« Moi Jean, j’ai vu une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau… Ils venaient de la grande épreuve. » (Apoc. 7,9). En méditant sur ce texte récemment, je me suis rappelé une expérience vécue peu de jours auparavant. J’étais en amont de Québec, sur les bords du fleuve, quand je me suis retrouvé au beau milieu d’un immense voilier d’outardes, faisant escale aux abords du majestueux cours d’eau. C’est présentement la saison de leur migration vers le nord. Les grands oiseaux prenaient autour de moi leur envol et remplissaient littéralement le ciel de leurs cris, de leurs figures imposantes. Comme un ballet gigantesque, à perte de vue, depuis Cap-Santé jusqu’à Deschambault, et jusque profond dans Lotbinière en face, ils formait des ensembles qui avaient l’air de nuages emportés par le vent.
Ce qui m’étonne le plus dans leurs figures changeantes, c’est la belle harmonie avec laquelle les oiseaux évoluent. Pas de heurt ni d’accident. Tout le monde garde ses distances et une belle proximité. Ils ont tous la capacité de s’adapter. Et je me demandais par quel prodigieux instinct ces dizaines de milliers d’oiseaux arrivent à s’ajuster pour aller si parfaitement ensemble.
L’image des migrations suggère une présence immanente qui nous inspire et nous guide et nous donne d’aller dans la confiance avec le Christ. Elle nous parle du mystère de nos vies croyantes aspirées par le Christ, animées par l’Esprit, entraînées par Dieu lui-même vers le monde nouveau. « Mes brebis écoutent ma voix; dit Jésus, moi je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, personne ne les arrachera de ma main. » (Jean 10, 27-28). Nous vivons avec le Christ, non pas une agrégation forcées, mais un régime privilégié de protection. Le Christ pasteur, prend soin de nous.
À l’automne 92, j’étais en Israël avec un groupe de pèlerins. Cet après-midi-là, nous marchions dans la vieille ville de Jérusalem, près de la Porte de Damas. Les rues y sont étroites. C’est le secteur palestinien. Voilà qu’un jeune berger s’amène avec son petit troupeau. Les brebis allaient en rang serré. Le garçon était nerveux. Une dame de notre groupe, tout innocemment, a voulu flatter une brebis au passage. Le geste se voulait caressant. Le berger ne l’a pas vu ainsi. Avec son bâton, il a touché rudement l’étrangère pour l’éloigner.
Cette anecdote nous dit bien l’ardeur du berger à réagir, sa volonté de protéger les brebis. Le Seigneur veille avec un soin jaloux sur nous. Personne ne nous arrachera de sa main. Il n’a de cesse que nous soyons bien avec lui en communion les uns avec les autres.
Jacques Marcotte OP
St-Dominique de Québec