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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

Christ Roi. Année B.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Vérité

C’était le jour de la Préparation ; pour éviter que les corps ne restent sur la croix durant le sabbat, – car le sabbat était un jour de grande solennité, – les Juifs demandèrent à Pilate qu’on leur brisât les jambes et qu’on enlevât les corps. Les soldats vinrent donc et brisèrent les jambes au premier, puis au second de ceux qui avaient été crucifiés avec lui. Arrivés à Jésus, ils le trouvèrent mort ; ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais l’un des soldats, de sa lance, lui perça le côté et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau. Celui qui a vu en rend témoignage, – un authentique témoignage, et celui-là sait qu’il dit vrai, – pour que vous aussi vous croyiez. Car cela est arrivé pour s’accomplit l’Écriture : On ne lui brisera pas un os. Ailleurs l’Écriture dit encore : Ils regarderont celui qu’ils ont transpercé.

Commentaire :

De beaux messieurs, soucieux de ne point se souiller afin de pouvoir manger la Pâque, osent une démarche à Pilate pour lui demander d’enlever les corps des crucifiés afin qu’ils ne restent en croix durant le sabbat. Règle de pureté rituelle. Cette dernière des sept scènes de la passion selon saint Jean clôt le thème qui court tout au long de son récit : la royauté de Jésus. Chacune des scènes est délimitée par les entrées et sorties du pitoyable procurateur romain, indécis quant à l’innocence de Jésus finalement accusé de vouloir se faire roi. Le procès se termine par la crucifixion de Jésus. Une dernière fois, Pilate lance en quelque sorte la pierre aux Juifs par une inscription placé en haut de la croix : « Jésus Roi de Juifs «. Pour hâter la mort des suppliciés, les soldats avaient brisé leurs jambes et percé d’un coup de lance le côté de Jésus.

Est-ce ainsi que tout se termine ou que tout commence ? Jésus avait affirmé : « Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi » (Jn. 12 : 32). Ce vendredi saint, ils n’étaient que quatre au pied de la croix : Marie, mère de Jésus, sa sœur, Marie-Madeleine et l’apôtre Jean. Ajoutons à cette « foule » le centurion qui confessa : « Cet homme était vraiment le Fils de Dieu ! ». Deux mille ans plus tard, le rêve est-il devenu réalité ? Le procès ne s’est-il pas prolongé outre temps, outre frontières ? Jésus avait déclaré devant Pilate : « Ma royauté n’est pas de ce monde » ; il ajouta : « Tu le dis, je suis roi et je suis né et ne suis venu dans le monde que pour rendre témoignage à la vérité ». D’où la grande question : « Qu’est-ce que la vérité ? ».

Cette page de l’évangile de Jean jette plein d’ombres sur l’action royale du Christ en ce monde. Alors que les nations païennes en la personne du centurion reconnaissent la valeur incommensurable du témoignage de Jésus à la vérité, nous ne cessons nous, sinon de rompre ses jambes comme aux autres suppliciés, de darder son cœur d’un coup de lance. « L’Esprit de vérité, le monde est incapable de l’accueillir parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas » (Jn.14 : 17). « Qu’est-ce que la vérité ? » avait demandé Pilate. La vérité, sa vérité à laquelle il est venu rendre témoignage, c’est l’amour : l’amour du Père manifesté en son Fils livré non pour nous condamner, mais pour nous sauver (Jn 4 ).

« Je pense qu’il y a un lien profond entre la vérité et l’amour, écrit Timothy Radclife, ex-maître de l’ordre des Dominicains. Aimer quelqu’un signifie essayer de comprendre qui il est véritablement. Et grandir en intelligence implique grandir en amour… La vérité, c’est aussi la possibilité d’une communion entre des personnes séparées. Lorsque je suis en désaccord avec quelqu’un, chercher à surmonter notre différent signifie rechercher une vérité plus grande, plus grande que ma petite vérité et plus grande que la sienne. La vérité signifie qu’il y a quelque chose au-delà de notre incompréhension, que nous ne sommes pas seulement comme des bateaux qui se croisent dans la nuit. La recherche de la réconciliation est toujours une recherche de vérité… La vérité est enfin intimement liée à la dignité humaine. Nous sommes faits pour la vérité, nous la recherchons instinctivement, même lorsque nous la nions. Nous avons besoin de vérité ». (« Je vous appelle amis » éd. du Cerf.)

En somme, c’est en sa mort sur la croix, consommé par le coup de lance, que Jésus gagne sa cause : « C’est maintenant le jugement de ce monde, maintenant que le prince de ce monde va être jeté bas » (Jn 12 : 31) Sur la croix apparaît la véritable royauté du Christ : l’amour. Ainsi se définit-il en pleine lumière comme la vérité malgré les ombres du vendredi saint qui recouvre toute la terre (14 :6)

Vivre la vérité, chercher la vérité, proclamer la vérité, quel projet pour nous, disciples du Christ, mais aussi quelle espérance portée en Église : « Les portes de l’Enfer ne prévaudront point contre elle ».

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