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Billet hebdomadaire

Cher Timothée, cher filleul

Imprimer Par Denis Gagnon

Il faut que nous nous parlions, toi et moi. C’est urgent. Très urgent même. Il faut que nous nous parlions pendant que nous avons encore quelques bribes d’un langage commun, pendant que nous parlons encore la même langue.

Nous ne faisons pas partie de la même génération. Une bonne soixantaine d’années nous sépare l’un de l’autre. Ces nombreuses années ont imprimé, dans mon corps et dans mon esprit, une histoire que tu n’as pas vécue et que tu ne vivras pas non plus. Encore au début de ta vie, tu as pourtant vécu sur trois continents. Tu es allé à l’école en Allemagne, en Chine. Tu étudies maintenant au Tennessee U.S.A. Et tu as à peine dix ans!

J’habite plus ou moins la grande ville de Montréal mais je garde la nostalgie de mon petit village natal sur les rives du Saint-Laurent. Je suis demeuré rural malgré que j’aie vécu la majorité de ma vie en ville. Toi, tu vogues à l’échelle planétaire et tu as de bonnes chances de voyager dans l’interplanétaire. Tu as une mentalité de campeur. Partout où tu dresses ta tente, tu te sens chez toi et tu profites bien des lieux sans connaître la nostalgie comme ton parrain.

Nos enracinements géographiques sont différents mais nous pouvons nous rejoindre d’une façon ou d’une autre. Il y a les vacances, quand tu viens au pays de ta naissance. Il y a les courriels sur Internet quand tu peux donner des nouvelles. J’ai encore le vieux réflexe d’espérer du courrier postal, mais je sens que cette forme de communication est désuète, du moins dans ton esprit d’internaute.

Justement, parlons-en de ton esprit d’internaute. Tu maîtrises l’ordinateur comme je griffonne avec un crayon au plomb. Tu nages sur la mer des réseaux sociaux avec une aisance que j’admire. Dans tout cet univers, je patauge. Ta mère voudrait que je m’initie à Skype pour communiquer avec toi. L’adolescence est proche et un parrain, c’est utile à l’adolescence. Elle me dit que je serais bien utile si je parle le même langage que toi, si j’utilise les mêmes outils de communication. Mais tous ces réseaux sociaux, le cellulaire, le IPad, le IPod, Facebook, Twitter, tout cela est un insondable mystère pour le vieillard que je suis.

Un mystère au plan technique. Mais surtout un nouveau monde qui est en train de naître, une mentalité nouvelle. Vous serez des hommes et des femmes différents de nous. Vos relations interpersonnelles n’auront rien de commun avec les nôtres. Vos échelles de valeurs n’auront rien de comparable avec les nôtres. La révolution que vous vivrez n’a de comparable que celle du néolithique, disait dernièrement un savant. Imagine : l’âge de pierre!

Un univers différent et surtout inimaginable. Toi, tu le devines à peine. Moi, je n’arrive pas à l’imaginer avec mes vieux points de repères. Et mes peurs devant ce que tu risques de devenir. Et mes regrets devant ce que tu ne connaîtras pas de mon propre monde.

J’espère une chose, une seule, une chose si précieuse : que l’amour traverse le temps. Qu’il demeure le bien le plus précieux qui soit dans la vie. Qu’il vous rende heureux comme il nous a rendu heureux. Qu’il vous donne le goût de le partager avec les générations qui vous suivront. Qu’il vous garde humains, pleinement humains tout au long de la traversée de votre existence sur la terre comme dans l’interplanétaire.

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