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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

3e Dimanche de Carême. Année B.

Imprimer Par François-Dominique Charles

Vivre le Carême comme un pèlerinage !

Comme la Pâque des Juifs approchait, Jésus monta à Jérusalem.
Il trouva installés dans le Temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs.
Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs bœufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs,
et dit aux marchands de colombes : « Enlevez cela d’ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. »
Ses disciples se rappelèrent cette parole de l’Écriture : L’amour de ta maison fera mon tourment.
Les Juifs l’interpellèrent : « Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là ? »
Jésus leur répondit : « Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai. »
Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple, et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
Mais le Temple dont il parlait, c’était son corps.
Aussi, quand il ressuscita d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ; ils crurent aux prophéties de l’Écriture et à la parole que Jésus avait dite.
Pendant qu’il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque, beaucoup crurent en lui, à la vue des signes qu’il accomplissait.
Mais Jésus n’avait pas confiance en eux, parce qu’il les connaissait tous
et n’avait besoin d’aucun témoignage sur l’homme : il connaissait par lui-même ce qu’il y a dans l’homme.

Commentaire

Aujourd’hui comme autrefois, beaucoup de gens font des pèlerinages ; le plus célèbre est certainement celui que l’on fait à pied vers Compostelle, en Espagne, où la tradition situe le tombeau de l’apôtre saint Jacques. Tout pèlerinage nous rappelle que la vie chrétienne est une route vers un but. Ce n’est pas toujours facile de marcher, surtout quand il fait très chaud. Mais ce qui compte c’est d’endurer les fatigues sans abandonner pour atteindre le but. Pour y arriver, il est très important de se soutenir les uns les autres, afin que personne ne se décourage et abandonne en cours de route.

Il en va de même de la route de Jésus que nous avons décidé de prendre avec lui. La route chrétienne est une route avec Jésus et aussi au service de Jésus. Il m’a appelé à sa suite, et j’ai répondu « oui, je veux te suivre ». Les textes de ce dimanche nous rappellent, si nous l’avions oublié, que ce n’est pas facile d’être chrétien, d’être disciple de Jésus, dans les sociétés d’aujourd’hui. C’est un choix qui nous demande sans cesse de rompre avec la manière de vivre de tous. Car la vie chrétienne apparaît souvent comme à contre sens ou à contre courant. Vouloir suivre Jésus nous amène à faire des ruptures avec ce que saint Jean appelle « le monde » : « Ils ne sont pas du monde comme moi je ne suis pas du monde » (Jn 17,14.16). Jésus ne dira-t-il pas à Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde ! » (Jn 18,36) ?

Dans la première alliance, Dieu donne à Moïse les dix commandements pour aider le peuple à bien vivre cette alliance. Ces dix paroles de Dieu sont déjà très exigeantes à pratiquer. Elles nous sont rappelées dans la première lecture.

« Tu n’auras pas d’autres dieux que moi ! » Nous n’avons qu’un seul Dieu. Il n’est pas question de nous tourner vers tous les faux dieux de nos sociétés ; il n’est pas question de nous laisser dominer par l’attrait de l’argent, du pouvoir, des faux besoins provoqués par les campagnes de publicité de toute sorte. Notre choix de croyant est de ne faire confiance qu’à Dieu seul.

« Tu ne commettras pas d’adultère ! » Voilà un commandement qui nous demande de rompre avec le monde ambiant pour vivre dans la fidélité à nos proches et renoncer à nous enfoncer dans le mensonge.

« Tu ne commettras pas de vol ! » Faire le choix de Dieu nous demande de rompre avec tous les comportements de vol et de corruption qui existent à l’état endémique à tous les niveaux de nos sociétés et qui ne font que profiter à ceux qui sont les plus riches.

« Tu ne porteras aucun faux témoignage contre ton prochain ! » Voilà encore un commandement qui nous demande de rompre avec le monde dans lequel nous sommes plongés. Vivre dans la vérité sans chercher à tromper ou mentir. Nous aspirons à être des hommes et des femmes dont la parole est vraie, à qui on peut faire confiance, simplement parce que nous voulons être des amis de Dieu.

Jésus chasse les marchands et les changeurs du Temple. Il fait cela avec une certaine violence puisqu’il utilise un fouet : « Enlevez cela d’ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ! » Le temple dont il est question ici, ce n’est pas le temple de pierre de Jérusalem, mais Jésus lui-même. Il ne s’agit plus d’adorer Dieu dans un édifice de pierres. C’est Jésus qui est au milieu du monde la présence sainte de Dieu. Il est le vrai Temple de Dieu. « Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1,14). Comme disciples de Jésus, il nous faut donc renoncer à faire du commerce avec Dieu dans nos cœurs. « Tous ceux-là, dit Maître Eckhart, sont des marchands qui accomplissent des jeûnes, des veilles, des prières, et toutes sortes de bonnes œuvres, mais ne le font que pour obtenir en échange que Dieu fasse pour eux ce qui leur plaît. »

Faire le choix de Jésus consiste à purifier notre pratique religieuse, pour adorer Dieu « en Esprit et en vérité » (Jn 4,23-24). Le secret pour réussir consiste à accueillir en nous le Saint-Esprit ; c’est lui qui est l’agent de toute vraie prière : « l’Esprit, écrit saint Paul, vient en aide à notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut, mais l’Esprit lui-même intercède pour nous en gémissements inexprimables » (Rm 8,26). Que notre cœur ne soit donc pas une maison de trafic où l’on ne prie Dieu que par intérêt, mais qu’il soit un « temple de l’Esprit Saint » (1Co 3,16 ; 6,19).

Il est certes bien difficile d’être chrétien dans toutes les dimensions de notre vie et au plus secret de notre cœur. C’est effectivement impossible sans le secours de Dieu : on parle de la grâce qui est l’œuvre de l’Esprit Saint en nous. Voilà pourquoi Jésus a soufflé sur ses amis l’Esprit de sainteté. Il est notre force intérieure car il nous aide, au plus profond de nous-mêmes, à vivre en pratiquant les commandements, en aimant nos frères et en priant en vérité. Demandons au Seigneur de nous donner durant ce carême cette force intérieure de l’Esprit pour que nous soyons plus fidèles à son évangile au cours du long pèlerinage de notre vie dont les quarante jours de carême ne sont qu’un symbole. Tous nos efforts n’ont de sens que si nous les faisons avec l’assistance intérieure de l’Esprit afin que nous tenions jusqu’au bout du chemin où nous célèbrerons Pâque avec le Christ au moment de notre propre mort.

Frère François-Dominique CHARLES, o.p.

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