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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

12e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Quotidie morior (s. Paul)

Un jour, Jésus priait à l’écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogea : « Pour la foule, qui suis-je ? » Ils répondirent : « Jean Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un prophète d’autrefois qui serait ressuscité. » Jésus leur dit : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre prit la parole et répondit : « Le Messie de Dieu. » Et Jésus leur défendit vivement de le révéler à personne, en expliquant : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite. » Il leur disait à tous : « Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive ; car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie pour moi la sauvera.

Commentaire :

Cet épisode a comme contexte une période importante de la vie de Jésus. Luc élabore le récit du voyage de Jésus à Jérusalem en lui donnant d’étonnantes proportions ( 9 : 51 – 19 : 44) : longue montée précédée d’une tournée à travers la Palestine (3 : 21 – 9 : 50). La confession de foi de Pierre et l’annonce de la Passion ne forment qu’un seul tout. L’épisode présent est nettement distinct de la multiplication des pains faite en présence des foules, alors que la confession de foi a pour témoins les disciples seuls. On remarquera que, dans l’intention qu’il avait de décrire le ministère de Jésus dans les limites de la terre Sainte, Luc ne mentionne pas Césarée de Philippe comme lieu de la confession. Celle-ci dut se faire dans les environs de Bethsaïde comme la multiplication des pains qui précède. L’événement raconté ce dimanche débute par la présentation de Jésus en prière. Luc veut sans doute souligner l’importance et l’ambiance de prière qui ont marqué tous les événements importants de la vie de Jésus.

Les contemporains de Jésus, intrigués par son comportement presque révolutionnaire, pour le moins inédit, s’interrogeaient : « Qui est-il donc celui-là ? » Différentes hypothèses sont ici rapportées par les disciples et toutes concordent avec celle d’un prophète. Pierre apportera une réponse qui deviendra profession de foi messianique. Jésus n’approuve ni ne désapprouve la réaction de l’apôtre, ce qui ne veut pas dire que Luc la trouve erronée ; au contraire, il la considère comme valable. Tel qu’annoncé par l’ange Gabriel, Jésus est Messie désigné depuis sa naissance (Lc 1 : 32-33) ; Luc en conçoit ici la réalité en intime connexion avec la divinité de Jésus. A remarquer aussi que l’évangéliste ne voit toutefois aucune opposition radicale entre le jugement des foules et celui de Pierre. Ce qui n’empêche qu’à Nazareth, où Jésus s’applique le texte du prophète, une première réaction favorable de l’auditoire se mue en attitude hostile. ( 4 : 18-19, 23-24, 28-29)

À cette profession de foi fait suite l’annonce de la Passion dont la nécessité semble commander toute la vie de Jésus. Pour Luc, c’est ainsi que s’actualise le plan divin (Ac. 3 : 21). Le comportement humain de Jésus est constamment marqué au coin du devoir. Dans l’évangile de l’enfance, Jésus doit être « aux affaires de son Père » (Lc. 2 : 49). Sa mission d’annoncer le Royaume de Dieu définit une mission commandée par celui qui l’a envoyé. Le thème de la Passion, nécessité divine, est repris par trois fois. Mais les disciples ne comprendront ces choses qu’après la résurrection (Lc. 24 : 5-9, 25-27, 44-46) même si Jésus en avait explicitement parlé tout cours de sa vie terrestre. Avant la résurrection, les disciples ne pouvaient accepter ce plan divin (9 : 32,45 ; 18 : 34 ; 22 : 37-46) À noter que Luc ne fait aucune mention de l’intervention de Pierre pour détourner Jésus de son devoir et la verte réprimande qu’il s’attire. L’auteur tient certes à présenter Pierre sous son plus beau jour; et de plus, il lui semble impossible que Pierre eût été à ce moment aux yeux de Jésus la figure du diable : « Arrière Satan ! »

Les conditions pour suivre Jésus sont alors rappelées à la foule, aux disciples et à tous. Faut-il croire que les chrétiens étaient alors butte aux persécutions, et que certains d’entre eux devaient déjà avoir déjà renié leur foi en Jésus afin d’échapper aux dangers, voire même à la menace de mort. C’est contre cette peur exagérée de la souffrance que Luc tente de réagir. Tout disciple désireux de suivre Jésus doit lui ressembler, lui qui a volontairement assumé la souffrance : celui qui veut suivre Jésus doit comme Jésus se renier lui-même, être prêt à mourir sur la croix comme le Christ et accepter l’éventualité du martyre. C’est dans la mesure où le chrétien risque de perdre sa vie en confessant Jésus face à ses contradicteurs qu’il sauve sa vie.

La menace de la persécution devait quand même s’être atténuée car Luc ajoute « chaque jour » : le chrétien est appelé à mourir à lui-même en esprit chaque jour. C’est une règle de vie, et qui veut vraiment porter le nom de chrétien doit réserver dans sa vie quotidienne une place à la croix et à la souffrance éventuelles.

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