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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

Pâques. Année B.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Alleluia pour des incroyants

Le premier jour de la semaine, Marie de Magdala se rend de bonne heure au tombeau, alors qu’il fait encore sombre, et elle voit que la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court alors trouver Simon Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et leur dit : « On a enlevé le Seigneur du tombeau et nous ne savons pas où on l’a mis. » Pierre partit donc avec l’autre disciple et ils se rendirent au tombeau. Ils couraient tous deux ensemble. L’autre disciple, plus rapide que Pierre, le distança et arriva le premier au tombeau. Se penchant alors, il voit les bandelettes à terre ainsi que le suaire qui recouvrait sa tête ; ce dernier n’était pas avec les bandelettes, mais roulé dans un endroit à part. Alors entra à son tour l’autre disciple arrivé le premier au tombeau. Il vit et il crut. En effet, ils n’avaient pas encore compris que, d’après l’écriture, Jésus devait ressusciter des morts. Les disciples retournèrent alors chez eux.

Commentaire :

Comment annoncer cette Bonne Nouvelle de Pâques à un auditoire aussi diversifié au plan de la foi. Comment trouver un langage qui rejoigne tous et chacun ? Mission impossible ! N’y aurait-il pas lieu avant tout de reconnaître ces divergences et tenter de dépasser tous ces malentendus pour que l’effort que chacun manifeste en assistant à la Messe de Pâques ne demeure pas vain ou confiné au plan du folklore. Transformer la passivité de l’auditoire en une attitude dynamique et interrogative. Rejoindre ce que l’autre veut entendre dire, ce pourquoi il est ici sans trop l’avouer, et ce qu’il attend de la fête de Pâque. C’est d’ailleurs ainsi que l’évangile s’est écrit, dans une dynamique de questions et de réponse de la part des premières églises : « Frères, que devons-nous faire », demandait-on après la proclamation du Christ ressuscité. L’auditoire pourrait sans doute avoir le goût de crier avec tout son cœur ou simplement de s’exprimer dans les termes même de Marie de Magdala aux disciples « On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons où on l’a mis. » Comme s’il était possible que le Christ demeure au tombeau, sans renaître à cette nouvelle vie qu’il avait tant de fois prêchée et proclamée. Et ces régénérescences de la vie en Jésus, où les trouver ?

Évangile plein d’actualité s’il en est un. Ne serait-il pas plus utile de laisser tomber la répétition de ces grandes vérités de foi pour donner plus de place à des témoins de la résurrection, chrétiens de fraîche date récemment convertis au Christ ressuscité. Fernand Ouellette (« Le danger du divin » ) pourrait être de ce groupe, sans oublier quelques autres non loin de nous. Ce faisant, nous ne ferons que revivre et non répéter l’annonce de la Résurrection par les témoins du tombeau vide, les voyageurs sur la route d’Emmaüs saisis par le sens des Écritures et la fraction du pain, les invités au déjeuner sur l’herbe…

TOMBEAU VIDE OU LA VIE

L’expérience du tombeau vide est caractéristique de l’assemblée pascale : les gens ne savent que ce qu’ils ont appris ou pu retenir d’un quelconque enseignement. Aujourd’hui, avec le Christ mort, descendu des échafaudages de notre foi devenue simple folklore, ne serait-il pas plus opportun de parler par expérience d’un mystère pascal vécu dans le quotidien de l’existence, de commencer là où tout semblait fini et redire mais de façon inédite que le Christ est vraiment ressuscité ? Découvrir des germes de vie là où l’on croyait que tout était mort, l’espérance quand il n’y a plus que la désespérance, un sens là où il ne semble plus y avoir de sens. Aller au cœur de ces expériences pascales de conversion. Sonder les pourquoi, la nouveauté dans l’existence, la genèse de l’expérience spirituelle, devenir question pour l’autre et non seulement héraut de la Bonne Nouvelle. Il y aura toujours d’une part l’Évangile et sa Nouvelle : « Christ a vaincu la mort » ; mais d’autre part et non moins important, le résultat dans la vie concrète, le cheminement si long soit-il vers la « vie éternelle » et les secours souhaitables. Mais comment arriver à une communion dans la même foi en la résurrection et une commune inspiration pascale en des existences aussi diversifiées ?

Vraisemblablement, ces témoignages de conversion deviendront lieux d’approfondissement de la foi pascale traduite en gestes quotidiens. Ils auront l’avantage de nous dérober à des formulations purement théoriques, enseignements reçus et mémorisés pour tant que la mémoire demeure fidèle, ils deviendront réponses à des questions posées au cœur de la vie. La foi s’articulera de façon vivante à des questions germées en milieu de société. Ce ne sera plus l’expression d’une foi « pure », mais d’une foi émanée des milieux de vie où nous sommes devenus acteurs.

De ces témoignages se dégagera une pluralité de la foi et des risques éventuels. Nous irions même jusqu’à une certaine incompatibilité entre les témoignages. Jusqu’ici l’unité de la foi passait par le pouvoir, le magistère. Mais la fin de cette dynastie ne veut pas nécessairement dire la fin de l’Annonce de l’Évangile. Ce qu’il faudrait rechercher en tous ces témoignages pour ne point dire ces témoins de l’Évangile, serait une forme d’accord sur l’expérience du Christ ressuscité et ses conséquences pour la vie humaine vécue personnellement et en solidarité avec un groupe. Des témoignages différents peuvent laisser apparaître une inspiration commune, même s’ils viennent d’autres religions. Une certaine communion doit traverser les témoignages divers élaborés de différents lieux de la vie humaine. Et notre foi s’enrichira ainsi de significations nouvelles.

Un langage appris ou récité ne traduit pas la foi en la Résurrection du Christ. La foi pascale n’est pas ralliement à des formulations magistrales. « Elle se présente comme un mouvement intérieur, dans l’action comme dans les paroles qui la disent et l’interprètent, pour toutes formes d’action, de culture, de sagesse, et de morales sur une visée, ce Jésus dont les Apôtres et l’Évangile disent que Dieu l’a authentifié en le ressuscitant. »

Parole et vie

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