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Responsable de la chronique : Jacques Marcotte, o.p.
Éditorial

L’hiver peut bien venir

Imprimer Par Anne Saulnier et Jacques Marcotte

Avec le mois de novembre arrivent l’heure des questionnements et celle des bilans; l’hiver s’en vient, où tout est mis à rude épreuve. Nous avons été bombardés pendant des mois de nouvelles de toutes sortes, bonnes et mauvaises, et nous avons bien de la difficulté à voir le sens et la portée de tel ou tel événement majeur.

La guerre en Syrie qui ne cesse de faire rage, la situation délicate entre Palestiniens et Israéliens, le printemps arabe qui met du temps à produire ses fruits, les désastres naturels associés apparemment au réchauffement climatique, les résistances face aux changements du statut de la femme dans le monde… Plus près de nous, c’est le pénible constat d’une corruption généralisée dans le monde de la construction et les allégations d’abus chez les politiciens, la confusion autour de la question de la Chartre québécoise, l’insatiable course aux profits dans les entreprises privées qui amènent des désastres comme celui de Lac-Mégantic…

La liste serait trop longue et forcément injuste, car il y a, en même temps que de grandes souffrances, l’émergence de signes qui nous font voir de belles promesses ou des fruits durables; tout n’est pas en train de périr, contrairement à ce que nous pourrions croire. L’important, c’est de savoir discerner et reconnaître ce qui, déjà, produit de bons fruits.

Par exemple, nous voyons au Pakistan l’expérience malheureuse de la jeune Malala prendre une tournure inattendue face à la possibilité pour les jeunes filles d’accéder à la pleine éducation. En République islamique d’Iran, le nouveau régime du président Hassan Rohani annonce un réel désir de dialogue avec l’Occident, tandis que, fort heureusement, le régime du gouvernement syrien de Bashar el-Assad collabore à la destruction des sites d’armes chimiques. Face à la question écologique, les gens sont de plus en plus conscientisés, et l’aspect environnemental s’impose de plus en plus dans les projets privés ou publics. Nos populations ne tolèrent plus la collusion et le mensonge, de même que les abus de pouvoir, et démontrent un souci de transparence à l’égard de leurs élus. Face à des désastres comme celui de Lac-Mégantic ou d’ailleurs dans le monde, les gens oublient leurs différents, se serrent les coudes et s’entraident pour reconstruire ce qui a été détruit.

Devant tout ce qui se passe, une relecture chrétienne des événements nous aide à nuancer notre regard, à échapper au piège de la radicalisation et de la recherche à tout prix d’un coupable ou d’un bouc émissaire. Même dans les cas de non-évidence, notre mission est de discerner ce qui porte une promesse d’avenir, sans que pour autant nous allions dans la naïveté ou déformions les faits rapportés.

Dernièrement, l’actualité a souligné l’anniversaire de la mort de Martin Luther King qui, dans un discours mémorable, avait commencé son interlocution par « I have a dream ». Ce rêve d’un monde où régnerait l’égalité entre Blancs et Noirs, et qui paraissait comme une inatteignable utopie à l’époque, s’est largement réalisé en moins de cinquante ans. N’était-ce pas parce que déjà, au moment du fameux discours, le rêve était en train de s’accomplir?

Comme chrétiens, nous sommes appelés à changer constamment notre regard, à nous convertir. C’est notre façon d’échapper à tout enfermement, spécialement celui de la morosité. Changer nos attitudes nous oblige à une remise en question, à de nouvelles prises de conscience. Ce  retournement « critique » permet souvent de nouvelles approches qui nous font voir des débuts de solution à des problèmes ou situations qui, à première vue, nous paraissaient être sans issue.

À l’exemple de ce qui se fait dans la nature, il y a des choses que nous voulons conserver et d’autres que nous acceptons volontiers de perdre. L’hiver va bientôt commencer, mais déjà les bourgeons sont là, porteurs d’une vie cachée en quête d’un printemps. Comme la nature nous en donne l’exemple, notre foi nous donne d’espérer contre toute espérance. Comme un puissant printemps face auquel l’hiver ne saurait tenir, Pâques est déjà là, il ne faut pas l’oublier. Il nous faut garder courage et confiance, croire que Dieu agit toujours, même si, à première vue, nous pourrions être tentés de penser le contraire. « Nous le savons bien, la création tout entière crie sa souffrance, elle passe par les douleur d’un enfantement qui dure encore. Et elle n’est pas seule : nous aussi, nous crions en nous-mêmes notre souffrance;; nous avons commencé par recevoir le Saint-Esprit, mais nous attendons notre adoption et la délivrance de notre corps. Car nous avons été sauvés, mais c’est en espérance. » (Romains, 8, 22-24a)

Jacques Marcotte, O.P.
en collaboration avec Anne Saulnier.
Québec

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