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Discours no 40 sur le baptême chrétien

Imprimer Par Grégoire de Nazianze

I. L’illumination baptismale est éclat fulgurant des âmes, transformation du cours de la vie, mettant la conscience en quête de Dieu. Cette illumination est pour notre faiblesse un secours : mettant de côté la chair, elle fait suivre l’Esprit et entrer en communion avec le Verbe. Redressement de la nature créée dont elle submerge le péché, elle donne part à la lumière et anéantit les ténèbres. Cette illumination fait monter vers Dieu, partager la route du Christ; elle est l’appui de la foi, la perfection de l’intelligence, la clé du royaume des cieux. Transformation de la vie, suppression de la servitude, libération des liens, elle est une amélioration totale de l’être. Cette illumination est, de tous les dons de Dieu, le plus beau et le plus magnifique. Aussi, comme on parle du Saint des saints et du Cantique des cantiques, car ils comprennent que la transfiguration du baptême est l’illumination par excellence, étant donné qu’elle est la plus sainte de toutes celles de la terre.

Comme le Christ qui l’accorde, le baptême reçoit bien des noms divers : soit à cause de l’extrême joie qu’on a de l’avoir reçu (car on aime à savourer en l’appelant de noms divers ce à quoi on est passionnément attaché), soit que la multiplicité d’aspects du bienfait qu’il apporte explique cette multitude de vocables. On le nomme : le Don, la Faveur gratuite; le Bain, l’Onction; l’Illumination, le Vêtement d’immortalité, l’Eau de la régénération, le Sceau de Dieu et de tous les autres termes d’honneur qu’on peut trouver.

C’est un Don, qu’aucun acte ne mérite et une Grâce dont on est aussi débiteur; un Bain dans l’eau duquel le péché est enseveli; une Onction, par son caractère sacré et royal, les deux titres qui justifient l’onction. Une illumination par l’éclat qu’il donne; un Vêtement revêtu pour cacher la honte, un Bain qui lave vraiment, un Sceau qui protège et signifie la souveraine maîtrise de Dieu.

II. … Purifions donc notre corps tout entiers; consacrons toute notre sensibilité. Que rien en nous n’échappe à l’initiation, qu’il n’y ait plus rien de la première naissance, ne laissons rien qui ne soit illuminé.

Que l’illumination baptismale touche nos yeux pour nous donner un regard droit, pour que nous ne portions en nous-mêmes aucune de ces imaginations déshonnêtes qui viennent d’un spectacle dont notre vaine curiosité est toujours en quête. Car même si nous ne vouons pas un véritable culte à nos passions, nous avons cependant une âme souillée. Que ce soit, chez nous, une poutre ou un fétu de paille, ôtons-les; nous pourrons alors voir ceux des autres.

Que l’illumination touche nos oreilles; qu’elle touche notre langue, pour que nous entendions ce que dira le Seigneur, qu’il nous fasse connaître sa « miséricorde du matin », et que nous percevions l’exultation et la joie qui résonnent aux oreilles ouvertes à la grâce divine. Quant à notre langue, que l’illumination lui évite d’être un glaive acéré ou un rasoir effilé et de rouler sous elle peine et souffrance. Qu’au contraire, attentif envers l’Esprit-aux-langues-de-feu, nous exprimions la sagesse cachée de Dieu qui se manifeste dans le Mystère.

Guérissons notre odorat pour n’être pas efféminés et ne pas nous disperser en poussière au lieu de répandre un parfum délicat. Respirons plutôt la senteur du baume qui a été répandu pour nous; laissons notre esprit s’en imprégner; laissons-nous faire et réformer par lui, de façon que de nous aussi s’exhale une bonne odeur.

Purifions notre toucher, notre goût, notre gosier; ne donnons pas de caresses efféminées, et ne nous plaisons pas à la mollesse. Touchons plutôt, comme il convient, à l’imitation de Thomas, le Verbe qui s’est fait chair pour nous. Ne nous laissons pas tenter par les mets succulents et les friandises, laissant ce qui est plus amer à nos frères; goûtons plutôt et apprenons que le Seigneur est doux, d’un goût meilleur et qui demeure. Ne nous contentons pas d’apporter de faibles soulagements à notre gosier, quand il est amer et désagréable, quand il renvoie et ne garde pas ce qu’on lui donne; offrons-lui plutôt la douceur des paroles qui sont plus délicieuses que le miel.

En outre, s’il est encore bon d’ajouter que purifier notre tête où s’élaborent nos sensations, c’est tenir droite la tête qu’est le Christ, d’où toutes les parties du corps tirent leur coordination et leur union; et jeter à bas le péché qui nous domine, nous, mais qui est dominé par celui qui est plus fort que lui.

Il est bon de sanctifier et de purifier nos épaules pour qu’elles puissent porter la croix du Christ, car elle n’est pas toujours facile à porter pour n’importe qui. Il est bon, de même, de nous sanctifier les mains et les pieds – les mains pour qu’en tout lieu on puisse les montrer pures et pour qu’elles saisissent l’enseignement du Christ. Qu’ainsi, jamais le Seigneur ne se mette en colère et que l’action de nos mains accrédite la parole, comme celle que le Seigneur a confiée à la main du prophète.- Et les pieds, afin qu’ils ne courent répandre le sang et ne se précipitent pas vers le mal; qu’au contraire, ils soient chaussés pour l’Évangile, prêts à remporter le prix auquel nous sommes appelés dans le ciel, et à recevoir le Christ qui lave et purifie.

S’il y a aussi une façon de purifier les entrailles qui contiennent et digèrent la nourriture que nos tenons du Verbe, il est bon de ne pas les traiter comme un dieu en nous adonnant à la sensualité et à l’excès de nourriture. Purifions-les, au contraire, le plus possible; dépouillons-;es e leur grossièreté pour qu’elles puissent accueillir la parole du Seigneur et ressentir une saine souffrance devant l’achoppement d’Israël. Je trouve que le cœur et les organes intérieurs sont dignes aussi d’honneur. Je me fie pour cela à David, quand il demande que soit créé en lui un cœur pur, que soit renouvelé dans ses entrailles un esprit sans détour : il désigne par là, je pense, la faculté de penser, avec ses mouvements, c’est-à-dire les idées.

Et le flanc? Et les reins? Ne laissons pas cette question de côté. Eux aussi, que la purification les atteigne. Que nos reins soient ceints et contenus par la modération, comme le voulait autrefois la loi pour les Israélites lorsqu’ils participaient à la Pâque.

Personne n’est pur quand il sort d’Égypte; s’il n’a maîtrisé ses passions, personne n’échappe à l’ange exterminateur. Que nos reins subissent donc ce vertueux changement et portent toute leur ardeur vers Dieu, de manière à pouvoir dire : « Seigneur, devant toi, tout mon désir », et : « Je n’ai pas désiré le malheur de l’homme. » Il faut, en effet, devenir des hommes passionnés de l’Esprit. Ainsi, ce dragon qui porte le meilleur de sa force sur le nombril et les reins serait terrassé si son pouvoir en ces parties-là était anéanti.

Rien d’étonnant que j’accorde plus d’honneur aux parties indécentes de notre corps; en parlant ainsi, je les mortifie, je les corrige et je me dresse contre la matière. Donnons tous nos membres à Dieu sur la terre; consacrons-les lui tous. Je ne précise pas : le lobe du foie, ou les reins avec leur graisse, ou une autre partie du corps, ou celle-ci ou celle-là; car pourquoi devrions-nous mépriser les autres? Offrons-nous tout entiers; devenons des holocaustes raisonnables, des victimes parfaites. Faisons une offrande sacrée, non seulement de nos bras ou de notre poitrine, ce serait trop peu. Mais en nous donnant tout nous-mêmes, retrouvons-nous tout entiers en échange, puisque c’est recevoir sans rien perdre que de se donner à Dieu et de lui faire l’offrande sacrée de toute notre personne.

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