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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

Baptême du Seigneur. Année A.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Souvenir de baptême

Alors apparaît Jésus ; de Galilée, il vient vers Jean sur les rives du Jourdain pour être baptisé par lui. Celui-ci voulait l’en dissuader : C’est moi, disait-il, qui ai besoin d’être baptisé par toi, et toi, tu viens à moi ! Mais Jésus lui répondit : Laisse faire pour l’instant ; c’est ainsi qu’il convient d’accomplir toute justice. Alors Jean le laisse faire. Aussitôt baptisé, Jésus remonta de l’eau ; et voici que les cieux s’ouvrirent, il vit l’Esprit de Dieu descendre du ciel comme une colombe et venir sur lui. Une voix venue des cieux disait : Celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute ma faveur.

Commentaire :

Baptisés de la première heure, les chrétiens étaient assis en cercle autour de l’évangéliste. L’heure lui semblait venue de remémorer avec eux les événements qui les avaient amenés à Jésus et ainsi attiser leur ferveur. A la façon d’un conteur, non d’un historien ou d’un chroniqueur, mais s’inspirant des prophètes, Matthieu reprit pour la nième fois l’histoire du baptême de Jésus. Question d’amener les siens à réfléchir sur leur propre baptême et engagements.

Saint Pierre décrit ainsi le baptême : non l’enlèvement d’une souillure charnelle, mais l’engagement à Dieu d’une bonne conscience par la résurrection de Jésus Christ, lui, qui passé au ciel, est à la droite de Dieu, après s’être soumis les Anges, les Dominations et les Puissances. (1 Pet.3 : 21-22) Dans sa lettre aux Romains, Paul écrit : Baptisés dans le Christ Jésus, c’est dans sa mort que tous nous avons été baptisés. Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions, nous aussi, dans une vie nouvelle. (Rm.6 : 3-4)

La narration de Matthieu devait à près se résumer ainsi : Jean Baptiste se disait indigne de remplir l’humble corvée de l’esclave aux pieds de son maître pour dénouer sa chaussure, Un jour, parmi les Juifs nombreux qui se présentaient à lui pour le baptême, il voit venir à lui l’Envoyé de Dieu. Le Baptiste avait élu domicile sur les rives du Jourdain d’où il prêchait un baptême de pénitence et de conversion pour la rémission des péchés. Le fait de descendre dans les eaux fluviales pour y immergé attestait publiquement de la part du baptisé une volonté de purification intérieure. Le geste de Jean prenait alors plein de sens : de sa grosse main velue, il plongeait la tête du néophyte dans l’eau pour l’en retirer aussitôt, signifiant, ce faisant, mort et vie pour le converti, purification et détermination de changer sa vie. Pour Jésus, être baptisé par Jean, c’était s’identifier à nous, mais aussi marquer la continuité de sa mission avec celle de Jean (Mat.11 : 11+ 17 : 12+ et 21 : 25+) et poser non moins un acte de solidarité avec nous, pauvres pécheurs.

Suit alors, dans l’évangile, la déclaration qui dévoile le plan de Dieu sur Jésus. Mise en scène conventionnelle d’une révélation qui, dans la ligne du psaume 2 : 7, s’adressait à Jésus personnellement (Mc.1 : 11 et Lc.3 : 22) : Tu es mon Fils bien-aimé. Première investiture messianique.

O n se demande parfois quelle idée Jésus pouvait avoir de son identité divine. Selon l’exégèse, la connaissance lui en serait venue progressivement en diverses occasions : au Temple lors de son recouvrement, au Baptême, puis à la Transfiguration, pour atteindre un point maximal mais combien respectueux de sa stature humaine du crucifié : Père, pourquoi m’as-tu abandonné? Dans cette évocation, remarquons au passage que cette prise de conscience ne fut pas sans heurt tant sommet de la croix qu’au désert, au moment de la tentation indescriptible. Il nous serait profitable de relire cet évangile, non comme la relation d’une histoire mais comme le Credo d’une Église pour laquelle l’intervention divine ne fait aucun doute. Elle voyait dans cette relation d’appartenance et d’intimité entre Jésus et Dieu son Père la condition d’efficacité de l’œuvre de salut. Le Fils ne peut rien faire de lui-même, rien qu’il ne voie faire au Père : ce que fait celui-ci, le Fils le fait pareillement. (Jn. , 5 : 19.

Matthieu, imaginons-le, à l’instar de Jésus dans la synagogue de Nazareth, ferma le livre et demeura silencieux, permettant à chacun un long moment de réflexion. Il importait par-dessus tout que les auditeurs donnent sens et vie à leur propre expérience de baptisé à la lumière de cet événement dans la vie de Jésus. Il en est de la Bible comme d’une toile : elle demeure morte, dépouillée de sens, à moins que l’auteur ne vienne lui-même nous confier ce qu’il a voulu peindre. Mais, l’œuvre accompli, l’immense désir du maître était bien davantage de donner à chacun la grâce d’une interprétation personnelle qui conduise son oeuvre plus loin encore qu’elle n’avait été destinée.

A chacun donc de revivre maintenant pour soi ce baptême de Jésus, de descendre avec le Maître dans les eaux du Jourdain, de sentir sur sa tête la grosse main du Baptiste, de vivre mort et résurrection dans cette immersion baptismale. Ainsi ce qui était commémoraison d’hier deviendra réalité d’aujourd’hui et inspiration de demain.

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