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L’or, l’encens et la myrrhe

Imprimer Par Anselm Grün

Anselm Grün, moine bénédictin, est abbé du monastère de Münsterschwarzach en Allemagne. Docteur en théologie et psychologue, il est accompagnateur spirituel. Ses livres connaissent un grand succès en Europe. Plusieurs ont été traduits en français.

Les Mages ouvrent leurs coffrets et offrent à l’Enfant de l’or, de l’en­cens et de la myrrhe. Depuis toujours on a interprété ces trois dons. Irénée de Lyon, au IIe siècle, voit signifiées dans l’or la dignité royale de l’enfant, dans l’en­cens sa divinité et dans la myrrhe sa mort sur la croix. Pour Karl Rahner, l’or évoque notre amour, l’encens notre nostalgie et la myrrhe nos souffrances; dans ces présents, il ne voit donc pas des images du mystère de l’Enfant divin, mais les signes du don que nous lui faisons de nous-mêmes, des attitudes humaines qui rendent au Dieu fait homme les honneurs qui lui sont dûs. La Légende dorée connaît d’autres interprétations encore. Les Rois ont offert de l’or à cause de la pauvreté de Marie, « de l’encens à cause des mauvaises odeurs de l’étable, de la myrrhe pour fortifier les membres de l’enfant et chasser les vers nuisibles ». On voit encore l’or signifier la divinité, l’encens l’âme pieuse et la myrrhe, qui protège de toute impureté, la pureté du corps. À l’évidence, les Anciens se plaisaient à investir leur imagination dans ces présents des Mages.

L’or a de tout temps fasciné les hommes. Les Anciens parlaient de l’éclat doré des dieux. Pour Clément d’Alexandrie, la sagesse du Christ, incarnation du Logos impérissable, est l’or de la royauté. L’or est purifié par le feu; rien ne doit lui être mêlé. L’or est depuis toujours utilisé dans les cultes; il convient aux dieux. Il ne manifeste pas seulement la nature divine de l’Enfant couché dans la crèche, mais aussi l’éclat de l’or dans notre âme. Nous ne sommes pas en effet de purs et simples êtres terrestres, mais aussi des êtres célestes; notre âme reflète l’éclat doré de la divinité, à laquelle nous avons part, notre visage est illuminé par la majesté de Dieu.

L’encens est utilisé par de nombreuses civilisations pour son agréable parfum. Sa fumée qui monte vers le ciel est l’image des prières que nous adressons à Dieu, du désir qui nous fait chercher un au-delà du quotidien; ce désir monte vers le ciel tout comme la fumée de l’en­cens, il en a la légèreté, rien ne peut le retenir sur la terre; l’un et l’autre passent à travers les portes fermées, ouvrent et élargissent nos cœurs. L’encens sent bon, son parfum remplit notre vie d’un goût de mystère et de divinité. Quand j’étais au mont Athos, le parfum tout particulier de l’encens qui s’y brûle m’a fasciné; Les églises y sont remplies de ce parfum, ce qui éveille un sentiment de mystère, l’impression que l’on est chez soi, au pays natal, en sécurité, mais en même temps plein d’un amour nostalgique. Long­temps après qu’elle s’est élevée, la fumée de l’encens laisse dans tout l’espace une odeur bien particulière; je la respire consciemment, et je ressens alors le goût de la divinité. Certaines odeurs font resurgir en moi, dès que je les perçois, des sentiments intenses qui me renvoient au passé. Le parfum du foin évoque mes vacances ; cette expérience du loisir, je ne la fais pas dans ma tête seule, mais dans tout mon corps. Il en va de même du parfum de l’encens; il me fait respirer la mystérieuse présence de Dieu, je la saisis par mon corps tout entier.

Pour les Anciens, la myrrhe est une plante du paradis; elle évoque l’état originel auquel nous aspirons tous. Mais la myrrhe, c’est aussi une plante médicinale, un baume pour toutes nos blessures; en offrant à Dieu la myrrhe, c’est elles que nous lui présentons : ce que nous avons de plus précieux, les nombreux stigmates que nous a laissés notre vie. Ces blessures ont ouvert notre cœur; elles nous ont obligés à prendre une distance en face des richesses extérieures. Ce que nous avons de plus précieux, c’est un cœur capable d’amour. Or nos blessures nous ont mis en contact avec notre cœur; c’est lui, blessé, brisé, que nous offrons à l’Enfant divin, assurés qu’il va le guérir, le métamorphoser. Quand nous lui présentons notre vie blessée, abîmée, nous pouvons avoir l’impression que tout est en ordre; nous n’avons plus de ressentiment, nous nous abandonnons, tels quels, à l’amour lumineux qui émane de l’Enfant. Alors, en dépit de toutes nos misères intérieures et extérieures, nous sommes au paradis.

Cherche, toi qui me lis, ce que dans ta situation d’aujourd’hui tu peux offrir, et présente-le à l’Enfant divin; laisse-toi guider par l’image qui est pour toi la plus parlante. Elle te conduira vers lui, elle te permettra de te prosterner devant Celui qui te donne l’impression d’être arrivé au but, devant qui tu peux t’oublier toi-même, cesser de tourner en rond dans ton Moi. Si tu y parviens, alors tu seras entièrement ce que tu es dans ta vérité, tu seras vraiment libre.

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