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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

32e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

La question du millionnaire

S’approchant alors, quelques Sadducéens – ceux-là qui nient la résurrection – l’interrogèrent en ces termes : Maître, Moïse nous a fait la prescription suivante : Si quelqu’un a un frère marié qui meurt sans enfants, qu’il épouse la veuve pour susciter une postérité à son frère. Il y avait donc sept frères. Le premier, ayant pris femme, mourut sans enfants. Le second, puis le troisième prirent la veuve. Et tous les sept moururent de même, sans laisser d’enfants. Eh bien ! cette femme à la résurrection, duquel d’entre eux va-t-elle devenir la femme ? Car tous les sept l’auront eue pour femme. Jésus leur répondit : Les enfants de ce monde-ci prennent femme ou mari ; mais ceux qui auront été jugés dignes d’avoir part à l’autre monde et à la résurrection d’entre les morts, ne prennent ni femme ni mari ; aussi bien ne peuvent-ils non plus mourir, car ils sont pareils aux anges, ils sont fils de Dieu, fils de la résurrection. Et que les morts ressuscitent, Moïse encore l’a donné à entendre dans le passage du Buisson où il appelle le Seigneur Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob. Or , il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ; tous en effet vivent pour lui. Prenant alors la parole, quelques scribes lui dirent : Maître, tu as bien parlé. Ils n’osaient plus l’interroger sur rien.

Commentaire :

Nous sommes dans les derniers jours de la vie terrestre de Jésus. Il vient de faire son entrée à Jérusalem, il a chassé les vendeurs du Temple et, maintenant, de Béthanie, son lieu de résidence, il monte souvent à Jérusalem pour y livrer quelques uns des ses plus importants enseignements, entre autre le discours sur la fin des temps, origines de controverses (Mat.22 :15-46) dont celle qui nous occupe en ce dimanche. Le genre peut bien nous laisser indifférent ; quel intérêt pour nous et même pour les croyants de l’Église de Luc. Comme sur la route d’Emmaüs, Jésus argumente ici à partir des Écritures :Il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Écritures. (Lc.24 :45) C’était pour la communauté de Luc et non moins pour nous, une invitation à une lecture chrétienne de l’Ancien Testament.

L’épisode rappelle celui que Paul suscita lors de son procès devant le Sanhédrin où siégeaient côte à côte Sadducéens et Pharisiens : Frère, je suis un Pharisien. C’est pour notre espérance, la résurrection des morts, que je suis en jugement. A peine Paul eut-il prononcé ces mots qu’un conflit éclata entre pharisiens et sadducéens et l’assemblée se divisa. Les sadducéens soutenaient en effet qu’il n’y a ni résurrection, ni ange, ni esprit, tandis que les pharisiens professaient l’un et l’autre. (Ac. 23:6-10)

Ce jour là, au Temple, les sadducéens savaient bien que Jésus partageait la foi des pharisiens en la résurrection. En posant la question, ils espéraient que Jésus désavouerait la croyance des pharisiens. A cette fin, ils présentèrent à Jésus un cas inspiré d’une loi bien connue du peuple : celle du lévirat, l’obligation pour le beau-frère (lévir en hébreu) d’épouser la belle-sœur quand le mari de celle-ci meurt sans enfant. Il se doit alors d’assurer la postérité de son frère défunt. La question était habile bien qu’elle nous paraisse d’un ridicule consommé. Mais ne nous arrive-t-il pas à nous aussi d’imaginer le comment de la résurrection ou l’existence dans l’au-delà à partir d’imaginations ou de notre vie terrestre.

Chez les Juifs, la foi en la résurrection a pris forme lors de la persécution d’Antiochus Épiphane en 167-165. (Dan.12 :1-3, 2 Macc.7: 9-23; 14:16) Mais déjà, certains croyants avaient pressenti que la mort ne pouvait mettre fin à leur relation avec Dieu :Tu ne peux laisser ton ami voir la fosse. (Ps.16 :10) Au temps du Christ, si les sadducéens rejetaient l’idée, les pharisiens oscillaient entre deux positions : la venue du Règne de Dieu vue de façon on ne peut plus matérielle ou une vie transformée tel que la concevait le prophète Daniel : Tous les justes deviendront comme des anges dans le ciel.

A ces hommes pleins d’espoir, Jésus veut affirmer que la vie du ressuscité n’est pas sur le modèle de la nôtre, elle sera totalement transfigurée (34-36). Voilà pourquoi Luc établit un contraste entre les fils de ce monde et ceux qui seront jugés dignes d’obtenir ce monde-là. Ils deviendront fils de Dieu en devenant fils de la résurrection. Ils seront alors introduits dans l’inimité d’un fils avec son Père. Dieu a envoyé son Fils pour que nous devenions, en lui, ses fils (Ga.4 :5-7 et Rm.8 :14-15), De même que Jésus a été constitué fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts. (Rm.1 :4) Il s’agit donc d’une vie nouvelle, inimaginable, la vie de fils de Dieu.

Pour établir la vérité de ce comment de la résurrection, Jésus en donne ensuite la preuve. Celle-ci aurait pu être tirée de textes comme celui de Daniel (ch.7e) ou du 2e Livre des Maccabées (ch.7) ; mais soucieux de nous apprendre à lire l’Ancien Testament comme apport à notre foi chrétienne, Jésus tire son argumentation de l’Exode : Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, n’est pas le Dieu des morts mais des vivants.

La foi en la résurrection, enseignait l’apôtre Paul, n’est pas une croyance facultative, mais la foi en Dieu lui-même. (1 Co. 15:13,16) C’est ainsi que Pierre exhortait ses premiers croyants à rendre compte de l’espérance qui est en eux. (1 P. 3 :15) La foi n’est pas une religion fondée sur des réponses à nos besoins essentiels, mais l’ assurance d’être aimés par un Dieu vivant que de notre côté nous aimons comme un Père, source de vie. La meilleure preuve de la résurrection pour nous et les autres, c’est de vivre chaque jour pour Dieu.

Ainsi, par expérience, pourrons-nous répondre à la question du million, même si personne n’est jamais venu nous éclairer sur cet au-delà mystérieux.

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