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Une liturgie québécoise

Imprimer Par Denis Gagnon

Ça marche. Tous les jours, surtout le soir. Ça marche dans Montréal, dans Québec et en quelques autres endroits. À Montréal, on part du parc Émilie-Gamelin, dans le quartier de l’Université du Québec. Et on marche dans toutes les tenues, habillé, déshabillé, masqué et à visage découvert. On marche en chantant, en silence, en conversant sur mille et une choses. On crie surtout : des slogans, des hourras, des bêtises aussi.

Tous les soirs, c’est la grand-messe. On croyait que la déconfiture des églises allait faire perdre l’habitude des rassemblements. Il y a quelques années, à Tout le monde en parle, Kevin Parent avait déploré la disparition des attroupements sur les perrons d’église. Eh bien, mon vieux, console-toi, ça reprend. Et ça réunit des têtes de toutes les couleurs. Et sans compter les petits carrés rouges qui prennent la place des médailles scapulaires et des petites croix des premières communions.

La procession réunit surtout des jeunes, mais aussi des plus vieux, des parents, des personnalités sociales… Parmi les carrés rouges se glissent des carrés blancs. Des gens qui essaient de prendre une certaine distance. Selon la météo des déclarations et des prises de position, ils enfilent les soutanes du gouvernement ou les surplis des associations estudiantines. On dira qu’ils sont des caméléons. Je préfère reconnaître en eux assez de sagesse pour nuancer le débat. Tout n’est pas rouge et tout n’est pas vert. Il y a du bon dans toutes les sacristies, et du moins bon partout.

Il y a beaucoup de colère dans la liturgie québécoise. Les jeunes gueulent de procession en procession, de reportage en reportage. Ils ont sûrement raison de rêver à une autre société, un autre royaume des cieux. Mais les paradis ne s’aménagent pas du jour au lendemain. Ils se font lentement, de rosier en rosier, de lilas en lilas. «Patience et longueur de temps valent mieux que force et que rage.»

Pour leur part, les élus, juchés sur les autels de l’Assemblée nationale, grognent à qui mieux mieux. Ils ont à gérer un problème social colossal et ils n’arrivent pas à se brancher sur un rituel qui rallierait les bons chrétiens et les autres. Ils pensent aussi à protéger leur canonisation lors des prochaines élections. Ça joue sûrement dans le décor.

Puis-je me permettre un souhait? Que la colère se dégonfle. Elle n’est jamais porteuse de solution valable. Que nous ayons la patience de laisser germer la sérénité. La peur, la vengeance, la panique ne génèrent pas la lucidité nécessaire pour faire face à la musique. Un peu de distance avant de nous précipiter sur les règlements possibles. Un peu de respect les uns vis-à-vis des autres. Et surtout la conviction qu’il existe une solution. Au Québec, nous avons déjà vécu dans la bonne entente. Nous pouvons encore connaître une paix durable. C’est la grâce que je nous souhaite… Amen.

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