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École de la prière

Prières diverses

Imprimer Par Paul Claudel, Thérèse d'Avila, Patrice de La Tour du Pin

La Vierge à midi
de Paul Claudel

Il est midi. Je vois l’église ouverte. Il faut entrer.
Mère de Jésus-Christ, je ne viens pas prier.
Je n’ai rien à offrir et rien à demander.
Je viens seulement, Mère, pour vous regarder.
Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
Que je suis votre fils et que vous êtes là
Rien que pour un moment pendant que tout s’arrête.
Midi !
Être avec vous, Marie, en ce lieu où vous êtes.
Ne rien dire, regarder votre visage,
Laisser le cour chanter dans son propre langage.
Ne rien dire, mais seulement chanter parce qu’on a le cour trop plein,
Comme le merle qui suit son idée en ces espèces de couplets soudains.
Parce que vous êtes belle, parce que vous êtes immaculée,
La femme dans la Grâce enfin restituée,
La créature dans son honneur premier et dans son épanouissement final,
Telle qu’elle est sortie de Dieu au matin de sa splendeur originale.
Intacte ineffablement parce que vous êtes la Mère de Jésus-Christ,
Qui est la vérité entre vos bras, et la seule espérance et le seul fruit.
Parce que vous êtes la femme, l’Eden de l’ancienne tendresse oubliée,
Dont le regard trouve le cour tout à coup et fait jaillir les larmes accumulées.
Parce qu’il est midi, parce que nous sommes en ce jour d’aujourd’hui,
Parce que vous êtes là pour toujours,
Simplement parce que vous êtes Marie,
Simplement parce que vous existez,
Mère de Jésus-Christ, soyez remerciée !

Paul Claudel
(Poèmes de Guerre, N.R.F., 1914-1915)

Je suis à vous
de sainte Thérèse d’Avila

Je suis vôtre, puisque vous m’avez créée,
Vôtre, puisque vous m’avez rachetée,
Vôtre, puisque vous m’avez supportée,
Vôtre, puisque vous m’avez appelée,
Vôtre, puisque vous m’avez attendue,
Vôtre, puisque je ne me suis pas perdue,
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?

Qu’ordonnez-vous donc, bon Seigneur,
Que fasse un si vil serviteur?
Quelle fonction avez-vous donné
À cet esclave pécheur?
Vous me voyez ici, mon doux Amour,
Amour doux, vous me voyez ici
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?

Vous voyez ici mon cour,
Je dépose sur la paume de votre main
Mon corps, ma vie et mon âme,
Mes entrailles et mes affections;
Doux époux, ma rédemption
Puisque je me suis offerte à vous
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?
Donnez-moi la mort, donnez-moi la vie :
Donnez-moi santé ou maladie,
Honneur ou déshonneur donnez-moi
Donnez-moi la guerre, ou une paix accrue
La faiblesse, ou la force accomplie,
Puisque à tout je dis oui.
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?
Donnez moi la richesse ou la pauvreté,
Donnez consolation ou désolation,
Donnez-moi allégresse ou tristesse,
Donnez-moi l’enfer, ou donnez-moi le ciel.
Douce vie, soleil sans voile,
Puisque je me suis rendue à merci,
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?
Si vous le voulez donnez-moi l’oraison,
Sinon, donnez moi la sécheresse,
L’abondance et la dévotion,
Sinon, la stérilité.
Souveraine majesté,
Je ne trouve la paix qu’ici
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?
Si vous voulez mon repos,
Je veux, par amour, me reposer,
Si vous m’ordonnez de travailler,
Je veux mourir en travaillant
Dites-moi où, comment et quand?
Dites, doux amour, dites
Qu’ordonnez-vous qu’il soit fait de moi?

Ste Thérèse d’Avila
Ouvres complètes, trad. Marcelle Auclair,
Desclée de Brouwer, 1964, pp.1071 et 1073

Mets ta lampe sur le boisseau
de Patrice de La Tour du Pin

Mets ta lampe sur le boisseau,
Et tant mieux qu’elle s’éteigne!
Car tu auras une vraie joie,
Ta prière sera la torche
Que le Seigneur entretiendra.
Mets ta lampe sur le boisseau,
Et tant mieux s’il la renverse
Et si le feu prend à ton bois;
Tu ne souffriras par le mal
Que t’aurait fait le feu d’en bas.

Mets ta lampe sur le boisseau,
Et tant mieux si tes doigts brûlent
À ne plus pouvoir la tenir :
Puisque ton cour sait être à deux,
Le Seigneur la tiendra pour toi.
Mets ta lampe sur le boisseau,
Et tant mieux si tu n’as plus rien
À consumer, même pour lui :
Dieu fournira le feu et le bois.
Alors tu brilleras en lui.

Patrice de La Tour du Pin
Prière du temps présent, 1980, p.1536

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