Toute la semaine qui vient de s’écouler, les médias nous ont rappelé un triste anniversaire. Il y a soixante ans, l’humanité a découvert l’horreur des camps de concentration nazis, mis en place au cours de la seconde guerre mondiale. Des millions d’hommes, de femmes, d’enfants ont été parqués dans des enclos comme de vulgaires animaux. On leur a fait subir des sévices que le moindre humain sensé considère intolérables sur des bêtes, à plus forte raison sur des humains. Tortures, massacres et assassinats massifs dans le but délibéré de faire disparaître tout un peuple.
Le coeur humain peut réaliser de grandes choses. Il peut aimer jusqu’au don de soi. C’est peut-être là la plus grande merveille qu’il peut accomplir. Mais il peut aussi descendre bien bas dans la méchanceté. Il peut haïr de la plus grande haine qui puisse exister. L’être humain peut aller jusqu’à l’extrême dans le bien comme dans le mal. Devenir aussi doux qu’un ange ou aussi violent qu’une bête féroce.
Pourquoi l’être humain s’engage-t-il sur la pente du mal et de la haine? Pourquoi lui arrive-t-il de mépriser d’autres semblables? A-t-il peur des autres? La haine est-elle un mécanisme de protection ou de défense parce qu’il se sent menacé? Est-ce la jalousie ou l’envie qui le conduit à avilir les autres? Est-ce le désir d’avoir le contrôle du monde ou, du moins, de la portion d’humanité qui l’entoure? Est-ce le plaisir de faire souffrir? Pourquoi la haine? Pourquoi la violence? Pourquoi le mépris de son prochain?
Beaucoup de questions surgissent dans l’esprit depuis toujours en face du mal, surtout du mal que les uns font subir à d’autres. Beaucoup de questions, trop peu de réponses, trop peu de réponses satisfaisantes. Le mal en lui-même est un mystère qui garde bien son secret. Quand il est dirigé contre les autres, il se fait encore plus mystérieux. La planète est si petite: pourquoi sommes-nous incapables de nous accepter les uns et les autres dans le partage de cet espace du cosmos?
Peut-être avons-nous perdu – si jamais nous l’avons eu – le sens du respect de l’autre, du respect de sa vie, du respect de sa personne. Un chant liturgique proclame: «Tout homme est une histoire sacrée!» Une histoire, et une histoire sacrée! C’est un être qui respire, qui soupire, qui retient son souffle. Mais ce jeu de la respiration n’est pas simple mécanisme biologique. Il est l’expression d’une passion, d’un goût de vivre, d’un désir de bonheur. Il traduit les aspirations qui habitent le coeur. Il participe à l’émotion que font naître les pensées qui viennent à l’esprit. C’est Blaise Pascal qui disait: «L’homme est un roseau, mais c’est un roseau pensant».
Devant l’être humain, un psaume ne retient pas son émerveillement: «À voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’Adam que tu en prennes souci? À peine le fis-tu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur.» (Psaume 8, 4-6)
L’être humain est grand. C’est un géant dans l’univers, même à côté des planètes les plus spectaculaires, même à côté des étoiles les plus scintillantes. L’être humain est un géant qui mérite respect. Pas le respect qui fait garder la distance, mais le respect qui accepte inconditionnellement, le respect qui rapproche, qui admire, qui contemple. Bref, le respect de l’amour.