C’est l’Halloween. À Montréal, on étale la fête sur plusieurs jours. Ailleurs, on France par exemple, on résiste, du moins du côté des Églises. On perçoit, dans cette fantaisie clownesque, une négation de la fête du lendemain, la fête de la Toussaint.
Il est vrai que l’Halloween met en scène la mort sur son côté grotesque. On la parodie, on la ridiculise. On joue avec la peur. On étale la laideur. On caricature l’existence humaine sur son aspect désagréable et même désespérant. Peut-être pour en rire. Peut- être pour s’en exorciser.
Mais le Christ, dans sa résurrection d’entre les morts, ne nous invite-t-il pas à reconnaître nos masques et nos costumes? Ne nous invite-t-il pas à faire face à la dramatique de nos vies et à son côté tragique? Ne sommes-nous pas interpellés par la résurrection du Seigneur à reconsidérer la mort, à la voir moins comme l’échec de notre existence que comme un lieu que Dieu féconde de toute sa miséricorde?
Dans son face-à-face avec le Christ, le publicain Zachée a été acculé au pied du mur. Il arrive, affublé de son costume de collecteur d’impôts, caché derrière le masque de ses intérêts, Il porte également les masques que les autres lui mettent, masques de préjugés et d’évaluations, masques qui reflètent bien la vérité ou qui la déforment, peu importe. Devant le Seigneur, il est forcé à voir l’artificiel de son existence. Il est contraint de quitter masques et costumes pour se montrer dans toute sa nudité.
L’action du Christ, dans la vie de Zachée comme dans chacune des nôtres, est avant tout une action libératrice. Nous sommes renvoyés à notre réalité originelle. Nous sommes renvoyés à notre vrai nous-même, à notre beauté des origines. Nous ne sommes pas faits pour nous cacher derrière les masques que la vie nous impose. Nous sommes faits pour vivre à visage découvert, dans la transparence.
Nous sommes faits aussi pour nous rencontrer les uns les autres et pour nous reconnaître mutuellement avec nos pauvretés et nos richesses, en consentant profondément à exposer notre faiblesse comme la condition première pour aimer sans nous imposer. Les masques que nous portons dégagent une puissance qui nous empêche d’aimer vraiment. L’amour n’est vrai que lorsque nous désarmons devant l’autre, que lorsque nous nous risquons à visage découvert.
Je n’ai rien contre l’Halloween, à la condition que nous n’en fassions pas autre chose qu’un simple jeu, à la condition que nous acceptions d’en rire et surtout à la condition que nous résistions à la tentation de nous enfermer dans cet état comme si nous n’étions pas autre chose. La résurrection du Christ d’entre les morts nous proclame que nous sommes appelés à plus beau, à plus vrai. Nous sommes appelés à suivre le Christ jusqu’à épouser l’image que Dieu a imprimé de lui-même dans chacune de nos existences.