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Un devoir d’attention

Imprimer Par Denis Gagnon

Toute une semaine sans journaux, sans télévision, sans radio, sans bulletins d’information. Occupé à animer deux sessions d’étude bout à bout, j’ai nagé toute la semaine dans mes notes de cours et dans les gros bouquins. J’ai parlé. J’ai fait parler. Mais nous n’avons abordé que de grandes questions théoriques au delà de ce qui se passait sur le reste de la planète.

Il faut faire cela de temps à autre. Il faut savoir dépasser l’immédiat. La réflexion nous permet de prendre du large, de donner de l’horizon à la vie, même aux petites banalités du quotidien. Il faut faire cela pour renouveler le regard, le rendre plus perspicace.

Mais, pendant que nous devisons sur les grands principes, pendant que nous concoctons de grandes idées, le reste de la planète continue sa route. Et son voyage se poursuit rapidement. Le monde se déplace à une vitesse vertigineuse parfois. Revenez après quelques jours d’absence et vous aurez l’impression que votre premier bulletin d’information ne diffuse que des mystères.

Faut-il tout suivre? Faut-il tout connaître du quotidien de la planète? Faut-il nous tenir constamment sur le bord de la route à guetter les événements qui passent, ceux qui klaxonnent en période électorale, ceux qui carburent à la violence et au terrorisme, ceux qui roulent à la vitesse des ouragans et des catastrophes écologiques? Épier la déchirure d’une mère dont l’enfant est en train de mourir de faim? Évaluer l’ampleur d’un scandale de politiciens? Ou, plus réjouissant, applaudir à la performance d’une troupe de théâtre? Ou au succès d’une entreprise régionale?

Les images de la télé nous montrent un décor que nous n’avons pas visité nous-mêmes. Le vent et les orages peuvent détruire sans nous. Et les politiciens n’ont besoin de nous qu’en période électorale. Nous ne sommes donc pas indispensables pour que la vie continue son petit bonhomme de chemin.

Mais personnellement, puis-je demeurer hors circuit? Puis-je me permettre de traverser l’histoire en contournant les événements, en ne me sentant point concerné par les autres, par les drames qu’ils vivent, par les conflits que subissent les personnes comme les peuples?

Né de la terre et sur la terre, je lui appartiens. Terrien parmi d’autres terriens, les joies et les peines des autres me concernent. Nous traversons la mer de l’existence sur le même bateau. Mon coup de rame est bien modeste, mais il est multiplié par le coup de rame des autres matelots. Je dépends du travail des fermiers pour mes trois repas quotidiens. J’ai besoin de la couturière et du marchand pour me protéger des grands froids de l’hiver nord-américain. Pour apprendre à lire et à écrire, il m’a fallu la patience d’une bonne institutrice. Pour jouer au tennis ou au badminton, je dois compter sur un adversaire. Bref, je ne peux vivre sans les autres. Il me les faut à tout prix…

Et les autres comptent sur moi autant que je compte sur eux. Ils ont besoin de moi. Je leur suis indispensable même si, je souhaite qu’ils m’aiment sans intérêt égocentrique. Nous nous tenons mutuellement par la main même si parfois le contact est froid, même si parfois nous avons besoin de distance.

La planète ne peut respirer que de la solidarité. Elle s’empoisonne quand elle goûte la haine ou le mépris. Elle risque la mort quand elle coupe les ponts et brise les liens fraternels. Au contraire, le bonheur a un avenir quand nous portons les fardeaux les uns des autres, quand nous nous reconnaissons un devoir d’attention.

Les bulletins d’information nous sont nécessaires. Ils ne se contentent pas de réveiller en nous la curiosité. Parfois ils nous font voyeurs, j’en conviens. Trop souvent on nous sert de l’information spectacle, je le regrette. Mais journaux, bulletins télévisés ou radiodiffusés ont pour première vocation de faire naître en nous et entre nous solidarité, fraternité, justice, souci des autres et service. Ils rapprochent. Ils font découvrir. Ils créent des liens. Ils nous rendent familiers les uns des autres. Beau travail, indispensable travail.

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