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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

2e Dimanche de Pâques. Année B.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Voir ou croire

Thomas, l’un des Douze, appelé Didyme, n’était pas avec eux , quand vint Jésus. Les disciples lui dirent : « Nous avons vu le Seigneur ! » Il leur répondit : « Si je ne vois à ses mains la marque des clous, si je ne mets le doigt dans la marque des clous et la main dans son côté, je ne croirai pas. » Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient à nouveau dans la maison et Thomas avec eux. Jésus vint, toutes portes closes, et se tint au milieu d’eux : « Paix soit avec vous ! » dit-il. Puis il dit à Thomas : « Porte ton doigt ici : voici mes mains ; avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne sois plus incrédule, mais croyant. » Thomas lui répondit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus lui dit : « Parce que tu me vois, tu crois. Heureux ceux qui croiront sans voir. ».

Commentaire :

Rien dans l’intelligence si cela ne vient des sens », enseignait saint Thomas d’Aquin, docteur de l’Église et théologien dominicain du 15e siècle. Quel que spirituel qu’il soit, l’auteur du 4e évangile, saint Jean suppose et exige également l’expérience sensible pour croire, des témoins oculaires. C’est ainsi qu’il pouvait écrire dans sa première lettre : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous nous annonçons cette vie éternelle. » (I Jn. 1 : 1-2) Tentons de scruter en profondeur la source et le sens de l’émerveillement de Thomas.

HEUREUX …

Où trouver ce bonheur : dans les sens ou dans la confiance ? Dans son évangile, l’apôtre citant le Christ, écrivait : « Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite. » (Jn. 15 : 11) Pour Jean, le Jésus de Nazareth précède le Christ de la foi, le voir et le toucher mène à croire en lui. Rappelons ici quelques brefs passages de son évangile : « Nul n’a jamais VU Dieu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, lui l’a fait connaître. » (Jn.1 : 18) « À son arrivée en Galilée, les Galiléens l’accueillirent ; ils avaient VU tout ce qu’il avait fait à Jérusalem lors de la fête. » ( 4 : 45) « À la VUE des signes qu’il opérait sur les malades, une grande foule suivait Jésus de l’autre côté de la mer de Galilée. » (6 : 2) « .. Qui croit en moi n’aura jamais soif. Mais je vous l’ai dit : vous me VOYEZ et vous ne croyez pas. » (Jn.6 : 37) « Rencontrant l’aveugle-né, Jésus lui dit : Crois-tu au Fils de l’homme ? L’aveugle répondit : Et qui est-il Seigneur pour que je croie en lui ? Jésus lui dit : Tu le VOIS, c’est lui qui te parle. » (Jn.9 : 37) « Je suis le chemin la vérité et la vie. Nul ne va au Père que par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Dès maintenant vous le connaissez et vous l’avez VU. » (14 : 7) Et Philippe de répliquer : « Seigneur montre-nous le Père et cela nous suffit. – Voilà si longtemps que je suis avec vous, lui dit Jésus et tu ne me connais pas Philippe ? Qui m’a VU a vu le Père. Comment peux-tu dire montre-nous le Père. » (14 : 9) Derniers passages pour conclure, épisodes de la résurrection : Marie de Magdala le reconnut et lui dit en Hébreu : Rabbouni ! Jésus lui dit : « Ne me retiens pas ainsi, car je ne suis pas encore monté vers le Père. » Voyant les bandelettes dans le tombeau vide, le disciple bien-aimé, Jean, VOIT et il croit. Contemplant les plaies du Seigneur ressuscité, les disciples à leur tour croient. Thomas lui-même est invité à voir et à toucher le corps glorifié du Christ avant de s’écrier : Mon Seigneur et mon Dieu.

QUI CROIT …

Suite à ces extraits de l’évangile de Jean concernant l’expérience sensible, prélude à la foi, la réflexion de Jésus à Thomas a de quoi nous rendre perplexe et dérouter : « Bienheureux qui croit sans avoir vu. » Ce récit de l’apparition du Christ ressuscité à Thomas a-t-il valeur historique ou est-il raconté simplement en fonction d’un enseignement de Jean à sa communauté ? Il est indéniable que l’auteur du 4e évangile insiste beaucoup sur le caractère humain du Christ vivant après la résurrection : plaies contemplées, palpées, partage du repas… Le point fort de cet enseignement est sans doute comme l’enseigne l’exégète Bultmann que le Christ ressuscité veut reprendre et continuer ses relations personnelles avec ses disciples. Cet aspect communautaire de l’enseignement de Jean est majeur : tenter de faire la preuve d’un Christ personnel reprenant ses relations avec les personnes humaines membres de la communauté. Tels étaient sûrement les sentiments ainsi que les convictions de foi qui ont marqué l’Église primitive.

SANS VOIR…

L’évangile de Jean présente un lien caractéristique entre le Christ historique et celui de la prière de foi. Par l’écriture de Jean, l’Église nous invite à refaire le chemin qui mène à la foi : de l’audition de la Parole et de la vision du Christ à la confession de foi. Lorsque nous connaissons des moments d’incrédulité, de septicisme, en quête d’évidence et de certitude absolue, l’évangile de ce dimanche nous invite à un perpétuel dépassement de foi en la présence du Christ parmi nous.

Il ne s’agit point de voir ou de croire, mais de voir et de croire.

Parole et vie

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