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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

12e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Dominique Charles, o.p.

Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ?

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 9,18-24. 
Un jour, Jésus priait à l’écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogea : « Pour la foule, qui suis-je ? »
Ils répondirent : « Jean Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un prophète d’autrefois qui serait ressuscité. »
Jésus leur dit : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre prit la parole et répondit : « Le Messie de Dieu. »
Et Jésus leur défendit vivement de le révéler à personne,
en expliquant : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite. »
Il leur disait à tous : « Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive.
Car celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie pour moi la sauvera.

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« Tu es le Christ » de Bertrand Bahuet

COMMENTAIRE

A la question de Jésus, Pierre a répondu : « Tu es le Messie de Dieu. » Et si Jésus nous posait aujourd’hui cette question, comment chacun de nous répondrait-il ? Impossible de nous dérober puisque nous sommes « chrétiens » et que les autres nous appellent ainsi. Littéralement, le mot « chrétien » a été formé à partir du mot « Christ » et veut dire « disciple du Christ ». Nous sommes de ceux qui se disent disciples de Jésus, qui est le « Messie » (mot venant de l’hébreu) ou le « Christ » (mot venant du grec). N’en est-il pas ainsi depuis cette première fois, à Antioche, qui nous est relatée par saint Luc dans le livre des Actes des Apôtres (Ac 11,26) ?

Les lectures de ce jour nous invitent ainsi à approfondir la signification de ce nom de « chrétien » que nous portons, en nous arrêtant sur le sens du mot « Messie ». Devant les trop nombreux drames du monde et les souffrances injustes et horribles que tant d’hommes, de femmes et d’enfants traversent, les gens s’écrient souvent : « S’il y avait un Dieu, il n’y aurait pas toutes ces souffrances ! » ou, comme l’écrit Élie Wiesel en se souvenant de l’enfer des camps nazis : « Mais où donc est Dieu ? »

On voudrait que Dieu, tel un tout puissant magicien, puisse surgir de l’ombre et intervienne au grand jour pour résoudre tous les problèmes avec sa grande baguette magique. On voudrait qu’il envoie de ces messies qui font rêver les enfants comme Superman, Zoro, Robin des Bois ou d’autres. Or, ces personnages-fiction du cinéma, qui permettent aux plus horribles histoires de finir bien, n’habitent que des mondes imaginaires créés par leurs auteurs et ceux de nos rêves.

Dieu ne surgit pas de notre imaginaire ! Le Messie qu’il nous envoie est entré au cœur du réel de l’histoire des hommes, une histoire dramatique, une histoire où le mal fait des ravages inacceptables : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté, qu’il soit tué, qu’il ressuscite… » Il faut que le Messie de Dieu connaisse l’impasse du drame humain du dedans pour y ouvrir une brèche par où il nous soit possible d’en sortir.

Le Messie de Dieu est « un Messie crucifié » ! C’est cela que Paul a écrit aux « chrétiens » de Corinthe avec des mots inoubliables : « Nous prêchons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens, un Christ qui est (pour les croyants) puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1,23-24). Un tel Messie ne sort pas de l’imaginaire humain : c’est le Messie de Dieu. Un Messie serviteur et souffrant, selon le prophète Isaïe ; un Messie transpercé, selon le prophète Zacharie : « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé. »

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Pour la foule qui suis-je? de Vasiliy Polenov, 1900

C’est ce Messie que Dieu a choisi d’envoyer à notre secours et non un magicien habile ou un héros surnaturel ! Il nous a envoyé un Messie « serviteur » dont la mission consistait à vivre avec nous et à entrer au-dedans du drame humain. Notre chemin de chrétien pourrait-il être autre que celui du Christ ? Ne nous a-t-il pas prévenus ? « Qui veut marcher à ma suite doit renoncer à lui-même pour me suivre… qui veut sauver sa vie doit la perdre à ma suite. » Notre foi de « chrétien » passe donc inévitablement par la reconnaissance de Jésus crucifié comme Messie et par une adhésion sans condition à ce Transpercé qui nous ouvre un salut au cœur de nos drames qu’il a décidé de prendre sur lui pour nous en alléger le poids trop lourd qui nous écrase.

« Le baptême nous a unis au Christ, écrit Paul aux Galates, nous avons revêtus le Christ, nous ne faisons plus qu’un dans le Christ, nous appartenons au Christ… » Ces expressions de Paul rejoignent notre grand désir de croyant tel qu’il s’exprime dans le Psaume 62 que nous lisons dans la liturgie de ce dimanche : « Ton amour vaut mieux que la vie… Oui, tu es venu à mon secours… Mon âme s’attache à toi, ta main droite me soutient ! »

Où donc est Dieu quand les hommes souffrent l’injustice, les outrages, les tortures, les maladies ? Dieu est là, tout proche, avec eux : il partage dans le silence la souffrance de chacun, car le Messie crucifié peut désormais rejoindre chacun de nous dans le mystère de son être. La Pâque de Jésus recommence alors en chacun de nous car la puissance de Dieu agit mystérieusement dans nos êtres. Cela, nous ne pouvons le balbutier que dans la foi au Messie de Dieu. Il n’y a donc pas de vie perdue ! Le nom et le visage de chaque homme habitent la mémoire infinie de Dieu. Dieu sauve ceux qui sont perdus… Nous plaçons notre foi dans la force de résurrection qui est en Dieu et qui s’est déployée dans la mort du Christ.

Le projet de Dieu est de faire de nous ses amis et ses enfants ; il veut faire de l’humanité sa famille et sa demeure. Dieu a décidé d’habiter chez nous et avec nous. Dans le destin du Christ, Dieu a lié notre destin au sien. Dieu est solidaire de chacun et de tous. En cela, il est notre véritable sauveur et il ne peut y en avoir d’autre. Dans le Christ, Dieu s’unit à chacun et il nous unit les uns aux autres : il fait de l’humanité une famille solidaire d’enfants de Dieu.

« Tu es le Christ de Dieu ! » dit Pierre, en notre nom à tous. Nous avons revêtu « le Messie de Dieu » ; notre destin, comme celui de tout homme, est désormais lié à celui de cet homme en qui Dieu est venu à notre rencontre et en qui nous allons à sa rencontre. Nous ne faisons plus qu’un avec « le Christ de Dieu » qui lui-même ne fait qu’un avec le Père dont le projet d’amour infini est de sauver tous ceux qui sont perdus. Le « Christ de Dieu » n’a-t-il pas dit : « Je suis venu sauver ce qui était perdu » (Lc 19,10) ?

Fr. Dominique CHARLES, o.p.

One thought on “12e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

  1. Gabriel YETNA II

    Le nom et le visage de chaque homme habitent dans la mémoire infinie de Dieu avant la génèse; le Messie de Dieu est venu nous reconcilier à cette vérité! nous sommes enfants de Dieu et rien ne nous séparera de son Amour.

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