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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Dominique Charles, o.p.
Parole et vie

24e Dimanche du temps ordinaire. Année C.

Imprimer Par Jacques Sylvestre, o.p.

Au coeur de l’Évangile

Cependant les publicains et les pécheurs s’approchaient tous de lui pour l’entendre. Et les Pharisiens et les Scribes de murmurer :Cet homme, disaient-ils, fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux ! Jésus leur dit alors cette parabole : Lequel d’entre vous, s’il a cent brebis et vient à en perdre une, n’abandonne les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert, pour s’en aller après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvée ? Et, quand il l’a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses épaules, et, de retour chez lui, il assemble amis et voisins et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l’ai retrouvée ma brebis qui était perdue ! C’est ainsi, je vous le dis, qu’il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentir.

Ou bien, quelle est la femme qui, si elle a dix drachmes et vient à en perdre une, n’allume la lampe, ne balaie la maison et ne cherche avec soin, jusqu’à ce qu’elle l’ai retrouvée ? Et, quand elle l’a retrouvée, elle assemble amies et voisines et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l’ai retrouvée, la drachme que j’avais perdue ! C’est ainsi, je vous le dis, qu’il y a de la joie parmi les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent.

Il dit encore :Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : Père donne-moi la part de fortune qui me revient. Et le père leur partagea son bien. Peu des jours après, le plus jeune des fils, rassemblant tout son avoir, partit pour un pays lointain et y dissipa son bien dans une vie de prodigue. Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint en ce pays et il commença à sentir la privation. Il alla se mettre au service d’un des habitants de la contrée qui l’envoya dans ses champs garder les cochons. Il aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubes que mangeaient les cochons. Mais personne ne lui en donnait. Rentrant alors en lui-même, il se dit : Combien de journaliers de mon père ont du pain en abondance, et moi, je suis ici à mourir de faim ! Je veux partir, retourner vers mon père et lui dire : Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi ; je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes journaliers. Il partit donc et s’en retourna vers son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut touché de compassion ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa longuement.

Le fils alors dit à son père : Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Mais le père dit à ses serviteurs : Vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures aux pieds. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ! Et ils se mirent à festoyer. Son fils aîné était aux champs. Quand, à son retour, il fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. Appelant un des serviteurs, il lui demanda ce que cela signifiait. Celui-ci lui dit : C’est ton frère qui est de retour, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il est revenu en bonne santé. Le fils aîné se mit alors en colère et refusa d’entrer. Son père sortit l’en prier. Mais il répondit à son père : Voici tant d’années que je te sers sans avoir jamais transgressé un seul de tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau, à moi, pour festoyer avec mes amis ; et puis ton fils que voilà revient-il, après avoir dévoré tout ton bien avec les femmes, tu fais tuer pour lui le veau gras ! Mais le père lui dit : Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Mais il fallait bien festoyer et se réjouir, puisque ton frère que voilà était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.

Commentaire :

En quoi, aux yeux de saint Luc, ce chapitre 15e peut-il être d’actualité pour nous chrétiens d’hier et aujourd’hui ? Faut-il transférer dans ce christianisme primitif le problème juif indiqué dans l’introduction ? Les premiers chrétiens auraient-ils réparti leurs coreligionnaires en deux catégories ? Ou bien, faut-il croire qu’au temps de l’évangéliste, une cassure s’était produite concernant la réception du message de l’évangile : refusé par les juifs, le message de miséricorde avait trouvé bon accueil de la part des païens. Paul et Barnabé déclaraient : C’est à vous d’abord, Juifs, qu’il fallait annoncer la Parole de Dieu. Puisque vous la repoussez et que vous ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle, nous nous tournons vers les païens. (Ac. 13:44-48 et 28:25-28)

Si nous établissons un rapport entre l’introduction de ce chapitre 15e et l’épisode terminal, nous pourrions peut-être discerner la ligne directrice de l’ensemble. Des murmures sont à l’origine de l’enseignement de Jésus et le murmure revient avec l’entrée en scène du fils aîné. Tout le passage et ses refrains, ses appels à la joie, pourraient être comme un appel aux auditeurs récalcitrants. Le chapitre indiquerait alors comment passer du murmure à la joie partagée. Le chapitre reste ouvert et interpelle aujourd’hui encore le lecteur chrétien de l’évangile. Il stigmatise toute attitude d’ostracisme, d’intolérance de groupes choisis, d’élites, fermés sur eux-mêmes, incapables d’amour pour ceux que l’on méprise. Comment corriger pareille attitude : partager les sentiments de Dieu.

Jésus étonne et scandalise ceux qui se considèrent comme justes et estiment que Dieu ne peut que se réserver aux gens pieux plutôt qu’aux méchants. Jésus va répondre en révélant quelle est la conduite de Dieu. Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Appeler non les justes mais les pécheurs. (Mc.2 :17)

Dans les première et deuxième paraboles, si la recherche retient davantage l’attention de Matthieu (18 :12-14), en saint Luc, c’est la joie qui sous tend tout le récit.

Un fils pour son père : tel est sans doute le secret de la parabole de l’enfant prodigue. Chacun de deux fils a une fausse idée à ce sujet : Le cadet s’imagine ne plus être fils, en raison de ses inconduites. L’aîné, lui, se considère comme serviteur de son père, mais un serviteur mal rétribué. Le père corrige en redisant à son aîné qu’il est non pas serviteur mais le fils à qui tout appartient en même temps qu’à son père. Et du cadet que l’aîné dénonce comme Ton fils que voilà , la père le dit Ton frère que voilà . Jésus dénonce ici une religion mercenaire qui rend incapable d’adopter envers Dieu, une attitude filiale en même temps qu’une attitude fraternelle avec les hommes. Opposition de Jésus au type de religion servile que peut engendrer certain culte de la loi ou certaine fausse théologie non inspirée de la Révélation. Car, il y a belle lurette que Dieu voit en nous des fils. Relire les premiers accents prophétiques (Osée 11, Jér. 2-3)

Dans cette révélation , car c’en est une, chacun, quelle que soit sa condition, peut se resituer devant Dieu. Le secret est le même qu’aux premiers temps : pour Dieu, nous sommes des fils et des filles éternellement bien-aimés, et les uns pour les autres, des frères et des sœurs . C’est pourquoi nous pouvons dire avec l’Esprit qui crie en nous : Abba ! Père !

Nous sommes au cœur de l’Évangile, la Bonne Nouvelle, la Révélation.

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