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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

4e Dimanche de l’Avent. Année B.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Nouvelle du jour pour tous les jours

Le sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, à une vierge fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David ; le nom de la jeune fille était Marie. Il entra chez elle et lui dit : « Salut, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi. » A ces mots, Marie fut bouleversée et se demandait ce que signifiait cette salutation. Mais l’ange lui dit : « Rassure-toi, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu concevras et enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et on l’appellera Fils du très Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son Père ; il régnera sur la maison de Jacob à jamais et son règne n’aura point de fin. » Mais Marie dit à l’ange : « Comment cela se fera-t-il, je ne connais point d’homme ? » L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre ; c’est pourquoi l’enfant sera saint et sera appelé Fils de Dieu. Élisabeth, ta parente, vient, elle aussi, de concevoir un fils en sa vieillesse, et elle en est à son sixième mois, elle qu’on appelait la stérile ; car rien n’est impossible à Dieu. » Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole ! » Et l’ange la quitta.

Commentaire :

Ce récit de l’Annonciation fait naître bien des questions, voire même des contestations. Cette « nouvelle » n’a jamais été évidente. Après deux mille ans de témoignages et de proclamations, la vérité demeure toujours instable dans l’esprit d’un très grand nombre et le fait historique discuté sur plus d’un point. Luc, le soit disant peintre de la Vierge, a-t-il vraiment été le confident de Marie, et tous les faits rapportés peuvent-ils être marqués au coin de la vérité historique. Luc est bien celui qui rédigeait son livre avec le plus d’honnêteté possible : « Après nous être soigneusement informé… » Ce récit ne serait-il au fond qu’une étude psychologique de l’âme de la Vierge ? Essayons de préciser avant tout l’objectif de l’évangéliste qui a complété son enseignement avec ces récits de l’enfance de Jésus.

GÉNÉRIQUE

Luc a situé l’événement dans le plus petit des bourgs de Galilée : « De Nazareth, peut-il sortir quelque chose de bon ? » avait contesté Nathanaël parlant des origines du Messie. (Jn 1 : 46) Là, vivait Joachin et Anne, père et mère d’une fille appelée Marie, d’âge marital. Pour fiancé, la famille avait déjà jeté son dévolu sur Joseph, de la maison de David, sans doute le plus beau gars du village ou sinon le meilleur. Nous sommes loin des évangiles apocryphes qui plaçaient aux côtés de la femme « comblée de grâces » un vieillard susceptible d’être son protecteur. Il demeure que les ascendants de Joseph et sa paternité légale suffiront à donner à Jésus le titre de « fils de David ». (Mt.1 : 16) Enfin, c’est en ce temps-là qu’Élisabeth, cousine de Marie, attendait un enfant dans sa vieillesse, elle en était à son sixième mois. Ces détails méritaient certaine considération.

LE DIALOGUE

Ici, nous ne tombons peut être pas dans le fictif, mais ce qu’il serait possible de considérer comme le travail de l’Esprit à travers l’art intuitif de Luc : « J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez les porter maintenant, avait confié Jésus à ses apôtres au soir de la Cène. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira vers la vérité tout entière … » (Jn. 16 : 12) Luc veut tenter de faire saisir à ses auditeurs le mystère et la vérité de la naissance virginale du Fils de Dieu. S’est-il inspiré du passage d’Isaïe (7 : 14) ? L’ange Gabriel est-il vraiment intervenu ? Et quel peut-être le sens et la portée exacte de la question de Marie : « Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais point d’homme ? » Tenter de répondre à toutes ces interrogations demanderait des pages et des pages. Et prendre le récit à la lettre aurait sans doute comme conséquence de rendre Marie « plus admirable qu’imitable ».

Luc tente donc une mise en scène, inspirée, comme ses personnages d’ailleurs, de l’Ancien Testament, pour nous faire comprendre un peu le mystère de la venue de Dieu sur terre : « Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son Fils né d’une femme, né sujet de la Loi, afin de racheter les sujets de la loi, et nous conférer l’adoption filiale. » (Ga. 4 : 4-5) Comment cela s’est-il passé ? Marie peut-elle devenir pour nous modèle par excellence d’une mise à la disposition des volontés divines dans la banalité du quotidien ? La question se pose, car le danger est grand que nous ne puissions considérer la Mère de Dieu comme notre mère, giron formateur, éducateur, modèle pour nous et plus encore pour la femme. Et ce n’est certes pas avec l’intervention de l’Ange et le dialogue tel que rapporté dans ces récits de l’enfance que nous pouvons trouver une source d’imitation.

Au principe, décrivons Marie comme l’archétype des béatitudes : pauvre, miséricordieuse, pacifique, affamée de justice et de vérité… Parce que comblée de grâces, ce qui ne laissait nulle espace au péché et ses aveuglements, consciente à nulle autre pareille des misères des hommes de son temps, Marie l’était non moins des volontés de salut et de miséricorde divine, telles que proclamées depuis les lointains prophètes. ( Osée 11, Is. 9 et Ge. 3) Et en son âme, l’offrande ne pouvait être que la seule réponse aux attentes divines, aux souffles de son cœur : « Me voici, je suis votre humble servante, qu’il me soit fait comme vous le désirez ! » Nous dirions en notre langage : « Si je puis vous être utile ! » Et cette offre de service, cette mise à la disposition de Dieu ne pouvait être que totale chez Marie, affectant non seulement son esprit et son cœur, mais aussi sa chair. Car il ne faut pas négliger le fait que les femmes du pays de Jésus, éprises d’espérance concernant la venue d’un sauveur et la vision des prophètes, attendaient dans leur chair la réalisation de cette promesse divine.

ADMIRABLE MAIS IMITABLE

Est-il tellement téméraire de déduire que c’est vraisemblablement ainsi que Luc a perçu le mystère de l’Incarnation et la coopération de Marie. Pour en traduire la réalité, il n’a cru mieux faire que de s’inspirer de l’Ancien Testament et des personnages dont l’histoire avait quelques ressemblances avec celle de la Vierge Marie. (Jug. 6 : 11 ; Is. 7 ) Ainsi l’annonciation peut-elle devenir pour nous, par ses sources authentiques, un lieu d’inspiration pour notre engagement au service du Sauveur : conscience des besoins de l’humanité et conscience de la volonté miséricordieuse de Dieu.

A chacun d’offrir ses services, car l’oeuvre du salut s’opère à travers les siècles grâce à la coopération des humains. C’est ainsi que la nouvelle d’un jour peut devenir la nouvelle de tous les jours.

Parole et vie

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