pendant lequel la semence doit passer par différents stades, le semeur se transforme en moissonneur et il récolte.

Le grand intérêt des paraboles réside dans la multiplicité étonnante des interprétations que l’on peut en faire. Ici, par exemple, on peut se demander quel est ce semeur-moissonneur ? Il peut s’agir de Jésus, venu pour ensemencer la terre de sa Parole de vie. On peut alors découvrir l’extraordinaire puissance de croissance qui réside dans la semence elle-même. La parole que Jésus sème est puissante dans ses effets chez ceux qui l’accueillent dans leur terre. Quand cette semence trouve quelqu’un pour l’accueillir, elle ne reste jamais passive et elle porte beaucoup de fruits dans la vie du disciple. Comment accueillons-nous la Parole de vie de Jésus ? Sommes-nous un terrain propice à sa croissance ?

Mais le semeur peut aussi être le disciple qui est envoyé semer partout la Bonne Nouvelle de Jésus. Qu’il dorme ou qu’il soit éveillé, la semence de la Parole du Christ qu’il a semée en la proclamant agit de manière cachée, mais avec une fécondité certaine. La parabole met alors en évidence, non seulement l’extraordinaire puissance de vie la Parole de Jésus, mais aussi l’indispensable travail d’annonce des disciples qui apparaissent comme des semeurs : la petite semence que Jésus a remise dans les mains des disciples ne pourra produire du fruit que dans la mesure où ceux-ci la sèmeront sans jamais désespérer parce qu’ils n’en voient pas les effets. Les disciples de Jésus doivent accepter de collaborer avec le temps. L’histoire de la semence devient pour nous une belle parabole de l’espérance chrétienne !

Cette semence pourrait être encore une image de la vie même de Jésus. Mise en terre, elle est comme morte en apparence. C’est avec la certitude qu’elle deviendra des épis, qui seront porteurs de semence au centuple, que le semeur sème dans la perspective de la récolte. La mort de Jésus est le passage obligé pour que la Bonne Nouvelle porte du fruit et pour que sa vie donnée soit féconde. C’est ce que Jésus dit dans l’évangile de saint Jean, peu avant sa passion : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits » (Jn 12,24).

Ainsi donc, Jésus est à la fois semence et semeur, et le disciple de même. Il en est ainsi du Royaume de Dieu où le disciple est appelé à devenir comme le Maître, semence de Bonne Nouvelle et semeur de la Parole. Comme semeur, il est le dépositaire d’une Parole divine dont les effets lui échappent. Comme semence, il est appelé à devenir lui-même, à travers toute sa vie, parole d’espérance semée dans la terre du monde. Nous sommes destinés, nous aussi, à semer partout la Bonne Nouvelle du Christ, dans la certitude de sa puissante fécondité au cœur du monde, même au cœur des intolérables déserts de mort et de souffrance où l’espérance est en agonie, comme en Syrie en ces jours douloureux. Mais nous sommes aussi appelés, comme cette semence, à nous dessaisir de notre propre vie pour qu’elle soit porteuse de vie.

La deuxième parabole nous décrit la croissance paradoxale d’une toute petite semence qui devient la plus grande de toutes les plantes du jardin où les oiseaux du ciel viennent faire leurs nids. Il est possible de l’interpréter aussi de plusieurs manières : je vous invite à essayer vous-mêmes. Arrêtons-nous simplement sur le paradoxe du récit : la plus petite des graines devient la plus grande des plantes.

La Parole de Jésus, ou la personne de Jésus qui est Parole vivante et agissante de Dieu au milieu de nous, est comme une toute petite semence presque imperceptible aux yeux des non initiés. Pour la remarquer il faut la connaître : elle n’est visible qu’avec les yeux de la foi. Voilà une vérité fondamentale de l’Évangile : ce qui compte aux yeux de Dieu est insignifiant aux yeux des hommes ! C’est dans la mort dérisoire d’un crucifié que se jouait mystérieusement la vie des multitudes. C’est à l’ombre des branches de la Croix du Christ, plantée dans le jardin du monde, que les hommes et les femmes de tous les peuples peuvent trouver une place. Jésus n’est pas venu avec puissance parmi les hommes ; le croyant reconnaît en lui l’extraordinaire puissance de Dieu qui se manifeste dans la discrétion. Seul le disciple peut reconnaître dans l’espérance, l’action secrète de Dieu au cœur du monde et s’en faire le témoin. Il sait la fécondité cachée du mystère du Christ et que c’est aussi dans sa propre faiblesse que peut se manifester paradoxalement la puissance d’un Dieu qui sauve. La vie du disciple, comme celle du Maître, s’inscrit dans cette vérité paradoxale.

Nous avons entrevu la richesse du langage parabolique de Jésus. C’est est un excellent « pédagogue » car ses histoires sont faciles à retenir, même par les enfants qui savent en mémoriser tous les détails souvent mieux que les adultes. Dans le langage extrêmement simple des enfants, des petits et des pauvres, elles expriment la richesse des multiples facettes du mystère chrétien, sans jamais l’enfermer ou l’épuiser. Que l’Esprit du Seigneur nous ouvre à l’intelligence de ces histoires que Jésus a racontées à ceux qui venaient à lui sur les routes de Galilée et de Judée et qui gardent une étonnante actualité pour notre vie chrétienne. N’hésitons surtout pas à les raconter à nos enfants qui sauront probablement nous aider à en percer les secrets.

Frère François-Dominique CHARLES, o.p.

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