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Responsable de la chronique : Nicolas Burle, o.p.
Méditation chrétienne

Humilité et patience

Imprimer Par Bernard de Clairvaux

Bernard de Clairvaux

Auteur : Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153), moine amoureux du silence et un immense prédicateur, un réformateur de son ordre religieux et un contempteur des excès de son temps. Au coeur de la spiritualité de saint Bernard se trouve ainsi la recherche de la paix intérieure au milieu des tourments et des épreuves.

Voyez-vous comme l’humilité nous justifie ? Je dis l’humilité, non pas l’humiliation. Que de gens sont humiliés, et ne sont pas humbles ! Les uns ont de l’aigreur de se voir humiliés, les autres le souffrent avec patience, et les autres avec joie. Les premiers sont coupables ; les autres sont innocents; et les derniers sont justes ; l’innocence est bien une partie de la justice ; mais l’humilité seule en fait la perfection.

Celui qui peut dire : « Je me trouve bien de ce que vous m’avez humilié » est vraiment humble ; celui qui soutire de se voir humilié, ne peut pas dire cela, et encore moins celui qui en murmure. Nous ne promettons la récompense de l’humiliation ni à l’un ni à l’autre, quoiqu’ils soient bien différents entre eux, et que l’un possède son âme par la patience, au lieu que l’autre la perd par son murmure. Et quoiqu’il n’y en ait qu’un qui soit digne de colère, ni l’un ni l’autre néanmoins ne méritent la grâce, parce que Dieu ne la donne pas à ceux qui sont humiliés, mais à ceux qui sont humbles.

Or celui-là est humble qui tourne l’humiliation en humilité, et c’est lui qui dit à Dieu : « Je me trouve bien de ce que vous m’avez humilié » (Jacob. IV. 6). Ce qu’on souffre avec patience, évidemment n’est pas un bien, mais une chose fâcheuse. Or nous savons que Dieu aime celui qui donne gaiement (2 Cor. IV. 9). C’est pour cela que lorsque nous jeûnons, on nous ordonne de nous parfumer la tête et de nous laver visage (Matth. VI. 17), afin que nos bonnes œuvres soient assaisonnées d’une certaine joie spirituelle, et que nos holocaustes soient gras et parfaits.

Car la seule humilité qui est parfaite mérite la grâce de Dieu. Tandis que celle qui est contrainte ou forcée, comme est l’humilité de celui qui se contient avec patience, si elle obtient la vie, à cause de la patienté, elle ne saurait avoir la grâce (Saint Bernard entend parler ici de la grâce spéciale promise aux humbles en ces termes : « Dieu donne la grâce aux humbles, » grâce non-seulement intérieure mais encore extérieure, qui consiste dans l’exaltation qui leur est réservée même en cette vie) à cause de la tristesse qui l’accompagne. Car cette parole de l’Écriture : « que l’humble se glorifie de son élévation » ne convient point à celui qui est en cet état, parce qu’il n’est pas humilié de bon cœur et avec joie.

Mais voulez-vous voir un humble qui se glorifie comme il faut, et qui est vraiment digne de gloire ? « Je me glorifierai volontiers, dit l’Apôtre, dans mes infirmités, afin que la vertu de Jésus-Christ habite en moi » (2 Cor. XII. 9). Il ne dit pas qu’il souffre patiemment ses infirmités, mais qu’il s’en glorifie volontiers, témoignant ainsi qu’il lui est avantageux d’être humilié, et qu’il ne lui suffit pas de posséder son âme en patience, et de souffrir patiemment d’être humilié, s’il ne reçoit encore la grâce, de se réjouir de l’être. Écoutez une règle générale sur ce sujet : « Quiconque s’humilie sera élevé » (Luc. XIV, 11). Par où Jésus-Christ marque certainement qu’il ne faut pas entendre que toute sorte d’humilité doit être élevée, mais qu’il n’y a que celle qui part d’une volonté libre, non celle qui est accompagnée de tristesse ou qui vient de nécessité. De même, dans le sens contraire, ce ne sont pas tous ceux qui sont élevés qui doivent être humiliés, mais ceux-là seulement qui s’élèvent eux-mêmes par un mouvement de vanité volontaire. Ce n’est donc pas celui qui est humilié, mais celui qui s’humilie volontairement, qui sera élevé à cause du mérite de sa volonté. Car quoique la matière de l’humilié lui soit fournie par un autre, par exemple, par les opprobres, les pertes, les supplices, cela ne fait pas qu’on puisse dire que c’est un autre qui l’humilie, plutôt qu’il ne s’humilie lui-même, s’il se résout à souffrir toutes ces choses sans rien dire et avec joie pour l’amour de Dieu.

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