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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

23e Dimanche du temps ordinaire. Année A.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Grand catéchisme en image

« Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le seul à seul. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi un ou deux autres pour que toute affaire soit décidée par la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à la communauté. Et s’il refuse d’écouter la communauté, qu’il soit pour toi comme le païen et le publicain. En vérité, je vous le dis : tout ce que vous lierez sur la terre sera tenu au ciel pour lié, et tout ce que vous délierez sur la terre sera tenu au ciel pour délié. De même je vous le dis : en vérité, si deux d’entre vous, sur la terre, unissent leurs voix pour demander quoi que ce soit, cela leur sera accordé par mon Père qui est aux cieux. Que deux ou trois, en effet, soient réunis en mon Nom, je suis là au milieu d’eux. »

Commentaire :

Au début de ce commentaire, rien ne pourrait être plus opportun que cette réflexion d’Ignace d’Antioche (107) : « Que chacun de vous, vous deveniez un chœur, afin que dans l’harmonie de votre accord, prenant le ton de Dieu dans l’unité, vous chantiez d’une seule voix, par Jésus Christ, un hymne au Père, afin qu’il vous écoute et qu’il vous reconnaisse par vos bonnes œuvres comme les membres de son Fils. Il est donc utile pour vous d’être dans une inséparable unité, afin de participer toujours à Dieu. » (Lettre aux Éphésiens IV.1-2)

L’évangile de ce dimanche pourrait être comme une anticipation de la prière sacerdotale du Christ : « Père, que tous soient uns comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu’eux aussi soient uns en nous afin que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jn. 17 : 21) Le chapitre 18e de saint Matthieu est très complexe. Il se situe comme le quatrième discours de l’évangile de Matthieu, section que nous pourrions considérer comme une anthologie de l’enseignement du maître ; l’évangéliste le reprend à son compte pour faire l’éducation de sa jeune communauté.

Ce chapitre est tissé d’instructions et de consignes pastorales aux dimensions communautaires et ecclésiales. Ses matériaux sont empruntés à la catéchèse tant écrite qu’orale des débuts de l’évangélisation. Disons en bref que l’évangéliste réunit dans cet ensemble des consignes diverses du Seigneur en fonction de circonstances concrètes vécues dans la communauté locale. Une fois encore, Matthieu, avec toute sa fidélité à la Parole de Jésus, fait un lien avec la vie de son église. Cette considération demeure toujours très importante. Nous ne feuilletons pas une histoire de Jésus, mais la « Petit catéchisme » de l’église matthéenne, osons dire « Le grand catéchisme en images » car ces consignes diagnostiquent des problèmes et des situations concrètes, l’image de l’église du temps de Matthieu.

L’ENFANT, SIGNE POUR LA COMMUNAUTÉ

Ce chapitre de Matthieu comprend trois pistes de réflexions. La première précède ces lignes que nous venons de lire. Tel un ancien prophète, l’évangéliste utilise l’image d’un petit enfant. Signe d’humilité et de délicatesse, l’enfant inspirera la conduite des frères les uns envers les autres. Deux attitudes possibles, l’une et l’autre incontournables : où l’on devient objet de scandale ou l’on est personne des plus responsable. Le petit a droit à notre protection. Tout membre de la communauté quelque faible qu’il soit risque de s’égarer, de se perdre, et plus grave encore, d’être scandalisé. Il faut le respecter car le Seigneur s’identifie à lui et son ange dans le ciel se tient en présence du Père qui ne veut perdre un seul de ces petits.

C’est suite à ce préambule bouleversant et dans ce contexte de responsabilité, qu’intervient maintenant la consigne de la sollicitude pastorale à l’égard des frères pécheurs, notamment celui qui s’est rendu coupable d’infidélité à ses engagements chrétiens. Des règles de procédures précèdent trois petites sentences sur l’autorité des disciples, l’efficacité de la prière en commun et la présence du Seigneur au sein de son assemblée en prière.

CORRECTION FRATERNELLE

Selon quelques exégètes, les mots « contre toi » auraient été ajoutés. Il s’agirait ici tout simplement d’un péché public, faute grave qui met visiblement en contradiction avec les engagements de la foi. Nul ne peut demeurer indifférent, le devoir de reprendre s’impose. Mais reprendre est un art, le plus difficile qui soit. Il importe de démontrer au pécheur et de lui faire voir la gravité de son action. Avant tout, on le reprend seul à seul. Matthieu ayant l’expérience de la communauté où l’ivraie croit avec le bon grain, ajoute trois autres insistances pastorales susceptibles d’amener le coupable à prendre une option. À lui de choisir : se séparer ou se convertir.

Mettent un terme à ce passage, trois sentences de nature à justifier l’intervention pastorale de l’Église. Lier ou délier constitue le rôle de l’Église, décision de la communauté qui exclut de son sein un membre indigne, pécheur public, ou qui l’absout après réhabilitation. Le pécheur qui refuse la main tendue de l’Église consomme son ex-communion, excommunication, non seulement avec l’Église de la terre, mais encore l’Église céleste.

Le passage se termine par une exhortation à la prière. Le Seigneur a promis sa présence au sein de la communauté non seulement responsable de l’intégrité de ses membres, mais aussi de leur salut. La présence du Christ est constante dans l’évangile de Matthieu, dans sa mission, sa pauvreté incarnée dans les petits et ses membres malades et souffrants.

En quelques lignes d’un condensé remarquable, l’évangéliste non seulement rappelle l’enseignement du Seigneur, mais fait en quelque sorte le « catéchisme en image » à sa jeune communauté. Le tout basé sur la responsabilité chrétienne de chacun de ses membres à l’égard du faible et du pécheur que Dieu aime comme un enfant, fut-il enfant prodigue.

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