L’autre jour des enfants ont apporté à la messe leurs sacs d’école pour une offrande, pour une bénédiction. Son sac d’école, c’est beaucoup pour un enfant. Vous vous en souvenez? Nous avons tous eu nos heures de gloire et d’émotion avec notre sac d’école. C’était pour nous le symbole d’une mise en route, d’une routine établie, le signe d’une autonomie, d’une confiance en soi grandissante. Nous avons tous apporté dans nos sacs un peu de nous-même, nos labeurs, nos projets, nos rêves. Nous y mettions nos secrets, et avec nos livres et cahiers, notre fierté, nos peines.
Le sac d’école c’était notre sécurité, notre assurance, le lieu de nos prévoyances. Le sac d’école charriait nos devoirs et leçons, nos travaux bien faits, les récompenses méritées, les sanctions annoncées. Nous apportions même dans nos sacs nos bulletins où se voyaient nos avances ou nos reculs, les notes reçues qui mesuraient notre application. Avouons qu’à cet égard, à certains moments, nous hésitions à montrer à nos parents le contenu de notre sac d’école. Peut-être avions-nous peur de leurs réactions. Peut-être avions-nous honte de nous-mêmes?
L’Évangile, c’est un peu le contraire de toute cela. Il nous fait entrer dans une autre logique. Il nous révèle une autre dimension de vie, où nous devenons sensibles à un autre regard, à une nouvelle façon de voir, qui est à l’opposé de la symbolique du sac d’école. Dieu ne fouille pas dans notre sac pour voir si nous avons bien fait nos devoirs, si nous avons bien travaillé. Sa bienveillance et son appel nous rejoignent au-delà des mérites et des initiatives personnelles, des performances et des seuls rendements. Dieu intervient dans nos vies, mystérieusement sans doute, mais amoureusement, et il nous invite tout simplement à prendre part à l’avènement de son Règne. Il y invite chacun à son heure. L’important c’est d’être attentifs et disponibles, d’accueillir son appel et d’y donner suite en toute confiance. Nos mentalités d’écoliers ou d’écolières en compétition nous portent facilement à juger des autres et de Dieu et de nous-mêmes selon des échelles de mérites qui mesurent les efforts apportés à la tâche et le temps investi. Or, sans mépriser la valeur d’une fidélité et d’un engagement de première heure, l’Évangile nous donne d’autres critères qui déjouent nos références habituelles. Il nous révèle un rapport vraiment libérateur de Dieu avec nous, sous le signe de la gratuité et de l’amour, où la justice se marie avec la bonté, où nos mérites sont relativisés face à l’immense générosité de Dieu.
Nous apprenons en effet que Dieu est juste et bon, qu’il dispense son bien à tout le monde, même à ceux qui ont fait l’école buissonnière. Son bien, c’est le bien-aimé lui-même, qui a travaillé pour nous, lui le juste, notre justice, qui s’offre à nous comme un pain merveilleux. Le salaire promis et donné, que jamais nous ne saurions mériter, c’est lui. Voici que le Fils nous est donné et qu’il nous établit en communion les uns avec les autres dans la paix et l’amour.
Jacques Marcotte, o.p.